Star Trek Voyager
La saison 8 virtuelle
8.07 Rétrospection
Dernière mise à jour :08 novembre 2001
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8.07 RETROSPECTION
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.. Episode 8.07 - Rétrospection
Par: Seema (seemag1@yahoo.com)
Version française: André Blouin (a_blouin@hotmail.com)

Note: Star Trek: Voyager, personnages et autres produits dérivés sont des marques déposées de Paramount Pictures. Aucune infraction aux droits d'auteurs de Paramount voulue. La Saison 8 virtuelle de Voyager (Voyager Virtual Season 8, VS8) est une entreprise à but non lucrative. L'histoire est propriété de son auteur. Pas de reproduction sans sa permission.


Rétrospection
"B'Elanna se voit offrir l'opportunité de changer l'histoire"
 
Une grande planète apparut indistinctement sur l'écran principal. C'était une planète de classe M, la première qu'ils voyaient depuis des semaines. Mais le plus important, selon les sondages que Seven of Nine avait fait, cette planète était particulièrement riche en dilithium.
"Une occasion parfaite pour une courte mission d'exploration." B'Elanna Torres réfléchissait tout en regardant les cartes topographiques de la planète.
"Les relevés montrent un grand dépôt sur le continent nord", dit B'Elanna, " et une chance pour nous, près de la surface. Il devrait être facile d'extraire assez de dilithium pour durer quelques mois."
A côté d'elle, Harry Kim inclina la tête.
"Je vois un dégagement non loin de là", dit Harry. Il indiqua un endroit sur la carte. "Cela semble être un bon endroit pour faire atterrir le Delta Flyer."
"Et les relevés météorologiques semblent bons aussi. Ciel bleu, ensoleillé avec une brise légère de l'ouest", dit B'Elanna. Elle s'assit à nouveau dans son fauteuil, laissant un large sourire transparaître sur son visage." C'est vraiment bon de sortir, Harry. J'aime bien notre vaisseau Voyager, mais après un certain temps, on devient un peu claustrophobe. Cela fait tellement longtemps... "
"Même une petite mission ennuyeuse comme cela ?" la taquina Harry. "Vous êtes sûre que vous n'auriez pas voulu quelque chose de plus passionnant ?"
B'Elanna fronça les sourcils et affectueusement donna une tape sur le bras d'Harry.
"C'est parfait pour moi, pour le moment", dit-elle. "Je ne serai pas loin de Miral trop longtemps."
"C'est votre première mission depuis qu'elle est née, n'est-ce pas ?" demanda Harry.
"Oui."
"Vous semblez vous en tirer fort bien", fit observer Harry. "Aucune inquiétude du tout ?" B'Elanna secoua la tête. "Samantha Wildman m'a promis de s'en occuper quand Tom sera en service." Elle fit une pause en pensant avec quel naturel Sam s'occupait de Miral, une habileté que B'Elanna lui enviait de temps en temps car elle était occasionnellement écrasée par ses nouvelles responsabilités. Parfois, B'Elanna s'estimait plus à l'aise avec un hypospanner qu'avec son propre bébé. Mais elle chassa ces sentiments très rapidement. "Je ne vois personne d'autre, à part le Docteur et Tom, en qui j'ai toute confiance, pour s'occuper de Miral. Le Capitaine a aussi dit qu'elle y jetterait un coup d'oeil."
"Le Capitaine semble vraiment s'intéresser à Miral", dit Harry. Il se pencha et pressa quelques touches sur la console. "Je commence la descente."
"Rétro-moteurs" murmura B'Elanna. "Et oui, le Capitaine aime bien passer du temps avec Miral. OK. Nous sommes maintenant revenus en puissance d'impulsion."
"Entrée dans l'atmosphère."
"Les boucliers tiennent bons", dit B'Elanna. Ses doigts experts volèrent sur le panneau de contrôle en même temps qu'elle effectuait diverses vérifications. " Nous risquons d'avoir bientôt une petite turbulence, mais rien de sérieux." Comme elle disait cela, le Delta Flyer se mit à trembler, faisant presque sortir Harry de son fauteuil.
"Une petite turbulence ?" dit-il avec amusement en même temps qu'il essayait de reprendre son équilibre.
B'Elanna sourit. "Appréciez le temps qui passe Harry. C'est probablement la plus grande excitation que vous éprouverez lors de cette mission."
Harry secoua la tête et il se concentra sur l'atterrissage du Delta Flyer.
"Vous savez", dit-il, "C'est peut-être étrange, mais je peux très bien vivre avec moins d'excitation dans ma vie ces jours-ci." B'Elanna hocha la tête. Elle savait exactement ce qu'il avait voulu dire.

***

"Atterrissage en douceur", dit B'Elanna tout en appliquant les procédures au sol. Elle coupa soigneusement tous les systèmes qui fonctionnaient encore. "Beau travail, Harry."
"Merci. Tom n'est pas le seul pilote convenable à bord du Voyager, vous savez."
B'Elanna se mordit les lèvres. "Dois-je dire à mon mari que vous voulez prendre son poste ?"
Harry étouffa un rire alors qu'il ouvrait un petit casier à l'arrière du Delta Flyer.
"Laissons cela entre-nous", dit Harry, toujours sur un ton taquin. Il retira deux phaseurs et vérifia rapidement que les batteries n'étaient pas vides. Le tricordeur donna des signaux verts et Harry eut un soupir de soulagement.
"Vous pensez vraiment que nous allons avoir besoin de phaseurs ?" demanda B'Elanna avec un froncement de sourcils. "Les vérifications n'ont rien montré d'inhabituel."
"On ne sait jamais."
"Toujours prêt", dit B'Elanna, secouant la tête avec amusement. "Ca va, je pense que nous sommes parés. J'ai verrouillé tous les systèmes. Le nouveau code chiffré de Seven est une beauté, quoiqu'on puisse le comparer à une torpille contre une mouche."
"On n'est jamais trop prudent", dit Harry béatement. B'Elanna lui répondit par un clin d'oeil. Harry ouvrit l'écoutille du Delta Flyer et sortit sous un soleil éclatant. B'Elanna, éblouie elle aussi, suivit avec sa trousse à outils.
"WOW", dit-elle, en regardant autour d'elle. L'herbe, à hauteur de genou, se balançait doucement avec la brise et couvrait une vaste et large étendue de vert et de jaune parsemée de fleurs délicates oranges et blanches. Des collines ombragées bleues tapissaient l'horizon. "C'est... Beau. Parfait. Encore plus... "
B'Elanna étendit les bras comme si elle essayait d'embrasser le jour, le paysage, tout. Elle ferma les yeux, inhalant les bonnes odeurs du pré et sentait la chaleur du doux soleil contre son visage. Il lui vint alors à l'esprit qu'elle et Tom n'avaient jamais sorti Miral à l'extérieur. Bien sûr, il y avait eu des sorties de famille dans le holodeck, des journées à la plage ou des balades en voiture sur la légendaire Route One, mais jamais dans la nature comme cela. Avec peine, B'Elanna réalisa que cela pourrait prendre des mois, elle se refusait à penser en termes d'années, avant qu'elle et Tom ne soient capables d'emmener Miral au grand air.
Ils avaient été si près, tellement près de la Terre et maintenant... B'Elanna ouvrit les yeux.
Ne pense pas comme ça, se dit-elle. Nous allons rentrer à la maison. Le Capitaine nous l'a promis et elle ne nous a jamais fait faux-bond. C'est juste un autre détour.
Elle jeta un coup d'oeil à Harry, qui semblait plus intéressé par les lectures de son tricordeur que par l'environnement.
"Un problème ?" demanda B'Elanna. Elle regarda fixement par-dessus son épaule pour tenter de déterminer ce qui avait capturé l'intérêt d'Harry.
Harry examinait son tricordeur. "Le dilithium est dans cette direction, à deux kilomètres." Il pointa vers les collines. "Etes-vous prête pour une excursion à pied, Maquisarde ?"
"Si vous l'êtes, Starfleet", répondit B'Elanna, bannissant rapidement toute pensée de la Terre de son esprit. Elle commença à marcher dans la direction qu'avait indiquée Harry. "Vous savez, cela ne serait pas une mauvaise idée de fonder une nouvelle colonie ici." Elle avait dit cela négligemment, presque désinvoltement, une réflexion bien plus qu'autre chose.
"Quoi ?" répondit Harry. Le choc était évident dans le ton de sa voix. "Vous resteriez vraiment ici ?"
"Pourquoi pas ?" B'Elanna en haussant les épaules. Elle jeta un coup d'oeil à son tricordeur. "C'est une planète de Classe M avec un bon climat et toutes les ressources dont nous avons besoin. Je détecte une rivière à un kilomètre vers l'est et il pourrait y avoir une forêt pas très loin d'ici."
"Donc vous ne pensez pas que nous arrivions un jour à la maison."
B'Elanna jeta un coup d'oeil de côté à son ami. Elle avait ressenti une inquiétude dans sa voix et se souvenait que beaucoup de membres d'équipage avaient été dévastés quand Voyager s'était retrouvé dans ce que Tom appelait la 'quatrième dimension'.
La vérité étant ce quelle est, l'idée de s'installer définitivement à un endroit était très attirante, tout comme l'idée de retourner à la maison dans le Quadrant Alpha. B'Elanna savait qu'elle ne devait pas être égoïste. Elle avait sa fille, son mari. Pour les autres à bord du Voyager, leurs familles étaient ailleurs. Construire une nouvelle vie là dans un univers statique n'était pas une option pour eux et ne pourrait jamais l'être.
"Non", dit doucement B'Elanna. Elle mit sa main sur le bras d'Harry. "Je n'ai pas renoncé. Je plaisantais un peu. Pas tellement drôle, je pense. J'ai été emportée par l'air frais et le paysage."
"Tant que vous n'êtes pas sérieuse", dit Harry. "J'aurais eu horreur de remonter et de vous entendre proposer au Capitaine l'établissement d'une colonie permanente ici. Après tout ce que l'on a vécu ensemble..."
"Pas une chance", dit B'Elanna. Elle enleva sa veste et se l'enroula autour de la taille. "Vous savez, nous devons profiter le plus possible de cette occasion et voir si nous ne pouvons pas trouver quelques produits d'alimentation de base qui remplaceraient les provisions de racine de leola de Neelix. Chell m'a mentionné que les réserves de vivres se sont sérieusement réduites depuis le départ de Neelix."
"Bonne idée", répondit Harry. Il s'arrêta un instant. "Vous savez, il me manque."
"Vous n'êtes pas le seul", dit doucement B'Elanna. Elle pensa à toutes les fois où Neelix avait réussi à la consoler, à trouver les paroles justes. Il l'avait aidée lorsqu'elle avait eu des comportements auto destructifs quelques années plus tôt et elle était reconnaissante des conseils que Neelix lui avait donnés lorsque sa relation avec Tom avait été quelque peu tumultueuse. Mais le plus important était que Neelix avait été son ami et que B'Elanna espérait sincèrement qu'il était heureux de sa nouvelle vie.
"Peut-être faut-il s'installer ici après tout", dit Harry. B'Elanna le regarda toute surprise.
"Mais que se passe-t-il ? Il y a quelques minutes, vous étiez tout à l'envers à cause de moi-" elle fit une pause car son tricordeur commençait à émettre des signaux sonores. "Harry, je perçois des signes de vie humanoïdes."
Harry sembla perplexe. "Je n'ai perçu aucun signe de vie depuis le Flyer, humanoïde ou autre."
"Regardez, ils sont tout autour de nous", dit B'Elanna. Elle tourna tout autour, mais il n'y avait rien d'autre que la prairie à l'infinie dans toutes les directions. "C'est étrange. Ils sont partout." Elle montra le tricordeur à Harry pour qu'il puisse vérifier les lectures.
"Comment est-ce possible ?" demanda Harry. Il gesticula. "Il n'y a rien ici sauf de l'herbe."
"Je sais, mais..." La voix de B'Elanna se tue en même temps que l'herbe s'évaporait et était remplacée par des pavés. Elle se retourna et un mur apparu environ cent mètres à gauche d'eux, suivi par une maison et ensuite par un autre bâtiment. Le regard fixe de B'Elanna rencontra celui d'Harry dans la confusion en même temps qu'un village se matérialisait lentement autour d'eux.

***

"Bien, je suppose que nous ne sommes plus dans le quadrant delta désormais", plaisanta Harry sans conviction alors qu'ils étaient au milieu de ce qui semblait être une place publique. Des bâtiments, pas plus de deux étages de haut, bordaient la place. Les humanoïdes, avec de fortes arêtes sur le front et parés dans des vêtements brillants, regardaient fixement les deux équipiers du Voyager avec fascination.
"Salut", s'aventura B'Elanna. Elle fit un pas en direction d'un des étrangers. "Je suis le Lieutenant B'Elanna Torres du vaisseau Voyager. Voici l'Enseigne Harry Kim. Nous ne vous voulons aucun mal."
"Bienvenue." Un des étrangers, une femme, s'approcha. Elle était plus grande que la plupart des autres, avec de longs cheveux argentés et bouclés aux extrémités. Ses bras longs et minces étaient ornés des bracelets qui tintaient musicalement lorsqu'elle se déplaçait. A l'exception de ses arêtes sur le front, formant comme un V sur son nez, l'étrangère semblait presque complètement humaine. Son corps mince était enveloppé dans un vêtement bleu soyeux bordé d'or. Elle leur sourit. "Je suis Azuma. Nous sommes des Caprijens."
"Nous sommes désolés de vous déranger", dit B'Elanna. "Nous ne nous sommes pas rendu compte qu'il y avait quelque chose ou quelqu'un ici."
"C'est correct", dit Azuma. Sa voix était calme, rassurante et B'Elanna apprécia cette femme immédiatement. "Nous avons une technologie de dissimulation qui nous protège des étrangers. Nous sommes une société non violente et la dissimulation est la seule manière que nous avons pour nous protéger. Malheureusement, notre technologie nous laisse parfois tomber, nous laissant à découvert."
Les paroles d'Azuma intriguèrent B'Elanna.
"Laissez-moi récapituler", dit-elle. "Votre technologie vous permet de masquer un village entier ainsi que les signes de vie ?"
Azuma inclina la tête. "Oui, mais récemment, notre équipement a éprouvé quelques défaillances et en conséquence, la dissimulation a été beaucoup moins fiable. Nous n'avons pas été en mesure de résoudre le problème jusqu'à maintenant, mais nos ingénieurs travaillent ardemment à le corriger."
B'Elanna se tourna vers Harry, les yeux brillants. Il secoua la tête.
"Le Capitaine n'aimera pas ça, B'Elanna", dit-il sur un ton d'avertissement. B'Elanna savait qu'il disait vrai, mais l'ingénieur en elle ne pouvait pas perdre l'occasion de jeter un coup d'oeil à cette technologie. Et elle s'estima assez confiante pour convaincre Harry de voir son point de vue.
"Pourriez-vous nous accorder un moment ?" demanda B'Elanna. Azuma inclina la tête. B'Elanna pausa sa main sur l'épaule d'Harry et s'éloigna un peu d'Azuma. "Pensez-y, Harry. Associée à l'armure ablative, cette technologie de dissimulation pourrait nous rendre presque invincibles. Je suis sûr que le Capitaine n'y verrait pas d'objection."
"Je ne suis pas si sûr de cela."
"Ecoutez, je sais que des échanges de technologie ont provoqué des ennuis dans le passé, mais c'est différent. Les Caprijens ne veulent pas faire de mal. Ils ont juste besoin d'une façon de préserver leur manière de vivre. Nous pouvons les aider", dit B'Elanna.
"N'est-ce pas ce que nous nous étions dits pour les Hirogènes ?"
"Les Hirogènes voulaient nous chasser, Harry. Ce n'est pas la même chose."
Harry poussa un soupir. "Ca va, mais vous l'expliquerez au Capitaine. Après tout, vous avez un grade supérieur."
B'Elanna nota une note d'amertume dans la voix d'Harry. Elle savait que le fait que son ami n'ait pas été promu après plus de sept années de service exemplaire, bien plus qu'exemplaire, lui était resté sur le coeur, bien qu'il n'ait jamais directement rien dit à B'Elanna. Ce sont des choses que B'Elanna savait instinctivement.
"Je prendrai le blâme", assura B'Elanna. " Harry ? Votre tour viendra."
"Et en ce qui concerne le dilithium ?" demanda Harry. B'Elanna soupira. Il marquait un point. N'importe quelle réparation entreprise réduirait sévèrement le temps alloué à l'extraction du dilithium. Et le dilithium était plus important que la technologie de dissimulation, et ce, même si le Capitaine approuvait l'échange de technologie.
"Juste un oeil alors", dit B'Elanna. "Un regard rapide. Et ne vous inquiétez pas pour le dilithium." Elle fit un grand sourire à Harry, qui semblait toujours incertain. Elle lui serra l'épaule. "Ne vous inquiétez pas, Starfleet. Laissez-moi m'occuper de ça."
Harry suivit B'Elanna qui retournait vers Azuma maintenant rejointe par plusieurs autres Caprijens. Azuma présenta rapidement B'Elanna et Harry aux autres personnes, dont les yeux étaient fixés sur les officiers de Voyager avec un intérêt évident.
"Heureux de vous rencontrer", dit B'Elanna vivement. "Azuma, je voudrais vous proposer un échange. Je jetterai un coup d'oeil à votre équipement qui fonctionne mal, si vous pouvez nous aider à rechercher du dilithium. Nous avons besoin d'une provision de six mois, au moins."
Azuma réfléchit et dit ensuite, "Une minute."
B'Elanna inclina la tête tandis qu'Azuma se retournait pour rejoindre les autres. Après quelques minutes de discussion, quelque peu difficile comme pouvaient l'entendre Harry et B'Elanna d'où ils étaient, Azuma revint.
"D'accord. Nous vous aiderons pour l'extraction du dilithium en échange de votre aide pour la réparation du Gardien", dit-elle.
"Le Gardien ?" demanda B'Elanna.
"C'est..." Azuma hésita. "C'est difficile à expliquer, mais si vous nous aidez, nous vous donnerons les spécifications de notre technologie de dissimulation. Cependant, le Gardien agit en conjonction avec notre camouflage. L'un ne peut pas fonctionner sans l'autre."
"Parfait", dit B'Elanna. "Marché conclu."

***

Catherine Janeway était debout devant les fenêtres de son bureau, regardant fixement l'immense étendue de l'espace, une tasse de café à la main. Elle appuya l'autre paume de sa main contre la fenêtre, la vitre fraîche sous ses doigts. D'où elle regardait, la vue changeait rarement. Il était si facile de perdre toute notion du temps.
Janeway appréciait ce temps libre. Récemment, elle s'était surprise à désirer un certain sens de sérénité et elle savait que son équipage, récemment déçu par leur tentative ratée pour retourner à la maison, cherchait la même sorte de consolation. Elle reconnaissait les signes de son équipage qui s'éloignait d'elle, de même que son propre premier officier-
On sonna à la porte, sortant brusquement Janeway de ses pensées.
"Entrez."
Les portes s'ouvrirent en même temps que Janeway se retournait lentement et se dirigeait en direction de son visiteur.
"T'Pel", dit-elle. Elle posa sa tasse sur le bureau et fit un geste vers une chaise vide. "Merci d'être venue."
T'Pel s'assit, posant lentement ses mains sur ses genoux. Son regard fixe, intelligent et direct déconcerta légèrement Janeway. Malgré sa longue amitié avec Tuvok, Janeway n'avait vraiment jamais eu la chance de bien connaître T'Pel, et Tuvok n'avait jamais pris le temps pour partager beaucoup d'information sur sa femme autre que des renseignements sommaires.
Tout cela devra changer maintenant, pensa Janeway tout en s'installant derrière son bureau. L'atmosphère lui sembla curieusement formelle, mais Janeway pensait que T'Pel ne s'en soucierait pas particulièrement.
Et il n'y avait rien de formel à la raison pour laquelle Janeway avait convoqué T'Pel.
"J'espère que vous trouvez le Voyager confortable", dit Janeway, employant un ton décontracté. T'Pel, cependant, maintenait une posture rigide. "Vos quartiers sont-ils confortables ? "
"Je les trouve suffisants pour mes besoins", répondit T'Pel d'un ton sec et impassible, si caractéristique des Vulcains. "Je ne manque de rien."
A part vos enfants, vos amis, votre maison, pensa Janeway, mais bien sûr T'Pel, une personne très réservée, serait trop fière pour exprimer des sentiments comme ceux-ci à haute voix.
"Je sais que Tuvok est heureux que vous soyez ici", dit Janeway. Bien sûr, Tuvok ne lui avait pas dit cela avec des mots, mais Janeway avait vu son vieil ami dans le mess avec sa femme. Elle avait vu la façon dont il la regardait avec un mélange de respect et, si une émotion pouvait être applicable aux Vulcains, avec amour. "Je sais qu'il vous a manquée pendant que nous étions dans le Quadrant Delta."
"A moi aussi", répondit T'Pel. Janeway savait que c'était là la plus proche admission d'amour qu'elle n'obtiendrait jamais d'un Vulcain. Janeway souleva sa tasse de café, but et grimaça au goût amer et froid.
"Voudriez-vous quelque chose ?" demanda Janeway, se levant de sa chaise et se dirigeant vers le réplicateur. "Mon café est imbuvable."
"Non, merci. Je n'ai pas besoin de manger ou de boire en ce moment."
Tournant encore le dos à la Vulcaine, Janeway sourit. La tasse de café se matérialisa et Janeway pris une petite gorgée.
"Ah ! C'est mieux", dit Janeway. Elle sourit. "Quand nous étions dans le Quadrant Delta, nous aurions fait pour ainsi dire n'importe quoi pour une bonne tasse de café. Il semblait à l'époque qu'un café en bonne compagnie pouvait faire en sorte que la plupart de nos problèmes disparaissent."
"Et maintenant ?" questionna T'Pel. Janeway secoua la tête en s'installant dans la chaise juste à côté de T'Pel.
"Je suis inquiète du moral de l'équipage", dit-elle. "Nous étions si près de la Terre. A peine une année-lumière et maintenant..."
"Je comprends."
"Quand Neelix était à bord, il était une personne attentive pour beaucoup de membre de l'équipage. Il pouvait prendre le pouls de n'importe quelle situation et possédait le don de tout désamorcer en un tour de main pour arriver au fond du problème", dit Janeway. Elle soupira. "C'était un membre d'équipage de grande valeur. En même temps, je ne lui souhaite que du bien, mais il me manque, T'Pel."
T'Pel resta silencieuse, mais ses yeux sombres étaient alertes.
"Je ne peux pas être tout pour mon équipage", avoua Janeway. Elle jeta un coup d'oeil à son café. "Je voudrais l'être, mais il y a des jours..."
"Je comprends", dit T'Pel. Cette fois-ci, sa voix fut plus chaleureuse et cordiale. Janeway lui en était reconnaissante.
"Mon équipage a besoin de quelqu'un à qui il peut parler", continua Janeway. "Ils savent qu'ils sont libres de venir me voir à tout moment, mais beaucoup d'entre eux ne le font pas. Certains vont voir Chakotay, mais plusieurs d'entre eux avaient choisi Neelix. Maintenant qu'il est parti, il y a un vide. Je sais que c'est beaucoup vous demander, mais seriez-vous disposée à servir comme le conseiller sur le vaisseau ?"
T'Pel pencha la tête de côté tout en considérant la demande. Janeway pris une autre petite gorgée de café, sentant le liquide chaud couvrir l'intérieur de sa gorge. Ses mains tremblèrent légèrement en remettant la tasse sur le bureau. Elle se demanda quand elle était devenue aussi vulnérable.
Je ne recommencerai pas comme la dernière fois, pensa Janeway en contemplant la tasse sur le coin du bureau. Sa dernière passe de mélancolie était arrivée, il avait presque deux mois, quand ils étaient passés dans une vaste étendue d'espace complètement exempte de vie et de phénomènes scientifiques. Elle s'était coupée de l'équipage, choisissant de s'apitoyer sur son sort et regrettant même d'avoir renié Chakotay, qu'elle avait longtemps considéré comme son ami le plus proche. Janeway souleva son menton d'un air défiant et se tourna vers T'Pel en inclinant la tête légèrement.
"Je le ferai", dit T'Pel doucement. "Ce sera une affectation appropriée pour moi et je veux être utile sur le vaisseau."
"Merci", dit Janeway. "Nous..., j'apprécie."
"Chakotay au Capitaine."
Janeway détecta une certaine urgence dans la voix de Chakotay, le premier signe d'une réelle émotion qu'elle ait perçu chez son Premier Officier depuis des jours.
Oui ! Je n'ai pas passé beaucoup de temps avec lui depuis un moment, n'est-ce pas ? pensa-t-elle. Mais elle repoussa cette pensée, sachant que leur relation était déjà meilleure qu'elle avait été depuis que Voyager s'était retrouvé dans cette bulle d'espace. Plus tard, pensa Janeway, nous reprendrons là où nous étions. Elle espérait ardemment qu'ils pourraient réparer les dégâts de leur relation, tôt ou tard.
"Janeway à l'écoute. Qu'est-ce que qu'il y a ?"
"Nous avons besoin de vous sur la Passerelle."
"J'arrive."
Janeway se leva, ainsi que T'Pel.
"Merci", dit Janeway. "Je ferai savoir à Chakotay le contenu de notre conversation et il en informera l'équipage."
T'Pel inclina la tête. Janeway se dirigea vers la porte puis se mit de côté pour que T'Pel puisse sortir la première.
Après une grande respiration, Janeway entra sur la Passerelle.

***

"Qu'y a-t-il ?" demanda Janeway tout en se dirigeant vers Chakotay, debout devant l'écran principal. Une planète de Classe M couverte de nuages couvrait presque toute la surface de l'écran. Une planète, réalisa immédiatement Janeway, qui ressemblait beaucoup à la Terre. Même le nombre de continents y était. Elle ravala sa salive et se tourna vers son premier officier.
"Nous captons un appel de détresse", dit Chakotay. Il se tourna vers Tuvok. "Tuvok a localisé exactement l'emplacement."
"Avez-vous des indications sur ce que c'est ?" demanda Janeway, en fronçant les sourcils. Il n'y avait aucun signe de vaisseau ou quoi que ce soit d'autre dans cette direction.
"Je suis en train de balayer toutes les fréquences", dit Tuvok. "Je ne détecte aucun vaisseau, seulement une onde d'énergie, une émission continue..." Sa voix s'affaiblit pendant qu'il se penchait pour examiner de plus près les lectures de sa console.
"Vous êtes certain qu'il y a quelqu'un là-bas ?"
"Ce n'est pas un phénomène habituel", dit Chakotay, d'un ton plus crispé qu'à l'accoutumée. "Et c'est une vague d'énergie qui se déplace en spirale de haut en bas vers la planète. En fait, c'est cela qui émet une sorte d'appel de détresse."
"Vous pensez que c'est un vaisseau ? Appelez-le", dit Janeway brusquement. "Au moins, faisons savoir à ces gens que nous les avons entendus."
"Il n'y a aucune réponse", dit Tuvok. Janeway se rapprocha de l'écran principal, fixant des yeux la planète avec un mélange de fascination et de désir. "Je réessaye sur toutes les fréquences. Toujours aucune réponse, mais le signal de détresse émet en continu."
"Ils nous ignorent ?" demanda Janeway incrédule. "N'arrêtez pas vos essais, Tuvok." Elle regarda vers Chakotay. "N'est-ce pas la planète où les repérages avaient indiqué de grandes réserves de dilithium ?"
"C'est cela", dit Seven of Nine de sa station directement derrière le Capitaine. "Cette planète se trouve parmi celles que le Lieutenant Torres et l'Enseigne Kim projetaient de visiter."
"La vague d'énergie s'est dissipée", dit Tuvok. Il manipula quelques touches sur sa console. "Cependant, je perçois un signe de vie sur la planète. Capitaine, c'est un Sernaix."
"Misère. Levez les boucliers et passez en alerte rouge. Tuvok, détectez-vous des vaisseaux Sernaix dans les environs ?" demanda Janeway.
"Je ne détecte aucun vaisseau d'aucune sorte, Sernaix ou autre, sur les détecteurs à longue portée", dit Tuvok. Sa voix était calme et modulée, mais Janeway détectait un certain malaise dans le ton de son officier chargé de la sécurité. Elle savait exactement pourquoi il était perturbé. Les vaisseaux Sernaix étaient apparemment impénétrables à la technologie de balayage de Voyager. La dernière fois qu'ils avaient rencontré les Sernaix, l'attaque était survenue apparemment de nulle part. Et maintenant, ils avaient détecté un signe de vie Sernaix sans indication d'un autre vaisseau étranger dans tout le voisinage. Cette circonstance particulière n'est pas de bon augure. Janeway le savait et elle partageait l'inquiétude de Tuvok.
"Continuez les recherches", conseilla Chakotay inutilement. "Je doute que quelqu'un d'entre nous désire voir les Sernaix de nouveau. Essayons de les éviter si nous le pouvons."
"Capitaine." Tom Paris se retourna de son poste de commande. "Si les Sernaix sont sur cette planète, B'Elanna et Harry vont avoir besoin de nous."
"Je suis d'accord", dit Janeway. Elle s'installa dans son fauteuil. "Placez-vous autour de la planète sur une orbite synchrone, M. Paris. Lorsque nous serons à proximité, nous contacterons notre équipe d'exploration."

***

"Lorsque vous avez dit 'randonnées à pied', vous ne rigoliez pas", dit Harry. Il essayait de maintenir un certain rythme. Récemment, il avait été fortement incité à trouver du temps pour effectuer des programmes d'exercices dans l'holodeck.
De temps à autre, il avait réussi à se faire un ou deux scénarios du Capitaine Proton. Mais sans Tom Paris, qui se dévouait corps et âme à la paternité, l'holodeck manquait de son panache habituel. En conséquence, Harry avait commencé à passer son temps libre à la pratique de son saxophone ou bien à jouer à divers jeux de stratégie dans le mess avec les soeurs Delaney ou avec n'importe qui d'autre présent sur place.
Aucun passe-temps ne l'avait particulièrement préparé pour la montée raide dans les cavernes froides et humides situées tout près du village des Caprijens.
Il était au moins soulagé de voir que B'Elanna était elle aussi un peu à bout de souffle comme ils suivaient Azuma le long du sentier rocheux. Azuma, d'autre part, ne semblait pas avoir de problème du tout, sa respiration était normale et sous contrôle.
"Nous ne sommes pas loin du Gardien", leur dit Azuma. La lumière de la lanterne d'Azuma se projetait sur les murs de la caverne, créant les ombres qui faisaient penser aux monstres imaginaires qui se cachaient dans des armoires et en dessous des lits. Harry savait qu'il n'y avait rien à craindre dans ces cavernes, mais tout de même, il avait une main sur son phaseur.
Le trio tourna à un virage et soudainement le passage étroit s'élargit sur une grande chambre, illuminée par des lanternes accrochées à quelques mètres les unes des autres. Les murs avaient ici des nuances beiges au lieu des ombres grises et noires du passage.
"Regardez." Azuma indiquait la direction d'une boîte grise. C'était pour ainsi dire presque indéfinissable, mesurait environ trois mètres de large et quatre mètres de haut. "C'est le Gardien", dit Azuma fièrement. "Il fait partie de notre héritage populaire depuis presque mille ans."
"C'est une longue période de temps", dit B'Elanna. Elle sortit son tricordeur. "Pas étonnant qu'il soit dans cet état. Je perçois des pointes irrégulières dans le flux de puissance. Y a-t-il quelqu'un qui en fasse la maintenance régulière ?"
"Nos ingénieurs font des diagnostics réguliers, cependant les dernières défaillances ont été difficiles à réparer."
B'Elanna s'était accroupie en face de l'objet, examinant les lectures de son tricordeur. Elle notait des poussées d'énergies irrégulières, certaines d'entre elles assez puissantes pour brûler des fusibles et d'autres si faibles qu'elles étaient à peine détectées par son tricordeur.
"Quelque chose ?" lui demanda Harry.
"Je remarque..." Sa voix changea comme elle regardait fixement la boîte grise avec fascination. B'Elanna étendit le bras, touchant délicatement le métal lisse du bout des doigts. "Je n'ai jamais rien vu de tel auparavant. Cette technologie, c'est incroyable..." Ses yeux se fermèrent alors qu'elle s'effondrait.
"B'Elanna!" S'exclama Harry en même temps que son amie lui tombait dans les bras.

***

Elle était une petite fille.
Comme elle regardait autour d'elle, B'Elanna reconnut immédiatement la cour de récréation. Sur Kessik, à seulement deux pâtés de maison d'où elle avait vécu avec ses parents.
Le soleil était chaud contre sa peau et l'herbe douce et fraîche sous ses pieds nus. B'Elanna se retourna lentement, faisant face à la lumière du soleil. Et soudain, deux mains fortes la soulevèrent vers le ciel.
B'Elanna riait en volant dans les airs.
Ces mêmes mains fortes la rattrapèrent et quand elle se retrouva par terre, B'Elanna réalisa.
Père. Mère. Tous les deux, lui souriant.
"Encore, Papa", dit B'Elanna, tapant dans ses mains. "Fais-le encore."

***

B'Elanna rouvrit les yeux et vit Harry et Azuma qui la regardaient fixement.
"Est-ce que ça va ?" demanda Harry vivement. "Qu'est-ce qui vous est arrivé ?"
B'Elanna secoua la tête, appuyant sa main contre son front, la bouche sèche.
"De l'eau", demanda-t-elle.
"Une minute", dit Harry. Il fouilla dans son sac pour trouver les rations. Il versa de l'eau dans un verre et le porta aux lèvres de B'Elanna. "Lentement, maintenant."
B'Elanna but l'eau, savourant la fraîcheur dans sa gorge. Elle ferma les yeux, léchant ses lèvres.
"Vous en voulez encore ?" demanda Harry.
"Non, non, ça va maintenant", dit B'Elanna. Elle jeta un coup d'oeil à Azuma. "Mais qu'est-ce qui est arrivé ?"
"Vous avez eu une vision", dit Azuma.
"Oui !" dit B'Elanna. Elle se releva et s'éloigna de la boîte. "Je suppose que vous pouvez appeler cela comme ça."
"Etait-ce une... expérience plaisante ?"
B'Elanna réfléchit. Elle avait été complètement heureuse dans sa 'vision', comme Azuma l'avait appelée. Libre, insouciante, merveilleuse, aimée.
"Oui", dit B'Elanna. Elle sourit. "J'étais dans la cour de récréation, près de ma maison sur Kessik. Mes parents, tous les deux, étaient là et cela... C'était un bon jour. J'avais de nouveau quatre ans et mon père me lançait dans les airs."
Harry croisa les bras contre sa poitrine.
"Alors ?" demanda-t-il. "Qu'est-ce que cela signifie ?"
"La seule manière dont je peux expliquer cela est de la manière suivante", dit Azuma. "D'une façon ou d'une autre, le Gardien réussit à extirper la mémoire des gens et à la rendre de façon éclatante. Ainsi, nous avons la capacité de revivre les moments les plus heureux de nos vies. Cependant, il n'a jamais affecté d'étranger auparavant."
"Quel effet", dit B'Elanna. "C'était une expérience assez remarquable."
"Ecoutez, je n'aime pas cela", dit Harry nerveusement. "Allons vérifier ce qui ne va pas avec cette chose et nous continuerons notre mission."
"D'accord", Dit B'Elanna, mais elle continua de regarder la boîte. Elle voulut la toucher de nouveau, mais savait qu'Harry n'aimerait pas cela. Mais quand même...

***

"Nous entrons maintenant en orbite, Capitaine", annonça Tom.
"Rien sur les détecteurs ?" Janeway s'était levée de son fauteuil et se posta directement derrière son officier aux commandes, sa main se posant doucement sur son épaule.
"Rien", Répondit Tuvok. "Cependant, j'ai défini exactement l'emplacement des Sernaix. Il ne semble y avoir qu'un seul individu, et ses signes vitaux sont faibles. Il est approximativement à un kilomètre du Delta Flyer."
"Voyager à B'Elanna, répondez", dit Janeway crispée, faisant de son mieux pour contenir les inquiétudes de sa voix. La Passerelle resta silencieuse en attente d'une réponse. Janeway nota que son officier aux commandes semblait particulièrement intéressé, vu comme il s'était détourné de l'écran principal et avait concentré tout son attention sur elle.
"Janeway à Harry, répondez."
"Ici Harry." La voix d'Harry n'était pas claire sur la ligne de communication. "Désolé, Capitaine. Il semble qu'il y ait un peu d'interférences dans la communication."
Tom libéra un soupir de soulagement et retourna à sa console, ses épaules se détendant visiblement. Janeway étouffa un rire. Il y a sept ans, elle n'aurait jamais prévu que Tom Paris eut embrassé une vie de famille tranquille et stable. La dévotion de Paris pour sa femme et sa fille, la manière dont il les regardait et la joie qui se lisait sur son visage quand il tenait Miral dans ses bras impressionnaient Janeway.
Par mégarde, elle jeta un coup d'oeil à Chakotay, puis récupéra rapidement son contrôle.
"Harry, il y a un Sernaix non loin de votre emplacement."
Une autre pause suivit, puis Harry, la voix toujours légèrement floue, répondit. "Merci pour l'avertissement, Capitaine. Nous serons sur nos gardes."
"Aussitôt l'extraction du dilithium terminée, revenez à bord du Voyager", dit Janeway. Sa voix, stable et calme, camouflait sa nervosité.
"Compris. Kim terminé."
Janeway jeta un coup d'oeil par-dessus son épaule à Chakotay qui s'était déplacé juste derrière elle.
"Pensez-vous que c'est une coïncidence ?" demanda t-elle doucement. "Que pensez-vous que les Sernaix ont derrière la tête ?"
"Votre conjecture est aussi bonne que la mienne", répondit Chakotay. Il jeta un coup d'oeil vers l'écran principal. "Les Sernaix sont imprévisibles."
"L'Imprévisibilité fait partie de leur charme", dit Tom. Il fit un petit sourire au Capitaine, une petite réflexion du tombeur de ces dames, l'homme qu'il était auparavant. "Les rend irrésistibles."
"Ca doit être ça", dit Janeway avec ironie, se permettant de sourire elle aussi à son officier de navigation. "Tuvok, téléportez le Sernaix directement à l'infirmerie et notifiez le Docteur. Assignez un garde de sécurité."
"Oui, Capitaine."
"Catherine..." La voix de Chakotay était délibérément basse tandis qu'il se penchait contre le capitaine. Elle retint sa main, prévoyant déjà son objection.
"Je ne refuserai d'aide médicale à personne dans le besoin", Dit-elle d'une voix aussi calme.
"Cela pourrait être un piège."
"Objection notée", dit Janeway. Elle jeta un coup d'oeil à Tuvok, qui était debout près de l'ascenseur. "Erigez un champ de force autour de l'infirmerie. Je ne veux prendre aucun risque", dit-elle, élevant la voix pour que tous puissent entendre. Elle se dirigea vers la porte et se tourna ensuite pour faire face au personnel de la Passerelle. "Chakotay, Tuvok, vous venez avec moi. Tom, vous avez la Passerelle."

***

B'Elanna appréciait la tranquillité. Elle ne l'avait compris qu'une fois seule dans la caverne. La porte de la boîte ouverte révélait des circuits complexes. Harry et Azuma lui avaient laissée la tâche délicate de diagnostiquer les problèmes du Gardien, tandis qu'ils étaient allés commencer l'opération de récupération de dilithium.
Le ton du Capitaine dans leur communication récente laissait entendre qu'il n'y avait pas de temps à perdre. Un Sernaix était là tout près et B'Elanna n'avait aucun désir de voir à nouveau les créatures cornues à la peau bleutée.
Harry était un peu parti à contrecoeur, mais B'Elanna l'avait rassuré et lui avait dit que tout irait bien.
"Allez. Vous avez entendu le Capitaine", avait-elle dit. "Je peux m'occuper de cela, ne vous inquiétez pas."
Et maintenant qu'ils étaient partis, B'Elanna était en mesure d'examiner plus en profondeur en quoi consistait cette technologie du Gardien. Elle avait très rarement eu l'occasion de partir en exploration. La plupart du temps, elle réglait des problèmes, inventant des solutions rapides. Ses chances pour faire de la recherche en profondeur étaient un peu derrière elle. Même quand B'Elanna avait des moments libres, elle les passait en aidant les autres ingénieurs dans le cadre de leur travail régulier.
Elle retira un coupleur de liaison de phase de son kit et regarda du coin de l'oeil les circuits clignotants. Quelques-uns semblaient avoir fusionnés ensemble, créant des dérivations dans les circuits d'acheminement. Le dernier qui avait réparé le Gardien avait essayé de dévier quelque chose du flux de puissance, mais B'Elanna pouvait voir qu'une surcharge était imminente.
Elle avait cherché dans les objets de sa trousse à outils avant d'arranger un condensateur de flux inversé. B'Elanna avait adroitement enlevé plusieurs circuits brûlés et remplacé le câblage.
"Voyons si cela fait une différence", dit-elle. Sa voix sonna anormalement creux et fort dans la caverne et B'Elanna frissonna. Peut-être n'aurait-elle pas dû persuader Harry de partir...
Elle respira à fond et repris le travail.
Le temps sembla fuir rapidement tandis que B'Elanna s'occupait à fusionner ensemble et couper des fils dans l'équipement défectueux. Sa vision se brouilla et elle clignota plusieurs fois des yeux, essayant de se concentrer.
"Allez avance, B'Elanna", murmura-t-elle. "Concentre-toi."
Le coupleur de liaison de phase glissa de sa main et B'Elanna se fâcha contre elle-même. Elle se pencha pour le récupérer, mais sa botte glissa. Comme elle essayait de reprendre son équilibre, elle prit conscience que quelqu'un d'autre était dans la pièce avec elle. Elle se retourna et sursauta.
"Papa ?"

***

"Au rapport !" Ordonna Janeway comme elle entrait dans l'infirmerie, Chakotay et Tuvok la suivant de près.
Le Docteur examinait son patient.
"Ce Sernaix a plusieurs blessures internes. J'ai arrêté les saignements et réparé certains tissus endommagés", dit le Docteur aux trois officiers. "Cependant, il a subi un choc et ne peut pas être déplacé pour le moment."
Janeway tourna autour du lit médical, fixant constamment des yeux l'étranger inconscient. Elle n'avait jamais vu un Sernaix d'aussi près auparavant et maintenant, alors qu'elle regardait son corps allongé et filiforme, la peau teintée bleue, les cornes, l'étranger lui semblait beaucoup moins intimidant.
"Vivra-t-il ?" demanda Chakotay.
Le Docteur inclina la tête. "Oui".
"Heureux de l'entendre. J'aurais eu horreur d'expliquer aux Sernaix comment un des leurs serait mort à bord de mon vaisseau", dit Janeway.
"La physiologie est intéressante", dit le Docteur, apparemment inconscient du dernier commentaire de Janeway. "J'ai noté plusieurs particularités uniques que je n'avais jamais vues auparavant, incluant quelques organes rudimentaires. Je suis, cependant, incapable de discerner la fonction exécutée par ces viscères complémentaires."
"Je suis sûr que vous découvrirez leurs buts assez vite", répondit le Capitaine, son regard toujours fixé sur l'étranger.
"En effet, j'espère", dit le Docteur. Il souleva une petite boîte grise avec une collection de diapositives à l'intérieur. Il en retira une de la boîte et la remit au Capitaine.
"Que dois-je voir ?" demanda-t-elle curieusement, en tenant la diapositive devant la lumière. Elle pouvait discerner un groupe de cellules pourpres. Elle retira une autre diapositive de la boîte grise. Celle-ci montrait un autre échantillon, cette fois teinté de bleu.
"J'ai pris la liberté de prendre quelques échantillons de sang et de peau", dit le Docteur d'une voix basse. "Pour des recherches, bien sûr."
"Bien sûr", dit le Capitaine, incapable de retenir le cynisme de sa voix. Elle rendit les diapositives au Docteur et reporta son attention sur l'étranger. Janeway nota que malgré son aspect fragile, l'étranger était tout en muscles et en os. Il était fort, sans doute, et cette observation lui fit ressentir un frisson jusque dans le bas du dos.
Leur supériorité physique et technologique posait une menace sérieuse sur le Voyager, et Janeway savait que c'était peut-être une occasion de prévenir de nouvelles attaques. Son regard quitta l'étranger et se tourna vers Chakotay et Tuvok.
"Chakotay, entrez en contact avec les Sernaix. Essayons de provoquer une réunion. Faites-leur savoir que nous avons l'un des leurs et que nous voudrions leur parler", dit-elle vivement.
"Capitaine", Dit Chakotay. "Je ne suis pas sûr d'aimer cette idée. Nous ne savons rien des Sernaix." Il regardait Tuvok pour obtenir son appui, mais le Vulcain restait de glace. Il est normal de prendre parti de temps à autre, Tuvok, pensa Chakotay, sentant la fureur monter en lui. Même si le fait d'exprimer votre opinion va à l'encontre de celle du Capitaine.
"C'est notre chance d'en apprendre plus", dit Janeway calmement. "Je ne peux pas laisser passer cette chance unique d'une rencontre face à face avec les Sernaix ici à bord du Voyager."
Chakotay continuait d'argumenter. "En ce qui concerne les questions de sécurité ?" Il avait lancé ce commentaire, sachant que Tuvok devait répondre maintenant.
Tuvok, toujours de glace, répondit. "J'assignerai des équipes de sécurité supplémentaires."
"Les Sernaix ont tiré sans raison sur nous auparavant, si je peux ajouter. Nous ne devons pas les inviter à bord sans y réfléchir soigneusement", continua Chakotay.
Janeway tourna autour du Docteur et se mit directement devant son premier officier.
"Chakotay, j'y ai pensé et j'ai pris ma décision", Dit-elle doucement. "Vous avez vos ordres."
Chakotay la regarda fixement, le regard sévère.
"Je comprends, Capitaine", il lui dit. "J'entrerai en contact avec les Sernaix."
Chakotay se retourna et sortit de l'infirmerie. Janeway soupira et regarda à nouveau l'étranger. Il semblait paisible, presque tranquille et elle se demanda si peut-être toute l'animosité entre le Voyager et les Sernaix n'était pas juste un grand malentendu.
Elle l'espérait sincèrement.
Elle était consciente du Docteur et de Tuvok qui la regardaient fixement. Janeway s'éclaircit la gorge.
"Je serai sur la Passerelle", dit-elle. "Appelez-moi s'il y a le moindre changement dans la condition du Sernaix."
"Oui, Capitaine", répondit le Docteur en inclinant la tête.
Tuvok et Janeway sortirent de l'infirmerie et se dirigèrent vers l'ascenseur. Le silence de l'officier chargé de la sécurité déconcertait Janeway. Elle pouvait toujours compter sur Tuvok pour lui donner son avis honnête et le fait qu'il n'en ait offert aucun pendant la brève discussion avec Chakotay suscitait sa curiosité.
"Tuvok", commença Janeway. Elle s'arrêta et appuya une épaule contre le mur.
"Ais-je fait une erreur ? Non, ne répondez pas. Je suppose que ce ne serait pas la première fois et que ça ne sera certainement pas la dernière." Elle soupira. L'attitude négative de Chakotay envers sa suggestion l'avait grandement dérangée. Elle regarda Tuvok qui fixait attentivement les yeux sur elle et sut qu'il avait deviné ses pensées. "A quoi pensez-vous ?"
"Il est votre premier officier", dit Tuvok fermement. "Son avis doit importer."
"Je ne demandais rien à Chakotay", dit Janeway fermement. Elle soupira et croisa les bras contre sa poitrine. "Je veux juste savoir ce que vous pensez."
"Je ne suis pas sûr de connaître la meilleure option pour le Voyager. Nous sommes dans un secteur de l'espace inexploré, ce qui change la donne. De nouveau, nous sommes dans une situation où nous devons profiter de chaque occasion au moment où elle surgit. Les Sernaix nous ont montrés de l'hostilité par le passé. Cependant, une réunion pourrait être avantageuse pour abaisser les relations tendues entre nous."
"Donc vous êtes d'accord ?"
"J'ai dit que je n'étais pas sûr."
Janeway soupira et continua à marcher. Tout cela sans une réponse claire en fait, mi-figue mi-raisin. Mais alors, elle réfléchit. Elle ne cherchait pas nécessairement une autre voie, seulement une validation de la décision qu'elle avait prise d'inviter les Sernaix à bord du Voyager. Dans ce cas, pensa-t-elle, j'ai obtenu exactement ce que je cherchais, une non-réponse diplomatique de Tuvok et un non de la part de Chakotay. Où cela te mène-t-il, Catherine ? Elle connaissait la réponse à cette question, réponse qui l'avait motivée pendant les sept dernières années.
"Je fais du mieux que je peux, Tuvok", dit-elle, ne faisant pas de pause pour ne pas laisser son ami la rattraper. "J'ai promis à cet équipage que je les ramènerai à la maison. Et je vais le faire, peu importent les moyens."

***

"B'Elanna ?" Harry s'approchait prudemment tout en tenant bien haut une lanterne pour illuminer son chemin. La lumière projetait des ombres le long des murs escarpés de la caverne. Ses bottes réglementaires de Starfleet faisaient craquer le gravier sous ses pieds et de temps en temps, il pouvait entendre des filets d'eau et les petits animaux invisibles qui se faufilaient rapidement. L'humidité et l'air froid procuraient à Harry des frissons dans le bas du dos et il n'en pouvait tout simplement plus d'être dans cette caverne. "B'Elanna, êtes-vous là ? Nous sommes de retour."
Harry jeta un coup d'oeil à Azuma qui suivait tout près derrière. Deux d'entre eux, ainsi que plusieurs autres Caprijens, avaient passé les trois dernières heures à extraire le dilithium. Les Caprijens avait développé des techniques d'extraction qui rendait l'ennuyeux processus habituel plus efficace. En somme, le groupe avait réussi à rassembler assez de dilithium pour permettre au Voyager de fonctionner au moins neuf mois.
Si nous sommes toujours pris dans cette zone obscure pour neuf mois encore, frissonna Harry à cette simple idée.
"B'Elanna !" Appela Harry de nouveau. Ils tournèrent à un virage et entrèrent dans la grande caverne où le Gardien était logé. Azuma s'arrêta brusquement et Harry faillit la heurter. "Désolé. B'Elanna !"
Cette dernière était couchée sur le sol, le contenu de sa trousse d'outils dispersé à ses pieds, le panneau de face du Gardien toujours ouvert. Harry regarda Azuma.
"Qu'est-ce qui lui arrive ?" demanda-t-il, le ton de sa voix montant d'un cran. Il se mit à genoux à côté de son amie. B'Elanna semblait paisible, presque comme si elle dormait. Son front était couvert de transpiration, mais sa respiration était normale.
"C'est ce qui est arrivé aux autres..."
"Quoi ?" cria Harry. "C'est arrivé auparavant ?" Il prit son tricordeur et sonda B'Elanna. "Ses signes de vie sont stables, mais elle est dans le coma."
"Oui", Azuma inclina la tête. Elle soupira. "C'est un des problèmes avec le Gardien. Il a parfois affecté ses utilisateurs, les plongeant si profondément dans leurs mémoires qu'ils en restent là."
"Dites-vous que B'Elanna est prise au piège à l'intérieur de sa propre mémoire ?" demanda Harry d'un air incrédule. Il secoua la tête. "C'est incroyable. Pourquoi ne nous avez-vous pas dit ce qui pouvait arriver ?"
"Comme je vous ai dit auparavant, cela n'a jamais affecté d'étrangers auparavant", dit Azuma.
"Vous auriez quand même dû nous le dire !" S'exclama Harry. Toute sa bienveillance envers les Caprijens s'était évaporée d'un seul coup tandis qu'il regardait B'Elanna. Comment expliquerait-il cela à Tom ? "D'autant plus qu'elle avait précédemment eu, vous aviez appelé cela, une vision ?"
"Je suis désolé", dit Azuma, d'un ton conciliant. Harry la regardait et voyait bien qu'elle était vraiment désolée. Elle se tordait nerveusement les mains devant elle. "Si j'avais su que cela arriverait, je ne vous aurais jamais conduit ici..."
"Comment allons-nous la ranimer ?" demanda Harry. Il plaça ses doigts sur le côté du cou de B'Elanna et après quelques secondes, les retira vivement, satisfait de la force et du rythme de son pouls.
"Je... Je ne sais pas."
Harry la regardait fixement. "Vous ne savez pas ?"
Azuma haussa les épaules. "D'habitude ils se réveillent quand leur mémoire est épuisée."
Harry regardait de nouveau la figure de B'Elanna. Qui savait quand ses mémoires s'épuiseraient ? Si elle avait commencé dès la petite enfance ou même à l'âge de quatre ans comme elle l'avait dit auparavant, cela pourrait prendre des années avant qu'elle ne se réveille à nouveau. Spécialement si sa mémoire défilait en temps réel.
"Vous auriez dû nous le dire", répéta Harry. "Je n'aurais jamais été d'accord pour cet échange si j'avais su ce qui se passait ici, et B'Elanna ne l'aurait pas été non plus."
Les lèvres d'Azuma se serrèrent et Harry soupira.
"Je suis désolé. Je n'aurais pas dû vous rabrouer comme cela", dit-il. Il ferma son tricordeur et le rattacha à son uniforme. "Je vais à la surface. Restez avec B'Elanna."
"Où allez-vous ?" demanda Azuma frénétiquement.
"Je retourne au Delta Flyer pour contacter le Voyager."

***

Les boîtes étaient contre le mur, proprement empaquetées et prêtes à être chargées pour le transport. Deux sacs de couchage étaient roulés fermement et étaient sur le dessus de la glacière. B'Elanna voyait le tout, désintéressée. Le randonnée annuelle de camping de la famille Torres, sauf que sa mère ne les rejoindrait pas cette année. Au lieu de cela, le frère de son père et ses enfants, ses cousins qu'elle connaissait à peine, viendraient.
Dans le fond, B'Elanna était heureuse d'y aller. Elle avait ressenti une forte envie de sortir de la maison depuis que le combat avait recommencé pour de bon. Il lui semblait que ces jours-ci, tout était prétexte à affrontement entre ses parents. Des choses aussi banales que ce que B'Elanna devait porter à l'école ou ce qu'ils allaient avoir pour le dîner étaient amplifiées jusqu'à ce que leurs disputes se changent en colère, se répercutant dans toute la maison.
B'Elanna avait essayé de s'échapper de ces cris. Elle s'était enfermée dans la salle de bain le plus loin possible de la scène de la plupart des querelles de ses parents, la cuisine. Mais toujours, leurs voix fortes arrivaient à passer à travers les murs et B'Elanna, accroupie dans la baignoire, se mordait le bas de la lèvre, se demandant quand le combat cesserait.
Quoi que ce matin-là, sur le départ, sa mère et son père semblaient être de bonne humeur.
"Je pense que c'est la dernière, B'Elanna", dit son père, regardant la pile de boîtes. Il plaça sa grande main sur la petite épaule de B'Elanna. "Je ne pense pas que nous ayons oublié quelque chose."
"Tu as oublié cela", dit sa mère, arrivant derrière eux. Elle tenait un pull-over rouge. "Il peut faire froid dans les montagnes, B'Elanna. Prends cela avec toi."
B'Elanna prit à contrecoeur le pull-over. C'était presque l'été et elle ne voulait pas de vêtements lourds, mais elle savait aussi que sa mère avait raison.
Les Klingons étaient un peu sensibles au froid et malgré le fait qu'elle soit à moitié humaine, le côté Klingon de B'Elanna était toujours un peu plus présent dans ces cas-là.
"Nous devrions être de retour samedi prochain", dit son père. Le ton de sa voix était convivial, presque chaleureux. La courtoisie de ses mots ne faisait pas oublier à B'Elanna que ses parents s'étaient encore disputés la nuit passée.
Sa mère lui sourit. "Amuse-toi bien, B'Elanna", dit-elle. Ses longs doigts, la particularité la plus coquette de sa mère, caressèrent doucement la joue de B'Elanna.
"Tu ne veux pas venir ?" demanda B'Elanna. "Pourquoi ? Tu viens toujours."
"Non pas cette fois", répondit sa mère, échangeant un regard énigmatique avec son père. "L'été prochain."
"Nous devons y aller", dit son père, sa voix sonnant anormalement claire.
"Ce ne sera pas pareil sans toi", insista B'Elanna.
"Non pas cette fois, B'Elanna."
"Eh Bien, nous allons être en retard pour le transport", dit son père.
B'Elanna regarda les accessoires de camping, puis à contrecoeur prit son sac de couchage. Son père prit la glacière et l'autre sac de couchage, tandis que sa mère soulevait la boîte contenant les accessoires de cuisine. Les trois marchèrent ensemble jusqu'au transport qui attendait.
Après qu'ils eurent terminé de charger le tout dans le transport, B'Elanna se tourna vers sa mère.
"Tu vas me manquer", dit B'Elanna. L'enrouement dans sa gorge la surprit et apparemment, surprit aussi Miral Torres.
"C'est seulement pour une semaine", dit sa mère doucement. Elle donna un petit baiser sur le sommet de la tête de B'Elanna. "Lorsque tu seras là-bas, tu ne penseras même pas à moi, même pas un instant. Tu auras tellement de plaisir avec tes cousins. Pense à eux, pas à moi."
"Allons", dit son père. B'Elanna étreignit sa mère avec force et grimpa ensuite dans le transport. Elle s'assit complètement au fond du siège, ses longues jambes touchant à peine le plancher.
Comme ils quittaient la maison, B'Elanna fit des signes de la main à Miral Torres, qui était en avant sur la pelouse, les bras croisés contre sa poitrine. C'était, pensa B'Elanna, la première fois qu'elle voyait sa mère dans une position fière et orgueilleuse.

***

Quand Janeway arriva sur la Passerelle, elle vit que Chakotay, à contrecoeur, avait fait ce qu'elle avait demandé. Le visage bleu et étroit du Sernaix remplissait l'écran principal, menaçant. Janeway frissonna involontairement lorsqu'elle nota les intrigants tatouages qui couvraient le visage, le torse et le haut des bras du Sernaix. Elle respira à fond tout en se rappelant la dernière rencontre du Voyager avec les Sernaix. Elle espérait que ça irait mieux cette fois-ci et sinon... et bien, elle préférait espérer pour le mieux, tout en étant prête au pire.
Chakotay se retourna tandis que Janeway se rapprochait.
"Je vous présente Adimh Liven de Crimson Stone", dit Chakotay d'une voix basse. "Les belligérants nous affichent leur caractère dès le début."
Janeway inclina la tête pour ensuite faire face à l'étranger.
"Je suis le Capitaine Janeway", dit-elle. "Nous avons un de vos hommes à bord. Il est grièvement blessé."
"Il doit nous être rendu", Aboya Adimh Liven. "Préparez-le pour son retour immédiatement."
"Notre docteur dit que ses blessures font qu'il lui est impossible de se déplacer sans risque pour sa santé", dit Janeway. "Nous nous occuperons de lui et nous vous le rendrons en santé et en un seul morceau. Vous avez ma parole."
"Pourquoi devons-nous avoir confiance en vous ?" Les yeux de Liven se rétrécirent. A l'arrière-plan, Janeway pouvait discerner que d'autres Sernaix étaient réunis, peut-être pour démontrer leur appui envers leur commandant. Elle pouvait percevoir la méfiance sur leurs visages. Janeway souleva son menton, refusant d'être effrayée par le Sernaix.
"Nous n'avons rien à gagner à garder votre équipier en otage", dit Janeway. Elle jeta un coup d'oeil à Chakotay, mais son expression ne révélait ni assentiment ni désaccord avec ce qu'elle venait de dire. Elle se demanda si Chakotay voulait retenir en otage le Sernaix pour conserver un pouvoir de négociation.
Ne leur donnons pas une raison d'attaquer, Chakotay, pensa Janeway. Je dois les rassurer sur nos intentions, c'est là notre seule porte de sortie.
"Capitaine", dit Tuvok. "Ils chargent leurs armes."
Misère, pensa Janeway. "Trop de bonnes intentions."
"Passez en alerte rouge", conseilla Chakotay.
"Mettez-nous hors de portée, M. Paris", ordonna Janeway. Elle tourna alors son attention à Adimh Liven. "Rabaisser vos armes, Adimh. Je vous assure, nous ne lui ferons aucun mal. A-t-il un nom ?"
Liven hésita avant de répondre, "Il se nomme Lous."
"Nous ne blesserons pas Lous", dit Janeway. "Mais je crains que le transport lui cause plus de mal. Croyez-moi, je ne veux pas le blesser plus qu'il ne l'est présentement, c'est la dernière chose que je veux. Cependant, si vous voulez..." elle jeta un coup d'oeil à Chakotay, qui ne semblait pas à l'aise, car il prévoyait son action suivante. "Vous êtes le bienvenu, vous pouvez monter à bord du Voyager et examiner Lous par vous-même. Vous verrez qu'il est bien traité."
Le commandant Sernaix resta silencieux pendant un long moment et Janeway s'efforça de rester calme. Elle pouvait sentir la tension au sein des membres de la Passerelle, de la mâchoire serrée de Paris à la posture guindée de Tuvok.
Sois calme, Catherine, pensa Janeway. Elle regarda Chakotay et sa physionomie la persuada d'essayer à nouveau.
"Considérer ceci, c'est une occasion pour vous de mieux nous connaître", poursuivit Janeway. "Je crois que nous pouvons nous aider."
Liven inclina finalement la tête. "D'accord".
"Ils baissent leurs armes", Annonça Tuvok. Paris confirma à la suite d'une vérification rapide. Janeway exaltait, sentant toute la tension de ses muscles se dissiper.
"Annulez l'alerte rouge", dit Chakotay en allant se rasseoir dans son fauteuil.
"Vous pouvez vous téléporter directement dans notre salle de téléportation", dit Janeway à Adimh. "Janeway terminé."
L'écran principal vira au noir et Janeway se retrouva face à son Premier Officier.
"Venez avec moi, Commandeur", dit-elle. Sans le regarder, elle savait que Tuvok était déjà parti dans la salle de téléportation et efficacement, avait probablement pris des dispositions pour que les détails de sécurité soient réglés pour l'arrivée des Sernaix.
Chakotay inclina la tête.
"Vous avez la Passerelle", dit Janeway à Tom Paris pour la seconde fois de la journée. Paris inclina la tête et laissa sa place à un autre officier venu pour prendre les gouvernes. Janeway passa devant et entra dans l'ascenseur, Chakotay la suivit immédiatement après.
Comme les portes se refermaient sur eux, Janeway se tourna vers Chakotay.
"Ai-je votre appui ?" demanda t-elle doucement.
Chakotay haussa les épaules. "Vous ne me l'avez jamais demandé auparavant. Pourquoi me poser cette question maintenant ?"
Janeway se mordit la lèvre. Il y avait bien des façons de répondre à cette question, mais la trêve, qui s'était récemment développée entre eux, était toujours trop fragile pour lui permettre de répondre d'une manière qui n'aurait pas été significative à tous deux. Janeway regarda résolument droit devant elle.

***

C'était leur terrain de camping habituel, ils y retournaient année après année. B'Elanna s'était précipitée hors du transport, foulant légèrement le sol sous ses pieds. Déjà, elle avait vu un endroit parfait pour ériger une tente, dans le coin le plus reculé de leur place assignée, en dessous d'un trio de grands arbres toujours verts.
Derrière elle, son père déchargeait le transport, avec l'aide de son oncle. Les cousins étaient ici aussi, mais B'Elanna voulait explorer les environs. Elle passait entre les arbres, s'émerveillant de la douceur des feuilles vertes et fraîches ainsi que de l'humidité de la terre. Elle suivit un chemin serpentant vers le bas au bord de la rivière. L'eau virevoltait de blanc contre les rochers et de temps en temps, des agglomérations de feuilles, de bois et de boue flottaient en aval.
B'Elanna enleva ses chaussures et s'avança dans l'eau froide, hurlant presque lorsque l'eau tourbillonna autour de ses frêles chevilles. Elle avait oublié comme l'eau de la montagne pouvait être froide, particulièrement tôt en été.
"B'Elanna !"
Elle se retourna et vit son père. Il lui fit signe de la main comme il descendait au bord de la rivière.
"Tu t'amuses ?" demanda-t-il.
"Beaucoup", répondit B'Elanna. Elle marchait sur des pierres d'eau douce. C'était bien, mais elle savait qu'elle devait être prudente. L'année dernière, elle avait glissé et était tombée, se coupant le front sur une pierre. Sa mère avait été furieuse contre elle. "Penses-tu qu'on pourrait aller faire du rafting ?"
"Je pense que l'on peut arranger ça", dit John Torres. "Maintenant, il faut revenir au campement. Nous nous préparons pour le déjeuner."
"Bien", dit B'Elanna. Elle prit ses chaussures et glissa sa petite main dans celle de son père. Comme ils marchaient, le ciel bleu du début d'après-midi s'obscurcit comme la nuit et soudainement, B'Elanna était debout à l'extérieur de sa tente, sans vraiment être certaine de savoir comment elle en était arrivée là.
"Papa ?" s'aventura-elle.
"B'Elanna, te voilà", dit son père dans la pénombre. Elle voulut lui demander s'il y avait quelques secondes seulement qu'ils avaient marché ensemble à partir de la rivière, mais elle estima que c'était un peu idiot. Peut-être s'était-elle endormie, cela semblait être la seule explication. "Je t'ai cherché partout."
"J'étais à la rivière", dit B'Elanna. Son père fronça les sourcils.
"Il y a des heures de cela", dit-il.
B'Elanna s'interrogeait. Il n'y avait pas des heures de cela, voulait-elle dire, seulement quelques minutes, mais elle demeura silencieuse. Déjà ses membres semblaient lourds, comme si elle avait marché pendant des jours. Et sa tête...
"Papa", chuchota t-elle. Elle lui offrit une main, essayant de se stabiliser contre le tronc d'un arbre, mais déjà la terre glissait. Elle chercha entre la cime des imposants arbres toujours verts. Elle pouvait voir le ciel noir tacheté de minuscules étoiles blanches, rayonnantes de très loin. Elles se déplaçaient, tournaient, circulaient, et comme elle s'était endormie, B'Elanna avait seulement été vaguement consciente que son père l'appelait à son secours.

***

B'Elanna s'assit. Elle était couchée dans un lit, un drap blanc la couvrant à la taille. Elle se sentait fiévreuse, moite et endolorie, comme si elle avait été malade. Ses muscles lui faisaient mal et comme elle observait la pièce, elle remarqua qu'Azuma était assise dans une chaise droite au pied du lit.
"B'Elanna ?" demanda Azuma prudemment. "Comment vous sentez-vous ?" B'Elanna inhala profondément. L'irritation dans sa gorge était de retour. "De l'eau", demanda B'Elanna.
Azuma inclina la tête et disparut dans la pièce attenante. Elle revint quelques moments plus tard avec un verre et B'Elanna but profondément. Elle toussa quelques fois et ensuite regarda autour d'elle. La pièce dans laquelle elle se trouvait était meublée simplement. Deux fenêtres sur un mur et une porte simple sur la paroi la plus éloignée. Le mobilier consistait en une table en bois, des chaises, une étagère et le lit dans lequel elle était couchée. Il n'y avait aucune décoration.
"Où suis-je ?" demanda B'Elanna d'une voix rauque.
"C'est ma maison", dit Azuma. Elle était toujours accroupie au côté du lit de B'Elanna. "Comment vous sentez-vous ? Harry est parti pour entrer en contact avec le Voyager."
"Je me sens..." B'Elanna s'arrêta. Les sensations qui passaient en elle n'étaient pas tellement différentes de celles qu'elle avait ressenties sur la Barge des Morts. "Est-ce que c'était réel ?" "Quoi ?"
"J'étais en camping avec mon père. Je pouvais sentir l'eau autour de mes chevilles, sentir le sol humide entre mes orteils. C'était différent de la dernière fois. La première fois, je savais que c'était un souvenir parce que la scène m'apparaissait floue, mais cette fois-ci, tout était plus clair, tellement plus précis. Est-ce que c'était réel ?" Azuma inclina la tête. "Oui, ça l'était."
"J'avais douze ans", dit B'Elanna tranquillement. "Je ne sais pas si j'ai déjà eu des souvenirs si réalistes auparavant. C'était... déconcertant. C'était comme si je m'observais, mais en même temps, j'étais moi-même dans ce temps-là."
"Le Gardien produit cet effet. Comme je l'ai expliqué à Harry plus tôt, il a la capacité de transcrire les souvenirs dans la réalité. Il nous donne la chance non seulement de revivre certains moments, mais aussi de les changer si on le désire."
"Les changer ?" demanda B'Elanna. Elle tira ses genoux contre son corps et enveloppa ses bras autour de ses jambes. "Une deuxième chance ?"
"Oui", Dit Azuma. "Le Gardien est un merveilleux cadeau dans ce sens. Il nous permet d'effacer nos regrets, nous donnant la capacité de changer ces événements qui ont causé le mal ou la tristesse de n'importe quelle façon. Bien sûr, nous ne pouvons pas modifier les décisions concernant la ligne de temps, autrement nous courons le risque de tout changer." B'Elanna inclina la tête.
"Je le comprends. La mécanique temporelle a toujours été une chose difficile à manipuler."
"Selon l'événement en question, nous nous assemblons d'habitude au village pour discuter de ce qui doit être fait. C'est seulement une fois toutes les questions pesées et résolues au mieux de nos capacités que l'on considère l'approche du Gardien."
"Cela semble judicieux."
"Voudriez-vous encore un peu d'eau ?" demanda Azuma, regardant le verre maintenant vide de B'Elanna.
"Ce serait merveilleux, merci." Comme Azuma disparaissait, B'Elanna posa son menton sur ses genoux. Elle pensait à son père et comment cette excursion de camping en particulier avait été leur dernière ensemble. Elle se rappelait les mots haïssables qu'elle lui avait dits, ces mots restés gravés de manière permanente dans sa mémoire.
' Si seulement je pouvais les changer... ' Sa vision devint brouillée lorsqu'elle pensa à toutes les choses qu'elle souhaitait refaire. Elle se permit un vrai sourire.
Je suppose que c'est ce qui arrive quand vous parlez d'abord, et pensez plus tard, pensa B'Elanna. Elle souleva sa tête comme elle entendait approcher Azuma.
"J'ai encore une question", dit B'Elanna comme elle prenait le verre d'Azuma. "Quelque chose d'étrange est arrivé tandis que j'étais... là. C'était comme si j'avais sauté en avant dans le temps. Le matin s'est changé en nuit presque sans avertissement."
"Un saut dans le temps", reconnu Azuma. "Occasionnellement, on a noté que cela était arrivé. La mémoire se met rapidement à avancer à un autre point dans le temps."
"C'est exactement ce qui est arrivé", dit B'Elanna. "C'était étrange, pour ne pas dire plus." "Oui, parce que vous n'étiez pas consciente de ce phénomène. Souvent, il vous prend par surprise."
"Donc vous pouvez effectivement sauter dans le passé ?" demanda B'Elanna. Elle s'assit droite, balançant ses jambes sur le côté du lit. "A n'importe quel moment choisi ?"
"Avec des raisons, bien sûr", dit Azuma. "Et avec préméditation. Maintenant, vous devez vous reposer. Je peux imaginer que cela a été une expérience étrange pour vous, de celles que vous ne devriez pas prendre à la légère."
Après cela, Azuma quitta la pièce, fermant la porte doucement derrière elle.
Pas quelque chose à prendre à la légère, pensa B'Elanna comme elle appréciait l'eau fraîche. Mais ce serait intriguant...

***

Je pourrais m'habituer à cela, pensait Tom Paris comme il jetait un coup d'oeil autour de lui dans la Passerelle. La vue depuis le fauteuil du Capitaine était certainement différente de celle qu'il avait aux commandes, de la console tactique ou de celle de l'Ingénierie. Dans le passé, Tom réprimandait souvent Harry de passer ses quarts de nuit sur la Passerelle. Il reprochait à Harry de vouloir être sur une voie rapide pour une promotion. Harry haussait les épaules et lui répondait par un simple, "Tu devrais l'essayer un de ces jours." Mais les devoirs sur la Passerelle, à moins d'y être contraint, ça ne lui disait jamais rien. Il aimait les heures creuses, passant beaucoup de temps libre dans le holodeck, bricolant ou écrivant divers programmes holographiques, incluant le programme inexplicablement populaire "Fair Heaven". Et bien sûr, il y avait B'Elanna et maintenant, Miral... Pensant justement à Miral, Tom serra les lèvres. Chaque jour, Miral faisait quelque chose de nouveau, et il se sentait incroyablement amusé et fier d'observer chaque petit accomplissement, du premier sourire jusqu'au signe de la main.
"Message en provenance de la planète", annonça Seven of Nine, interrompant la rêverie de Tom. Elle appuya sur quelques boutons et une seconde plus tard, Harry Kim apparaissait sur l'écran principal. Tom sourit en voyant son ami et se leva.
"Salut, Harry", dit Tom. "Nous te manquons déjà ?"
"Ce n'est pas ça", répondit Harry mal à l'aise. Il jeta un coup d'oeil par-dessus son épaule, peut-être dans un effort pour éviter un contact direct. Les pensées de Tom se mirent immédiatement à imaginer le pire scénario possible. "Les Sernaix ?" demanda Tom. Sa voix était calme même si la pensée des Sernaix là-bas sur la même planète que sa femme et son meilleur ami l'avait terrifié. Il n'avait pas pensé cela possible après tout ce à quoi ils avaient fait face dans le quadrant delta, mais l'image de ces étrangers cornus à la peau bleue perturbait de temps en temps son sommeil et Tom se réveillait en sueur, son coeur battant la chamade. Cependant, quand B'Elanna le prenait dans ses bras, il s'estimait en sécurité.
"Non, nous n'avons vu aucun signe des Sernaix", dit Harry. Le soulagement était évident dans sa voix. Tom sentit la tension diminuer en lui.
"Alors pourquoi cette tête ?" demanda Tom de façon taquine. Mais Harry ne lui retourna pas son sourire.
"Est-ce que le Docteur est disponible ?" Demanda Harry.
"Il est à l'infirmerie, traitant un blessé Sernaix que nous avons téléporté à bord. Qu'est-ce qu'il y a ?"
"C'est B'Elanna. Elle est..." Harry fit une pause.
"Qu'est-il arrivé ?" demanda Tom, s'avançant vers l'écran. "Harry ?"
"Elle est tombée dans une sorte de coma. Nous avons essayé de la ranimer, mais en vain. J'ai besoin du Docteur."
"Je vais me téléporter", dit Tom. Il appuya sur son communicateur. "Paris au Capitaine."
"J'écoute, Tom." La voix de Janeway grésillait sur la ligne de communication. "Qu'est-ce qu'il y a ?"
"B'Elanna a besoin d'assistance médicale. Je demande la permission..."
"Refusée", répondit le Capitaine.
"Capitaine !" s'exclama Tom. Il arpentait en longueur toute la Passerelle, incapable de contenir son énervement. "Elle a besoin de moi."
"Nous enverrons le Docteur. J'ai besoin de vous sur la Passerelle." Tom se mordit la lèvre puis regarda à nouveau Harry.
"Le Docteur est en route, Harry", dit-il, se rapprochant plus près de l'écran principal. "Tu me tiendras informé, n'est-ce pas ?"
"Bien sûr. Kim terminé." Tom se retourna pour faire face à sa place, mais surprit alors les yeux de Seven of Nine. Elle le regardait avec douceur et avec une chaleur peu habituelle. Il se retourna à nouveau. Il n'avait pas envie de s'asseoir.
"Lieutenant Paris", dit Seven tout doucement. "Le lieutenant Torres est une femme forte et le Docteur est un médecin compétent. Quelle que soit sa maladie, je suis sûre que le Docteur peut la soigner efficacement."
Tom ne répondit pas, mais se rapprocha un peu d'elle pour lui adresser son sourire si caractéristique, celui qui avait fait fondre bien des coeurs à travers tout le Quadrant Alpha. Mais il n'y avait aucune chaleur dans son sourire.
Il souhaitait seulement que Seven ait raison.

***

Harry rencontra le Docteur aux faubourgs du village Caprijen. Le Docteur était venu équipé de plusieurs trousses médicales pour n'importe quelle éventualité. Harry souleva une des trousses et indiqua la direction de la maison d'Azuma.
"Nous l'avons amené ici après son évanouissement", dit Harry tandis qu'ils s'approchaient du sentier menant à la porte d'entrée d'Azuma. Le Docteur remarqua les petites fleurs rouges alignées de chaque côté du sentier couvert de petites pierres rondes ainsi que les petites sculptures indigènes d'animaux faites en métal à gauche de la porte.
"Pittoresque", remarqua-t-il comme Harry ouvrait la porte. Le Docteur évalua l'intérieur de la maison, étudiant tout, des rideaux vivement colorés des fenêtres jusqu'aux meubles simples en bois. "Délicieux", continua le Docteur. "Mobilier coloré, fonctionnel et de bon goût, très confortable." Harry choisit de ne pas répondre aux commentaires du Docteur comme il passait devant lui vers le petit couloir menant à la petite chambre à coucher préparée par Azuma pour B'Elanna.
Les deux hommes furent étonnés de trouver B'Elanna assise sur le bord du lit, ses yeux anormalement brillants et les joues toutes rouges.
"Docteur", dit B'Elanna. Elle fronça les sourcils. "Je vais très bien. Vous n'auriez pas dû venir."
"J'avais prévu que vous me diriez cela", dit gentiment le Docteur. Azuma et Harry étaient directement derrière lui et le Docteur jeta un coup d'oeil à Azuma, qui semblait lire exactement ses pensées.
"Vous pouvez poser vos instruments là", dit-elle en montrant la table contre le mur. "Je crois que vous trouverez suffisamment de place."
"Merci", dit le Docteur. "Maintenant, Lieutenant Torres..."
"Quoi ?" B'Elanna semblait irritée. "Vous faites tout un plat pour une petite affaire de rien du tout."
"Ce qui est arrivé était bien plus qu'un simple voyage au fond de votre mémoire", dit Harry. Il s'assit sur le bord du lit et B'Elanna changea de position pour lui donner plus de place. "B'Elanna, quand nous vous avons trouvés, vous étiez dans le coma." Le Docteur s'approcha de B'Elanna, son tricordeur émettant des signaux sonores d'une manière affolante à mesure qu'il se rapprochait. B'Elanna fronça les sourcils.
"Restez assise, Lieutenant", avertit le Docteur. "Je note des niveaux élevés de particules chronitons dans votre sang. Cela ne fait aucun doute, vous avez éprouvé une forme quelconque de voyage dans le temps."
"Cela a-t-il causé des dégâts permanents ?" demanda B'Elanna très préoccupée. "Non, d'après ce que je peux voir. Bien sûr, il faudra sans doute des semaines pour les chronitons de votre corps se dissipent complètement."
"Bon", Dit B'Elanna.
Harry la regardait fixement. "A quoi pensez-vous, B'Elanna ?"
"Je veux y retourner", dit B'Elanna. Elle souleva son menton d'un air provoquant et serra sa mâchoire. Laisse-les se disputer, pensa t-elle. Ils ne peuvent pas m'arrêter.
"Ne soyez pas ridicule", dit le Docteur.
"Vous avez dit vous-même que vous n'avez remarqué aucun dégât permanent. Quel est le problème si j'essaye de nouveau ?" demanda B'Elanna. Elle s'était levée du lit et commençait à arpenter la pièce de long en large. Elle s'arrêta devant Azuma. "Est-ce que c'est possible ?" La femme Caprijen hocha la tête. "C'est possible", confirma t-elle. "Tout que vous devez faire, s'est vous détendre, respirer lentement, et expirer aussi très lentement... Le Gardien vous a déjà touché, c'est tout ce que vous avez à faire." B'Elanna inclina la tête. "Bon, bon."
"B'Elanna, nous ne savons pas quels sont les risques", contesta Harry. "Vous ne pouvez pas faire cela."
"Il n'y a aucun risque. Il l'a dit", dit B'Elanna, pointant le Docteur. Son expression défiait le Docteur de la contredire et elle s'attendait à ce que le Docteur recule, comme il l'avait souvent fait quand il avait à faire face à ce ton de voix. Mais au contraire, sa mâchoire se durcit et il sembla également récalcitrant sur le sujet.
"J'ai dit que je n'ai pas vu d'effets de vos aventures récentes, pas qu'il n'y a pas de possibilité de risque. Il y a une différence", répondit le Docteur.
"Dans la sémantique peut-être, rien de plus", dit B'Elanna. "Je veux juste y retourner encore une fois. Azuma m'a dit que le saut dans le temps est possible et je dois y retourner."
"Y a-t-il une raison ?" demanda Harry doucement. "Un moment particulier ?" B'Elanna inclina la tête, se mordant la lèvre. Elle ferma les yeux, son visage entier s'adoucissant. Lorsqu'elle rouvrit ses yeux, ils étaient brillants et humides.
"Avant que je ne parte pour l'Académie de Starfleet, ma mère et moi nous sommes battues", dit B'Elanna doucement. "Cela a été la dernière fois que je lui ai parlé. Je ne sais pas si elle savait que malgré tout, je l'ai aimée. Je veux qu'elle sache que je l'ai honorée, comme une fille doit le faire. Même maintenant."
"N'avez-vous pas fait votre voyage en enfer sur Klingon pour cette raison ?" demanda Harry. B'Elanna acquiesça. "C'est différent, Harry", dit-elle sincèrement. "Ma mère était déjà morte à ce moment-là. Elle ne l'a jamais su de son vivant. J'ai maintenant la chance de remonter le temps et de modifier ce moment. Si on vous donnait cette chance, en profiteriez-vous ?"
"Non, pas du tout", l'interrompit le Docteur. "Vous pourriez avoir la même réaction de nouveau. Le danger est trop grand."
"Vous ne comprenez pas", dit B'Elanna d'une voix rauque. "Vous ne pouvez pas comprendre, probablement." Azuma prit le bras de B'Elanna et la guida vers une chaise. La main de l'étrangère était fraîche contre la peau fiévreuse de B'Elanna, et immédiatement, B'Elanna ressentit la paix. Elle s'affaissa sur la chaise, se sentant réconfortée par le contact d'Azuma.
"Je ne vous aiderai pas", dit le Docteur. "Je vous ai aidé une fois auparavant contre mon meilleur jugement et aussi celui du Capitaine."
"Je n'ai pas besoin de votre aide", dit B'Elanna. Elle regardait Azuma qui la regardait avec compassion. "Je dois faire cela."
"B'Elanna, non." B'Elanna commença à se concentrer sur sa respiration. Inspiration, expiration, inspiration, expiration, inspiration... dans un rythme parfait. Juste encore une fois, pensa-t-elle. Ses yeux se brouillèrent comme elle voyait le Docteur marchant vers elle, la seringue hypodermique dans sa longue main. Non, pensa t-elle, non s'il vous plaît. Elle ressentit le sifflement de la seringue contre son cou.
"Qu'avez-vous fait ?" chuchota B'Elanna. Elle se sentait fatiguée, si fatiguée. Elle ferma les yeux, voulant seulement se reposer un instant...

***

Elle reconnut la pièce immédiatement. Minuscule et fonctionnelle, rien de plus qu'un lit, une armoire et un bureau. L'étagère à livres, encastrée dans le mur, contenait plusieurs boites ainsi qu'un des vices cachés de B'Elanna, des livres romantiques Klingons.
La valise était grande ouverte sur le lit. Les vêtements étaient proprement pliés sur le plancher, sur la chaise et sur le lit.
Un paquet, estampé avec le logo de l'Académie de Starfleet, se trouvait sur le bureau. B'Elanna traversa la pièce et le prit. Elle en retira sa lettre d'acceptation, une lettre qu'elle avait mémorisée tout au long de ces mois d'été, qui avaient semblé ne jamais se terminer.
"Chère B'Elanna Torres, Nous avons le plaisir de vous informer de votre admission à l'Académie de Starfleet. Comme vous le savez, l'Académie est extrêmement compétitive et votre admission montre que vous êtes une candidate possédant des qualités remarquables. Vos talents seront un actif..." B'Elanna fit une pause quand elle entendit des pas en provenance du vestibule. Ses mains tremblèrent et la lettre lui glissa des doigts.
Elle se tourna résolument vers la porte. Sa mère ne l'avait pas félicité depuis que la lettre d'admission était arrivée et aujourd'hui, B'Elanna jetait un coup d'oeil à l'uniforme de cadet proprement plié dans la valise, elle allait partir pour l'Académie de Starfleet.

***

"Faites quelque chose !" s'exclamait Harry frénétiquement tout en secouant B'Elanna pour tenter de l'éveiller, un réflexe instinctif tout à fait futile.
"J'essaye", répondit le Docteur. Le HMU fouillait dans sa trousse médicale pour finalement en sortir une autre seringue hypodermique. "Je ne m'attendais pas à ce que ce stimulateur ait une réaction exactement opposée." Il appuya l'extrémité humide de la seringue hypodermique contre le cou de B'Elanna, déchargeant sa dose avec un petit sifflement.
"Rien", annonça Harry. Il prit son tricordeur. "Ses connexions neurologiques sont aléatoires, trop rapides."
"C'est un effet du Gardien", dit Azuma de son coin. Le Docteur s'agita autour d'elle.
"C'est arrivé à d'autres et vous dites qu'il n'y a aucun moyen de les ranimer", dit-il. "Non. Le souvenir doit être revécu."
"Nous ne savons pas où elle se trouve dans le temps", dit Harry. Il regardait son amie qui s'était effondrée sur la table, son front reposant sur son bras replié. "Comment pouvons-nous arrêter ce souvenir ?"
"Il y a un traitement que nous pouvons essayer", dit lentement Azuma. "Nous l'essayons rarement parce que ce n'est pas toujours couronné de succès."
"Qu'est-ce que c'est ?" la questionna le Docteur.
"Un individu peut entrer dans les souvenirs de la personne affectée et la ramener lentement à un état conscient", dit Azuma, se remettant sur ses pieds. "Si cela est fait correctement, il réveille l'individu. Cependant, le danger est grand pour les deux personnes si cela est fait incorrectement." Ce n'était pas la première fois depuis qu'ils avaient découvert le Gardien que Harry se demandait comment il expliquerait tout cela à Tom. Bien sûr, Tom ne serait pas étonné par le caractère impulsif de sa femme. Bien que B'Elanna semblât réellement heureuse cette fois, en paix avec ses héritages Klingon et humain, sa nouvelle trouvaille permettant de changer un événement du passé, n'avait représenté rien de moins qu'une irrépressible tentation.
Harry le comprenait très bien.
'Et toi ? ' demandait une petite voix dans la tête d'Harry. ' Tu n'y retournerais pas si tu le pouvais ? ' "Harry ?" interrogea le Docteur. Il cligna des yeux et réalisa que le Docteur et Azuma le regardaient curieusement. "Allez-vous essayer ?"
"Un voyage dans la tête de B'Elanna ?" Harry essayait de cacher son agitation. Il savait qu'il le ferait, qu'il ferait tout pour B'Elanna, mais la pensée d'entrer dans sa mémoire, ses souvenirs privés...
"Le Gardien ne semble pas avoir le même effet sur vous que sur elle", fit remarquer Azuma.
"Je ne l'ai pas touché", dit Harry lentement. Il toucha légèrement l'épaule de B'Elanna et retira rapidement ses doigts au contact de la chaleur de sa peau. "C'est comme si j'allais envahir sa vie privée." "Ce n'est pas le moment de penser à cela", dit le Docteur brusquement. "Le ferez-vous ?" Harry acquiesça. "Je le ferai."

***

Harry descendait le hall d'une maison peu familière. Il savait que c'était la maison d'enfance de B'Elanna. Il pouvait le dire par le bat'leth accroché à l'autre bout du couloir et à l'odeur piquante et musquée typique des Klingons. Il passa par une alcôve et dut se retenir pour ne pas examiner soigneusement un ensemble de trois photos soigneusement agencées.
La maison semblait exceptionnellement sombre et quand il jeta un coup d'oeil dans une chambre à coucher, il se rendit compte que le crépuscule était tombé et que le soleil n'était plus qu'une ligne orange sur l'horizon.
"B'Elanna ?" appela Harry. Sa voix se répercuta sinistrement dans le vestibule. Il tourna et la vit de dos. Elle était penchée sur le lit, pliant soigneusement des vêtements. Harry lui souria. Il reconnaissait son pliage particulier.
A cette distance, Harry pouvait entendre d'autres pas. Il regarda attentivement le hall et vit une femme Klingonne parée de son costume traditionnel qui venait dans sa direction. Harry s'écrasa contre le mur, mais Miral Torres le dépassa, apparemment inconsciente de sa présence.
"B'Elanna", dit Miral, d'une voix dure.
"Qu'est-ce qu'il y a ?" demanda B'Elanna, ne se retournant pas pour faire face à sa mère. Elle continuait de plier, calmement, proprement, presque sans y penser.
"Tu me regardes quand je te parle, ma fille."
"Je suis occupée."
"Oui, tu fais tes bagages pour partir. Comme ton père ! Tu ressembles tellement à ton père." "Il vaut mieux être comme lui que de te ressembler " répliqua B'Elanna. Elle tournait maintenant en rond et Harry reconnaissait bien l'expression sur le visage de B'Elanna. Sur le Voyager, cela signifiait que quelqu'un allait quitter l'Ingénierie avec une ou deux cicatrices de plus. "Il me comprend mieux et d'une manière B'Elanna dont tu ne seras jamais capable."
"C'est donc ça ?" se moqua Miral Torres. "Alors pourquoi n'est-il pas entré en contact avec toi depuis tout ce temps ? Il ne veut plus rien avoir à faire avec toi."
"Ce n'est pas vrai !" s'était exclamée B'Elanna. "Tu l'as chassé ! Si ça n'avait pas été B'Elanna à cause de toi, il ne m'aurait pas laissée."
"Donc tu me blâmes ?" se moqua Miral. "Ne sois pas ridicule, ma fille. Tous les humains sont les mêmes et tu le découvriras toi-même quand tu partiras rejoindre cette Académie." "Je ne m'enfuis pas", dit B'Elanna. Elle contourna le lit et saisit quelques tablettes électroniques sur l'étagère pour les jeter, en colère, dans la valise. "Je m'en vais loin de toi. C'est là la différence. Je vais vivre la vie que j'aurais dû avoir. Pas celle dans laquelle tu continues constamment à t'immiscer." "Penses-tu réellement ce que tu dis", dit Miral Torres doucement. "Une fille dévouée et honorable ne dirait pas une telle chose."
"Tu ne m'as jamais considérée comme 'dévouée' et 'honorable' auparavant", répliqua B'Elanna. Elle saisit quelques photos encadrées sur l'étagère et les jeta dans sa valise. Le verre d'un encadrement se brisa. B'Elanna s'arrêta, posant ses doigts sur la fissure. "Tu devrais être heureuse. Je n'ai rien été d'autre qu'un fardeau pour toi toutes ces années."
"Ce n'est pas vrai." B'Elanna haussa les épaules, se mordant la lèvre. Miral se rapprocha, comme si elle voulait toucher sa fille, mais B'Elanna s'esquiva, se plaçant de manière à ce que le lit soit entre elles.
"Je suis heureuse d'être loin de toi", dit B'Elanna. "J'ai attendu ce jour pendant si longtemps."
Un long silence suivit, la mère et la fille se regardant fixement.
Finalement, Miral ajouta tout bas "Si tu étais une mère, tu saurais..." Miral Torres se retourna alors et descendit le hall. Comme elle passait, Harry pouvait voir le tremblement des lèvres de la femme Klingon. B'Elanna se retourna et courut vers sa mère, mais Harry lui attrapa le bras.
"B'Elanna", dit-il tranquillement.
B'Elanna dégagea son bras brusquement. Ses yeux étaient humides et elle mit le dos de sa main à travers son visage en essayant de sourire.
"Que faites-vous ici, Harry ? Avez-vous tout entendu ?"
"Chaque mot. Et je suis venu pour vous ramener à la maison."
"Si vous avez entendu, vous savez pourquoi je ne peux pas repartir avec vous", dit B'Elanna. Elle s'était assise à son bureau et se tenait le menton. "Ca ne fait pas moins mal, Harry. Non, même après tout de ce temps. C'est ma chance."
"Vous ne pouvez pas courir après elle, B'Elanna", dit Harry. "Vous risquez de changer la ligne de temps."
"Quelle différence cela fait-il ?" répondit B'Elanna en haussant les épaules. "Je veux qu'elle sache comment je me sens. Si jamais ma fille me disait de telles choses..."
"Si vous sauvez la relation avec votre mère, tant de choses pourraient changer."
"Rien ne changerait. J'irais toujours à l'Académie."
"Mais cela pourrait être différent cette fois... Pensez-y, peut-être que cette fois, vous obtiendriez votre diplôme", dit Harry. "Vous ne voyez pas ?" Il s'accroupit devant B'Elanna. "Je ne pense pas que vous seriez la même B'Elanna Torres que nous avons apprit à aimer et à connaître. Changer ce moment pourrait tout changer." B'Elanna reniflait, le regard fixé sur un endroit situé derrière Harry.
"Je ne pensais pas un mot de ce que j'ai dit", chuchota B'Elanna. "J'étais si fâchée, c'est tout. Nous ne nous sommes jamais revues face à face après ce dernier été et je l'ai toujours regretté."
"Je sais que vous voulez faire cela", dit Harry tranquillement. "J'y pensais moi-même. Ne serait-il pas agréable si je pouvais juste effacer les sept dernières années dans le Quadrant Delta ? Je serais marié maintenant, et qui plus est, j'aurais même un gosse ou deux. Peut-être aussi que j'aurais eu une promotion. Mais juste parce que je peux changer cela ne veut pas dire que je dois le faire. Nous sommes la somme de nos expériences, B'Elanna, et peu importe si la tentation est grande de retourner et de refaire nos vies, nous ne devons pas le faire. Cela signifierait que tout ce qui est arrivé dans l'intervalle aurait été sans signification." B'Elanna déglutissait difficilement. "Elle est juste là, Harry, juste au bout du couloir..."
"Et votre fille Miral est sur le Voyager", dit Harry. "Qu'arrivera-t-il si vous changez tout maintenant ? Il est possible que rien ne se passe comme nous le connaissons. Vous pourriez même être un officier exemplaire de Starfleet quelque part dans le Quadrant Alpha."
"C'est un moment insignifiant..."
"Nos vies sont construites sur des moments insignifiants. Nous les rendons importants, B'Elanna. Rappelez-vous votre fille. Venez avec moi maintenant, B'Elanna. S'il vous plaît." Harry lui tendit la main. "J'aurais horreur d'avoir à expliquer à Tom ce qui est arrivé ici." B'Elanna se mordait la lèvre. "Elle ne revient pas, n'est-ce pas ?"
"Non." Harry se retourna pour voir par-dessus son épaule si Miral allait revenir dans la pièce. "Le choix est le vôtre. Vous pouvez aller auprès d'elle et risquer de changer la vie que vous vous êtes construite à bord du Voyager ou vous pouvez revenir avec moi et rien ne changera, rien du tout." B'Elanna poussa un soupir, qui sembla lui secouer le corps entier. Harry la rejoignit, posa sa main sur son épaule.
"Qu'est-ce qu'il y a ?" chuchota-t-il.
Elle lui jeta un coup d'oeil, les yeux humides. "Je n'étais pas une très bonne fille", Chuchota-t-elle. "Qu'arrivera-t-il si je suis également une mauvaise mère ? Si Miral grandit pour finir aussi fâchée contre moi que je l'étais contre mes propres parents ?" Harry était vraiment étonné. B'Elanna n'avait jamais exprimé d'incertitudes auparavant par rapport à la maternité. Tout au contraire, il pensait qu'elle s'était extraordinairement bien adaptée à son nouveau rôle. Pour une fois, pensait Harry, quelque chose avait la priorité sur ses moteurs.
"B'Elanna, comment pouvez-vous dire cela ?" demanda Harry. "Vous êtes parfaite avec Miral." Elle reniflait, agitant sa main, comme si elle rejetait son commentaire. Une autre surprise. Oh! Malheur, pensa Harry, je ne suis pas doué pour ce genre de conversation.
"En avez-vous parlé avec Tom ?" demanda doucement Harry. "Comment vous vous sentez ?"
"Non, comment le pourrais-je ?" Les épaules de B'Elanna s'étaient effondrées. "Il rirait de cela. Lui, il est si bon dans son rôle, Harry."
"Croyez-moi, vous aussi. Tout le monde le dit aussi. B'Elanna, vous devez me croire. Vous voulez la perfection, quelque chose qui n'est pas possible. Si vous pensez que courir après votre mère va changer les choses, alors c'est ce que vous devez faire. Je ne me mettrais pas en travers de votre chemin." Harry écarta les bras dans un geste de reddition, mais il fixait son regard concentré directement sur B'Elanna. Elle penchait la tête de côté, appuyant une paume contre ses yeux. "B'Elanna..."
"Quand le Docteur a mis Miral dans mes bras", dit lentement B'Elanna, "j'ai éprouvé toute une gamme d'émotions, la joie, l'incertitude, l'attente. J'étais surexcitée, Harry, et des fois, je le suis encore. Je regarde Miral et je ne peux pas croire que je suis responsable d'elle. Parfois, je me réveille au milieu de la nuit et j'imagine ses parents réels venant la chercher. Qu'arriverait-il si je ne faisais pas les choses correctement ? Harry, je suis terrifiée par cette perspective." Harry secoua la tête. D'une part, il avait été étonné par la véracité de B'Elanna et son état émotionnel, mais d'autre part, il savait qu'en changeant des événements particuliers de sa vie, cela ne donneraient pas les réponses dont elle avait besoin.
"Je pense toujours que vous faites une grande erreur", dit Harry sur un ton alarmiste. Elle prit une grande respiration et se leva, en titubant. Harry ne pouvait pas voir, mais il savait lorsque B'Elanna passa devant de lui qu'elle allait en réalité le faire, elle allait voir sa mère...
"B'Elanna !" Il se leva. Il fallait qu'il essaye encore une dernière fois. Il devait tellement à B'Elanna. "B'Elanna, si vous y allez, vous allez tout perdre ! Votre mari, votre fille, votre famille à bord du Voyager... Est-ce que ça en vaut la peine ?" B'Elanna s'arrêta à mi-chemin et revint lentement.
"C'est très bien", dit Harry. Il se leva et s'avança rapidement vers son amie. "Je ne crois pas que ce que vous ressentez soit irréel, mais vous allez vous rendre compte. Pas tout de suite, bien sûr, mais plutôt comme vous le faites pour un problème technique. Vous le décortiquez, morceau par morceau, et vous trouvez une solution. Peut-être que ce n'est pas la meilleure analogie, mais vous allez être une mère parfaite pour Miral. Je le sais." B'Elanna jeta un coup d'oeil vers le couloir puis ensuite vers Harry. Le temps sembla s'arrêter tandis qu'elle réfléchissait à sa décision. Harry était appuyé contre le mur, ses bras croisés contre sa poitrine, apparemment sous contrôle, mais il n'était pas à l'aise. Imprévisible comme l'était B'Elanna et avec de fréquentes sautes d'humeurs, cela avait occasionnellement provoqué des actes irrationnels.
Revenez avec moi, plaida Harry silencieusement. S'il vous plaît.
"Vous avez raison", chuchota-t-elle. "Je vais revenir avec vous." Harry exaltait.
"Vous ne le regretterez pas", lui dit-il. B'Elanna le regardait tristement.
"Je le regrette déjà", lui répondit-elle.

***

De l'avis de Chakotay, il y avait trop de personnes dans l'infirmerie. En plus de lui, Tuvok et le Capitaine, une équipe de sécurité composée de quatre membres était un peu en retrait, les mains sur leurs phaseurs.
Et il n'avait pas même compté les Sernaix. Ils étaient deux. Ilix, le représentant d'Adimh Liven et le blessé Sernaix, Lous.
Ilix était grand et musclé, comme tous les Sernaix, et il marchait avec une démarche particulière, visiblement à cause de la double articulation de ses membres. Ses yeux, sombres et profondément encastrés derrière son front proéminent, regardaient Janeway et Chakotay.
"Les signes sur votre front..." dit finalement Ilix lorsque son regard se fixa sur le premier officier. "Oui ?" dit Chakotay gentiment.
"Vous devez avoir un rang très supérieur", dit Ilix. Il roulait ses manches, dévoilant divers dessins artistiques sur sa peau bleu pâle. "Comme vous pouvez voir ! Je suis un zvir sur Crimson Stone."
"Un zvir ?" demanda Janeway avec curiosité.
"Quand Adimh Liven se retirera comme commandant de Crimson Stone, je lui succéderai", dit Ilix en regardant fixement Janeway, très fasciné. "Vous êtes une femme de votre espèce ?"
"Oui", dit Janeway. Elle échangea un regard avec Chakotay, qui était aussi fasciné qu'elle mais aussi tantôt inquiet du ton de cette conversation. Ilix semblait trop décontracté au goût de Chakotay et ses instincts de maquisard étaient à l'affût d'un quelconque signe de menace de la part d'Ilix. Les Sernaix, de l'avis de Chakotay, n'étaient pas du genre à s'engager dans des conversations frivoles.
"J'ai très peu de contact avec des femmes", dit Ilix. Il s'avança plus près du Capitaine. Tuvok réagit, la main sur son phaseur. Janeway retint sa main, arrêtant toute action de Tuvok. Chakotay soupira. "Je veux en apprendre d'avantage sur votre peuple..." Janeway se retourna pour regarder Chakotay. Il reconnut ce regard. Elle avait vu une ouverture et allait en profiter. Peut-être, pensait Chakotay, perplexe, me suis-je trompé tout le long...
Il ne savait pas sur quel pied danser en regardant Janeway parler au Sernaix. Sa voix était faible, suppliante et elle gesticulait fréquemment avec ses mains, comme si elle ponctuait ses phrases. Chakotay jeta un coup d'oeil à Tuvok, qui observait aussi la conversation avec intérêt, les yeux passant sans cesse du capitaine au Sernaix. Chakotay se pencha vers Tuvok.
"Individu bavard, n'est-ce pas ?" demanda Chakotay. Tuvok hocha la tête.
"Etant donné notre précédente rencontre avec les Sernaix, je trouve son comportement peu commun", dit Tuvok d'une voix également faible. "Il est étrangement amical."
"Pensez-vous qu'il a autre chose en tête ?"
"Peut-être", dit Tuvok. Ses yeux s'éclairaient légèrement tandis que le Sernaix se rapprochait encore plus près du Capitaine. "Avec les Sernaix, tout est possible."
"J'avais peur que vous ne disiez quelque chose de ce genre-là." Graduellement, soulageant beaucoup Chakotay, la conversation dériva des différences culturelles entre Sernaix et humanoïdes vers la condition du blessé. "Comme vous pouvez voir, Lous a été bien traité", dit Janeway. "Evidemment, nous ne lui voulions aucun mal."
Ilix fixa des yeux le Capitaine avec scepticisme, toute trace de bienveillance ayant disparue de ses yeux sombres. "Nous avons déjà été bernés auparavant."
"Je ne vous mens pas."
"Alors expliquez les gardes", aboya Ilix. "Et le champ de force..."
"Vos actions précédentes ne nous ont pas donné aucune raison d'avoir confiance en vous", dit Chakotay, profitant du moment pour entrer dans la conversation. Il jeta un coup d'oeil à Janeway et elle lui offrit un semblant de sourire. En confiance, Chakotay continua. "Cependant, si vous vous montrez dignes de notre confiance, je vous assure que nous enlèverons le champ de force."
"Et en ce qui concerne les gardes ?"
"Non", dit Tuvok. "Selon les directives de Starfleet, ils doivent être présents à tout moment quand il y a du personnel extérieur à la Fédération à bord." Janeway lui fit un clin d'oeil, mais n'ajouta rien du tout en réponse au précepte de Tuvok. Le Vulcain recula, se retirant apparemment de la conversation.
"Et bien ?" demanda Janeway en regardant à nouveau Lous, dont les yeux allaient de l'un à l'autre, regardant d'abord Ilix et ensuite le Capitaine. "Nous n'avons pas eu l'intention de violer votre espace. Notre arrivée était un accident, une circonstance malheureuse du destin."
"Cela est difficile à croire. Beaucoup ont profité des Sernaix", gronda Ilix. "Nous ne serons pas séduits par de simples mots."
"Croyez-moi, ce n'était pas notre intention. Cependant, nous voudrions demander votre aide pour nous sortir de là." Janeway regarda Chakotay, mais il haussa les épaules. "Nos rapports sur le secteur montrent que nous avons été attrapés dans une sorte de bulle qui nous empêche de revenir chez-nous, sur Terre. Tout ce que nous essayons de faire, c'est de trouver une voie pour retourner chez-nous. Comme je l'ai dit auparavant, nous désirons vous offrir notre aide en retour."
"Qu'est-ce que vous avez que nous voudrions ?" demanda Ilix de façon mordante.
C'était vrai. Voyager avait peu à offrir aux Sernaix en terme de technologie, pensa Chakotay, mais il pouvait juger par l'expression de Janeway qu'elle ne désirait pas concéder ce point.
"Je ne sais pas. Peut-être devrions-nous en parler ?" Les lèvres de Janeway se durcirent. Chakotay étouffa un sourire.
"Comment puis-je savoir si ce n'est pas une supercherie ?" Janeway jeta un coup d'oeil par-dessus son épaule vers Chakotay. Son regard lui disait, très simplement, qu'elle trouvait cette conversation ennuyeuse.
Tant de chemin pour en arriver là, ne perd pas le fil maintenant, Catherine, pensa Chakotay. A côté de lui, Tuvok changea de position. C'était un mouvement subtil, mais assez visible pour que Chakotay ait conscience du souci évident du Vulcain de la pièce qui se jouait devant eux. "Et bien ?" reprit Janeway en tapotant de ses doigts le lit médical, montrant des signes grandissant d'impatience face aux Sernaix. "Qu'en pensez-vous ? Vous vous renfermez sans même écouter ce que nous avons à dire. D'où je viens, c'est le signe d'un diplomate incompétent." Les yeux d'Ilix se rétrécirent tandis qu'il jetait un coup d'oeil à son camarade blessé puis à Janeway.
Vous avez toute son attention maintenant, Catherine, pensa Chakotay.
Janeway se rapprocha, laissant seulement quelques pouces la séparer d'Ilix.
"Je veux que les choses soient claires", dit-elle doucement. "Dans le cas où il y aurait des doutes de votre part, mon seul but est de faire en sorte que ce vaisseau retourne à la maison. Cela a été et sera toujours mon seul objectif." Ilix inclina la tête finalement. "Très bien", dit-il. "J'écouterai ce que vous avez à dire."
"Vous ne serez pas déçu", dit Janeway. "Commandeur, veuillez s'il vous plaît escorter nos invités vers la salle de conférence."
Tuvok recula pour laisser le passage à Ilix, accompagné par deux des gardes chargés de la sécurité. Les deux autres gardes restèrent derrière pour surveiller le patient.
Dans le couloir, Janeway et Chakotay marchaient ensemble au pas.
"Que pensez-vous ?" demanda-t-elle.
Chakotay haussa les épaules.
"Je demande votre avis", dit Janeway. Une trace de désespoir était perceptible dans sa voix. "Chakotay..."
"Vous ne devriez pas faire de promesses que vous ne serez peut-être pas capable de tenir", dit-il finalement.
"Est-ce tout ?" Chakotay lui sourit. "Oui, c'est tout."
"Alors c'est clair", dit Janeway. Elle fronça les sourcils dans le dos d'Ilix. "Nous avons été dans des situations bien pires que cela, Chakotay. Un petit bluff ne nous a jamais fait de mal."
"Ils sont plus avancés que nous du côté technologique", précisa Chakotay comme ils changeaient de corridor.
"Etes-vous en train de dire qu'ils sont plus dangereux pour nous que ne l'étaient les Kazons ? Ou les Hirogènes ? l'Espèce 8472 ? Les Borgs ?"
"Nous le saurons bientôt, n'est-ce pas ?" répliqua Chakotay. Il fit une pause devant l'ascenseur. "Pour ce que ça vaut, je vous soutiens. Je ne peux pas être d'accord avec vous tout le temps, mais vous ne devez jamais douter de ma fidélité." Janeway mit sa main sur son avant-bras et se pencha tout près, si près que quelques centimètres seulement les séparaient. A ce moment-là, elle sut que la distance qui les séparait s'était amenuisée. Elle était reconnaissante de cela.
"Je sais", dit-elle.

***

"Comment vous sentez-vous ?" demanda Le Docteur. Il regardait ses deux patients, Harry et B'Elanna, avec une inquiétude évidente, surtout après ce qui venait de se passer.
"Un peu remuée, mais ça va", dit B'Elanna. Elle se frottait les mains, essayant de les réchauffer. Elle ressentait le froid, un incroyable froid, comme si elle avait été congelée. Elle était toujours assise dans la même chaise qu'avant et ses muscles s'étaient raidis pendant son dernier voyage dans le passé. Elle s'étira prudemment, fléchissant ses jambes et ses bras.
Harry était assis sur le bord du lit, la tête penchée et les bras reposant sur ses genoux. Il avait la nausée alors que B'Elanna se mordait la lèvre.
Il avait risqué beaucoup pour elle, elle le savait. Sans réfléchir, elle se leva de sa chaise et s'assit à côté d'Harry, plaçant sa main dans son dos.
"Merci", dit-elle doucement. La sincérité de sa confession embarrassait Harry. Elle lui avait dit des choses qu'elle n'avait pas même osé dire à Tom. Mais pourtant, elle se sentait délivrée, reconnaissante qu'elle avait finalement révélé ses incertitudes à quelqu'un.
"Je vous remercie", dit Harry. Il gémit. "Je ne me sens vraiment pas bien. Je ne peux pas croire que les Caprijens fassent cela." Le Docteur vint rapidement avec une seringue hypodermique.
"Ceci devrait arranger la nausée", dit-il. "Vous irez tous deux bien mieux après un peu de repos. Je crois que vous n'essaierez plus rien de cette nature dans un proche avenir."
"Je ne le ferai certainement plus", dit Harry. Il se releva péniblement, mettant une main contre le mur pour garder l'équilibre. Après quelques secondes, il sembla mieux à nouveau, au grand soulagement de B'Elanna. Elle savait qu'elle ne le se serait jamais pardonnée jamais si quelque chose était arrivée à Harry.
A cause de moi, pensa-t-elle.
"C'était si tentant", dit B'Elanna. Elle voulait expliquer cela au Docteur et à Harry, mais elle avait le sentiment qu'ils ne comprendraient pas. Après tout, le Docteur était un hologramme et Harry, et bien Harry avait mené une vie presque tranquille. Ses cicatrices émotionnelles, s'il en avait, étaient au pire superficielles. "Je ne peux pas l'expliquer mieux que cela."
"Ne soyez pas inquiète, B'Elanna", dit doucement Harry. Il se dirigea lentement vers la table pour prendre le pichet d'eau. "Tout va bien." Au même moment, la porte s'ouvrit brusquement et Azuma entra. Son visage était tout rouge, et ses cheveux argentés, habituellement droits et brillants dans son dos, étaient ébouriffés tout autour de son visage. "Qu'est-ce qu'il y a ?" demanda B'Elanna.
"Vous devez retourner sur votre vaisseau immédiatement", dit Azuma. "Ils sont venus." "Qui ?"
"Les étrangers", dit Azuma. "Nous avons détecté leurs signes vitaux près de votre navette." Harry, B'Elanna et le Docteur s'échangèrent des regards. Azuma se référait-elle aux Sernaix ? "Je déconseillerais de retourner au Delta Flyer", dit le Docteur. "Vous venez tous les deux de subir des expériences traumatisantes et si ce sont les Sernaix, aucun d'entre vous n'est assez en forme pour se défendre."
"Désolé, Doc", dit Harry, tandis qu'il reposait son verre et que B'Elanna saisissait les deux phaseurs de sa trousse à outils. Elle en donna un à Harry.
"Allons-y", dit-elle.
Le Docteur soupira. Il trouva un troisième phaseur et suivit Harry et B'Elanna à l'extérieur, surpris par la brillance du jour.

***

Janeway ne savait même plus combien de réunions elle avait tenu ici dans la salle de conférence. Tant d'espèces différentes s'étaient assises autour de cette table, les uns amicaux, les autres plutôt neutres et d'autres parfois hostiles. Elle jeta un coup d'oeil à Tuvok, assis à sa droite, et à Chakotay sur sa gauche. Au moins savait-elle qu'elle avait leur appui maintenant.
Quant à Ilix, il était complètement seul, mais Janeway n'avait aucun doute sur le fait qu'il devait y avait des vaisseaux Sernaix prêts à lui venir en aide s'il les appelait.
Il y a seulement un vaisseau de la Fédération ici, pensait Janeway. Dieu seul sait combien ils en ont à disposition.
Elle trembla et ressentit immédiatement après un bref instant de faiblesse. Elle se pencha en avant, croisant les doigts pour éviter que l'on voit ses mains trembler, pour la trahir de nouveau.
"Je vous ai dit ce que nous voulions", dit Janeway. "Que voulez-vous ?"
"Vous ne pouvez rien nous fournir."
"Cela ne peut pas être vrai", dit Janeway avec un sourire. "Si c'était en effet le cas, pourquoi me parleriez-vous maintenant ?"
"Vous avez un de nos hommes. C'est inacceptable."
"Vous auriez pu le prendre par la force, mais vous ne l'avez pas fait."
"Votre vaisseau ne pourrait pas survivre à notre assaut." Une note de fierté s'était glissée dans la voix d'Ilix et Janeway se demanda s'il était conscient de la nature paradoxale de son commentaire. Depuis leur première rencontre avec les Sernaix, Janeway était très consciente que les étrangers ne voulaient rien de moins que la destruction du Voyager. Peut-être que seule la présence de Lous à bord les avait protégés.
"Croyez-moi, je suis consciente de cela", dit Janeway, ses lèvres se courbant dans un hésitant sourire quelque peu cynique. Elle s'avança sur sa chaise. "Vous dites qu'il n'y a rien que nous puissions faire pour vous aider ? De la technologie ? Des médicaments ? Rien du tout ?" Tuvok souleva un sourcil, mais ne dit rien. Janeway savait exactement à quoi il pensait. Oui, vieil ami, pensait-elle, je connais les conséquences, mais je préfère courir le risque. Encore une fois. S'il cela peut nous ramener à la maison, je le ferai.
"Je vais faire part de vos propositions à Adimh Liven", dit finalement Ilix. "J'ai écouté votre proposition, Capitaine et je crois que cela met fin à notre conversation." Janeway inspira profondément, essayant d'empêcher la frustration de prendre complètement le dessus en elle.
Elle hocha la tête.
"Bien sûr", dit-elle. "Je ne pense pas que je pourrais en demander plus. Vous avez été très... réceptif." A côté d'elle, Chakotay sursauta, mais Janeway n'osa pas regarder son premier officier. "Mais si je peux, avant que vous ne partiez, j'ai une question pour vous." Ilix inclina la tête. "J'écoute."
"Lors de notre première rencontre, vous avez tiré sur nous, visiblement sans provocation", dit Janeway. "Nous ne vous avions rien fait. Pourquoi ?"
"Je vous fais des excuses, mais vous devez accepter nos raisons."
"Avec tout le respect que je vous dois, je ne pense pas avoir compris", dit Janeway. "J'ai offert un échange et vous ne l'avez pas accepté. Nous n'avons rien fait pour vous provoquer, mais vous nous avez attaqué à nouveau. Vous aviez certainement de fichues bonnes raisons."
"Je pense que vous allez comprendre plus clairement quand je vous dirai ce qui est arrivé la dernière fois que nous avons fait confiance à quelqu'un", dit Ilix. "Il y a quatre-vingts mille ans, une race comme la vôtre, humanoïde, est entrée dans notre espace. Ils venaient pacifiquement, comme vous le faites. Mais une fois notre garde baissée, ils ont commencé à nous exterminer, revendiquant notre territoire comme le leur. Nous avons été capable de nous défendre et avons expulsé les humanoïdes de notre espace, mais nous avons mis des générations avant d'être vraiment capables de nous remettre du génocide infligé à notre peuple."
"Je suis désolé d'entendre cela", dit Janeway. "Mais vous devez croire que nous n'étions pas responsables de ces atrocités. Je vous l'ai dit auparavant, notre seule motivation est de retourner chez-nous. Nous n'avons aucun désir de rester ici."
"Adimh Liven a autorité pour prendre des décisions exécutoires. Il considérera votre proposition." "C'est tout ce que je souhaite demander", répondit Janeway. Elle se leva de sa chaise et contourna la table pour serrer la main du Sernaix. Ilix la regarda, confus. "C'est une très vieille tradition terrienne, un geste de bienveillance. J'espère que vous le prendrez comme un cadeau." Elle étreignit la main froide d'Ilix entre les siennes. "J'espère une réponse du Commandant Liven."
"Merci, Capitaine. Et si Lous est assez rétabli pour partir, je le ramènerai sur mon vaisseau."
Janeway inclina la tête vers Tuvok. "Demandez au Lieutenant Paris de vous rejoindre à l'infirmerie", dit-elle. "Si Lous semble en bonne santé, arrangez-vous pour qu'il soit retourné à son vaisseau." Lorsque Tuvok et Ilix furent partis, Janeway se retourna sur sa chaise et fit directement face à Chakotay.
"Vous aviez raison sur une chose", dit-elle. "Nous ne serons jamais amis avec les Sernaix, particulièrement maintenant que nous connaissons leur expérience avec d'autres humanoïdes. Au moins comprenons-nous maintenant ce qui les motive."
"J'aurais préféré ne pas avoir raison", rétorqua Chakotay. "J'espère encore que vous me prouverez que j'avais tort. Comme vous l'avez fait à de précédentes occasions."
"Ce n'est pas un concours entre celui qui a tort ou raison, Chakotay", dit Janeway. Elle soupira et s'effondra au fond de sa chaise. "Nous perdons parfois nos raisons de vue, je pense." Chakotay restait silencieux et Janeway était soudainement reconnaissante de sa présence forte à ses côtés. Elle se leva de sa chaise, se sentant soudainement stimulée.
"Une alliance est hors de question pour le moment", dit-elle par-dessus son épaule tout en se dirigeant vers la sortie. "Mais ce qui est arrivé aujourd'hui est un bon début."

***

B'Elanna, Harry et le Docteur s'étaient prudemment approchés du Delta Flyer, leurs phaseurs prêts à faire feu. A première vue, le Delta Flyer paraissait intact. B'Elanna prit son tricordeur.
"Je perçois des signes vitaux à l'intérieur du Delta Flyer", dit-elle à voix basse. Elle jeta un coup d'oeil à la navette. "Je crois que ce sont des Sernaix."
"Comment sont-ils entrés ?" demanda le Docteur.
"Très bonne question", dit B'Elanna. Elle contourna le Delta Flyer avec prudence. Elle était tout à fait consciente que les Sernaix pouvaient détecter leurs présences de l'intérieur à tout moment. Elle remarqua que les Caprijens, y compris Azuma, étaient arrivés, armés de divers gourdins, piquets, poignards et autres armes primitives. Bien qu'elle n'ait pas beaucoup confiance en leurs armes, B'Elanna était tout à fait reconnaissante de la force supplémentaire que les Caprijens pourraient fournir. "Je ne détecte aucun signe de falsification.
Attendez..." dit elle en marquant une pause devant le panneau de sécurité à côté de l'écoutille." Il semble qu'ils aient employé un quelconque algorithme inverse pour forcer le chiffrage de sécurité. Harry, il y a là un code étranger mélangé avec le nôtre. Je n'ai jamais rien vu de tel auparavant. "Elle louchait, essayant de comprendre quelque chose à ces inscriptions peu familières, mais elle fut incapable d'obtenir une bonne lecture avant qu'Harry n'ait saisi son bras et l'ait tirée sur le côté.
"Quoi ?" dit B'Elanna surprise. Harry lui montra son tricordeur en guise de réponse. Le Sernaix à l'intérieur du Delta Flyer s'approchait de l'écoutille. Visiblement, ils avaient été détectés.
Les Caprijens, avec Azuma, s'éloignèrent du Delta Flyer, mais restèrent à portée. B'Elanna ne les blâmait pas de se tenir à l'écart. Ce n'était pas leur combat. Bon sang, ce n'est même pas le mien, pensa B'Elanna. Son mal de tête était devenu plus fort et elle avait dû s'appuyer un instant contre le Delta Flyer pour se reposer.
Elle vérifia son phaseur, s'assurant qu'il était réglé au plus fort niveau pour assommer. La vérité étant que, bien qu'elle n'aimât vraiment pas les Sernaix et leur attitude du genre 'tirer d'abord, et poser des questions plus tard', elle n'avait aucune intention de tuer personne.
Au diable la mission facile, pensa B'Elanna comme elle marchait un peu à retrait dans l'ombre du Delta Flyer. Elle s'accroupit devant l'écoutille en même temps que le Docteur et Harry prirent leurs positions en face d'elle.
A ce moment-là, l'écoutille s'ouvrit et deux Sernaix apparurent.
"Harry!" siffla B'Elanna comme elle remarquait qu'un des Sernaix avait déjà tiré son arme, une lame de type stylet très mince, qui semblait exceptionnellement pointue. Mais Harry avait déjà sauté sur ses pieds, son phaseur à la main.
"Non!" cria B'Elanna, sachant instinctivement que le Sernaix battrait Harry au combat. Elle souleva son phaseur et tira. Elle fit quelques pas en avant et tira de nouveau, en même temps que le Sernaix sautait en direction d'Harry. L'autre Sernaix se dirigeait vers B'Elanna, ses yeux en amande se rétrécissant pendant qu'il jouait de sa lame menaçante dans sa direction. B'Elanna tira à maintes reprises, mais en vain. Le Sernaix continuait de s'approcher d'elle. B'Elanna recula, maniant gauchement les contrôles de son phaseur.
"Qu'est-ce qui se passe ?" dit-elle en regardant par-dessus son épaule vers Azuma, qui paraissait près d'elle.
"C'est une arme d'énergie ?" demanda Azuma.
"Oui, bien sûr", dit B'Elanna. Elle se hâtait pour élever le niveau de son phaseur, en position pour "tuer".
"Ceux-là ne marchent pas!" hurlait Azuma tandis que le Sernaix s'approchait encore plus. B'Elanna tira de nouveau, mais l'étranger continuait toujours de s'approcher d'elle.
"Vous me dites cela maintenant ?" cria B'Elanna. Elle vit que deux hommes Caprijens avaient choisi de s'impliquer dans le combat et aidaient Harry, mais l'autre Sernaix se rapprochait d'elle, aucunement perturbé par les tirs de phaseur. En fait, en croisant son regard bleu et laid, B'Elanna avait tendance à penser que le Sernaix se renforçait peut-être à chaque tir de phaseur... Pourquoi ? "Donnez-moi ça!" cria B'Elanna, se faufilant pour se protéger. Elle saisit le gourdin de bois d'un des hommes Caprijens et le lança en direction du Sernaix. Le gourdin frappa le Sernaix au nez et pendant un instant, l'étranger stoppa, hurlant de douleur. "Qu'est-ce qui fonctionne ?"
"Rien d'autre que de vieilles armes comme celles-là. Les étrangers possèdent la capacité d'absorber l'énergie par un dispositif sur leur corps", expliqua Azuma.
B'Elanna soupesa cette nouvelle révélation à propos de la capacité des Sernaix d'absorber toute cette énergie pour... pour faire quoi ?
"Bien, mais vous feriez mieux de préparer un nouveau plan", répliqua B'Elanna. Elle fouilla les alentours, cherchant quelque chose qu'elle puisse utiliser pour se défendre. Elle regarda par-dessus son épaule et s'aperçut que le Sernaix ne la regardait pas, mais plutôt le Docteur.
B'Elanna fit le rapport entre le commentaire précédent d'Azuma et l'intérêt évident du Sernaix pour l'HMU.
"Docteur!" hurla B'Elanna. "Passez en mode veille !"
"Bien compris", dit le Docteur, visiblement perturbé par le Sernaix. Il essaya d'atteindre son émetteur holographique portable, mais le Sernaix avait déjà couvert la distance entre eux deux et plongeait ses longs doigts squelettiques dans la matrice holographique de l'HMU. L'image du Docteur vacilla puis se rétablit, légèrement confuse et déformée.
"Aidez-moi!" s'exclama B'Elanna. Elle fonçait déjà en direction du Docteur et avec l'aide de plusieurs Caprijens, ils réussirent à pousser le Sernaix au loin assez longtemps pour que B'Elanna puisse saisir l'émetteur holographique portable.
"On se verra plus tard", dit-elle le souffle court tandis qu'elle mettait l'HMU en veille. Elle espérait sincèrement que le Sernaix n'avait pas causé de dégâts sérieux à l'HMU, mais ce serait quelque chose à vérifier quand ils retourneraient sur le Voyager.
S'ils retournaient sur le Voyager...
B'Elanna reporta son attention sur Harry. Avec quelques autres Caprijens, il essayait de désarmer l'autre Sernaix, mais toutes leurs actions semblaient inutiles.
Comment le Sernaix pouvait-il faire, contre tant de personnes, pour avoir toujours le dessus ? "B'Elanna!" cria Azuma.
B'Elanna se retourna pour voir le deuxième Sernaix lui arriver directement dessus. Elle laissa tomber l'émetteur holographique portable et saisit le poignard d'un Caprijen. Déjà, ses muscles lui faisaient mal à cause de la tension alors qu'elle s'accroupissait, attendant l'attaque du Sernaix.
"Montrez-moi ce que vous valez", railla-t-elle contre lui. Le Sernaix ria d'elle, un rire qui secoua son frêle corps.
"Vous êtes une femme idiote, humanoïde."
"Vous n'êtes pas la première personne qui me dit cela. Je suis sûre que vous ne serez pas le dernier." Sernaix sauta sur B'Elanna, mais elle s'esquiva de son chemin, reconnaissante pour la première fois depuis des années envers les programmes d'exercices Klingons que Tom avait créés pour elle. Ils se tournèrent prudemment autour l'un de l'autre, aucun n'osant faire le premier geste. Autour d'eux, les Caprijens observaient en retenant leur souffle. B'Elanna essayait d'ignorer les cris venant de plus loin. Elle supposait qu'Harry devait être au plus fort du combat et elle ne pouvait pas se permettre d'être distraite par l'inquiétude pour son ami.
"Nous pouvons sûrement discuter de cela", haleta B'Elanna.
"Il n'y a rien à dire", se moqua le Sernaix. Il parvint, avec le bout de ses longs doigts, à égratigner un peu la joue de B'Elanna. B'Elanna s'écarta de son chemin, se heurtant à Azuma.
"Ca va, ça va, tout va bien", rassura B'Elanna la femme étrangère. Elle inspira profondément et tint son poignard devant elle. Juste au-delà de la fontaine, elle vit Harry chuter, le Sernaix se retrouvant par-dessus lui, un regard triomphal s'affichant sur son mince visage bleu... B'Elanna s'avança plus en avant. La soudaineté et la vitesse de son action surprirent l'étranger et le poignard s'enfonça dans la peau douce, sur son côté. L'étranger gronda et essaya d'atteindre le cou de B'Elanna.
"Pas si vite", dit-elle en respirant. Elle poussa fort contre lui, aussi fort qu'elle le pouvait, l'envoyant voler dans la direction opposée. Le Sernaix fronça les sourcils, mais ne fit aucun mouvement pour répliquer. "Renoncez-vous ?" le défia B'Elanna.
"Nous ne renonçons jamais. Nous sommes les défenseurs du royaume." Le Sernaix trébucha à ses pieds.
"Oui, j'ai vu ce que cela donnait la première fois que vous l'avez dite", lui dit B'Elanna, se rappelant la première rencontre du Voyager avec les Sernaix et leur déclaration hardie. "Nous ne vous voulons aucun mal. Laissez-nous tranquille et nous resterons en dehors de votre voie." Le Sernaix s'arrêta, les yeux crispés et vitreux. Il jeta un coup d'oeil par-dessus son épaule vers son camarade Sernaix qui était toujours debout sur le corps d'Harry. Alors, aussi mystérieusement qu'ils étaient arrivés, les Sernaix disparurent.

***

B'Elanna s'était précipité aux côtés d'Harry. L'Enseigne luttait pour s'asseoir. Elle l'aida doucement, une main à la base de son dos et l'autre derrière ses épaules. Horrifiée, B'Elanna vit qu'Harry saignait abondamment à l'épaule. Elle appela Azuma, qui apporta la trousse médicale du Docteur. Rapidement, B'Elanna trouva un agent coagulant et l'injecta à Harry.
"Cela ralentira le saignement", lui dit-elle. "Je ne veux pas remettre le Docteur en fonction, parce que le Sernaix a semblé absorber l'énergie et qu'ils ont semblé particulièrement intéressés par lui. Je ne veux pas leur donner une raison de revenir." B'Elanna tira un bandage de tissu de la trousse médicale et l'appuya contre la blessure d'Harry, espérant que la pression avec le coagulant arrêterait le saignement.
"Cela explique pourquoi mon phaseur n'était pratiquement d'aucune utilité", dit Harry tout en se remettant sur ses pieds. Il vacilla légèrement, gémissant lorsqu'une autre douleur le frappa.
"Doucement, Harry." B'Elanna prit son bras et l'emmena au Delta Flyer dont l'écoutille était toujours ouverte. "Je pense que vous avez assez joué au héros pour un seul jour. Asseyez-vous un petit instant, d'accord ?" Harry s'assit sur la rampe conduisant au Delta Flyer, secouant la tête d'un air piteux. "Je ne me suis pas senti aussi mal depuis que Tom et moi avions été capturé par les Akritirians." B'Elanna inclina la tête, se remémorant ces souvenirs du Voyager dans le quadrant delta lorsque Harry et Tom avaient été faussement emprisonnés dans des conditions terrifiantes. Même maintenant, Tom avait toujours refusé de discuter les détails précis de cette incarcération avec elle et avant aujourd'hui, B'Elanna n'avait jamais entendu Harry mentionner l'incident non plus.
B'Elanna prit son tricordeur et scanna Harry. "Vous vivrez pour affronter un autre jour, Starfleet. Je me demande ce que les Sernaix voulaient." Harry, le visage pâle, secoua la tête.
"Vos hypothèses valent les miennes", dit Harry. Elle portait maintenant attention à ses blessures principales, et examinait son ami. Il avait plusieurs coupures au visage ainsi qu'une éraflure sur la joue.
"Pouvez-vous vous lever ?" demanda-t-elle doucement tout en se levant. Harry hocha la tête et avec l'aide de B'Elanna, se leva, bien que toujours un peu perturbé.
"Partez-vous ?" demanda Azuma. B'Elanna se retourna pour faire face à la femme Caprijenne. "J'ai bien peur que oui", dit B'Elanna. "Harry est blessé et nous devons le ramener à bord du Voyager aussitôt que possible." B'Elanna ne continua pas, mais elle pensait aussi à son bébé, sentant un fort désir de rentrer à la maison pour tenir Miral dans ses bras.
"Nous avons des docteurs qui peuvent traiter votre ami", dit Azuma. B'Elanna sourit à la femme avec reconnaissance. Bien qu'Azuma n'ait pas été entièrement honnête avec eux, B'Elanna ressentait quand même une curieuse affection pour cette sympathique femme.
"Je sais", dit B'Elanna doucement. "Mais nous devons vraiment repartir sur notre vaisseau. Notre Capitaine voudra tout savoir de cette rencontre avec les Sernaix." Elle savait aussi que tôt ou tard, elle allait devoir donner une explication complète à Janeway quant à ses actions sur la planète. Malgré le fait qu'elle estimait que Janeway comprendrait ce qui était arrivé avec le Gardien et excuserait son comportement, B'Elanna sentait une certaine urgence à tout expliquer directement, aussi vite que possible.
"Les Sernaix ?" demanda Azuma l'air embarrassé.
"Les étrangers. Les étrangers bleus et cornus qui viennent tout juste de nous attaquer", dit B'Elanna. "Ils s'appellent les Sernaix, les défenseurs du Royaume." B'Elanna annonça ces derniers mots avec un certain sarcasme.
"Nous n'avons jamais su comment ils se faisaient appeler", dit Azuma. Ses yeux d'argent dérivèrent vers un endroit quelque part au-delà de B'Elanna. "Ils arrivent comme ça, de temps à autre, emportant tout ce que nous avons. Lorsque nous avons développé le système de camouflage, ils ne nous ont plus jamais dérangés. Nous étions... en sécurité."
"Et en ce qui concerne le Gardien ?" demanda B'Elanna brusquement, provoquant un coup d'oeil visiblement intrigué de la part d'Harry. "Est-ce que les Sernaix connaissent cela ?"
"Non, nous ne pensons pas", dit Azuma. "Mais dans leurs mains..." Harry et B'Elanna échangèrent un regard. Ils connaissaient très peu de choses des Sernaix, mais la pensée qu'avec leur puissante technologie, ils capturent le Gardien, Harry et B'Elanna se sentaient très mal à l'aise.
"Les modifications que j'ai faites au Gardien devraient vous permettre de tenir jusqu'à ce que vous ne trouviez une solution plus permanente", dit B'Elanna.
"Merci", dit Azuma. "Nous vous sommes reconnaissants de votre aide." Harry gémit et B'Elanna regarda son ami avec inquiétude. Du sang coulait de son bandage complètement imbibé. Evidemment la blessure était plus profonde qu'elle ne l'avait imaginé plus tôt. "Il faut que nous repartions sur le Voyager", dit B'Elanna. Elle serra la main d'Azuma. "Je vous souhaite bonne chance." B'Elanna aida Harry à se remettre sur pieds, laissant son ami reposer tout son poids sur elle. "Allez, en avant", dit-elle doucement. "Nous retournons à la maison."

***

De retour vers le Voyager, B'Elanna pilotait le Delta Flyer tandis qu'Harry transmettait un compte rendu complet au Capitaine et à Chakotay. Tous les deux furent abasourdis par l'attaque des Sernaix.
"Je ne m'attendais pas à une telle attaque contre mon équipage", dit Janeway. "Pas après la récente réunion que nous avons eue."
"Et bien, ils n'étaient pas là pour se faire des amis, je peux vous le dire", dit Harry. B'Elanna acquiesça pour approuver.
"C'était plus un scénario du genre 'on tire d'abord, et on pose des questions plus tard'", dit-elle. "Et nous avons appris des choses intéressantes sur eux."
"Je suis impatiente de tout savoir de votre rencontre", dit Janeway. "Je vous retrouverai dans le hangar à navettes."
"Compris. Delta Flyer terminé." Harry gémit en s'installant à sa place. B'Elanna lui jeta un coup d'oeil. "Il y a des analgésiques dans la trousse médicale", dit-elle. "Cela devrait aider." "Bonne idée", dit Harry. Il se leva de sa place et alla à l'arrière à la navette. B'Elanna pouvait maintenant voir le Voyager. Ils n'étaient plus qu'à quelques minutes d'atterrir dans le hangar à navettes et elle était incroyablement soulagée de voir le vaisseau spatial sur l'écran principal. La maison, pensa-t-elle, Voyager est la maison. Reconnaissant que Voyager était comme sa maison la fit légèrement se sentir honteuse d'avoir suggéré de s'installer sur la planète des Caprijens un peu plus tôt. Comme si n'importe quoi pouvait remplacer Voyager...
"B'Elanna ?" appela Harry.
"Qu'est-ce que qu'il y a ?" demanda-t-elle sans se retourner, occupée à se concentrer sur les manoeuvres d'approches du Delta Flyer. Les portes du hangar à navettes s'étaient ouvertes et le champ de force qui séparait la baie de l'immense étendue de l'espace avait été baissé.
"J'ai trouvé quelque chose", dit Harry. Il revint de l'arrière du Delta Flyer, la démarche lente et mesurée en raison de certaines des blessures qu'il avait eues durant le combat.
B'Elanna se retourna légèrement vers lui pour lui prêter un peu d'attention. "Que pensez-vous de cela, B'Elanna ?"
Harry lui montrait une petite pièce carrée tout en métal noir, chaque côté d'une longueur d'un centimètre environ et d'une épaisseur pas plus grosse qu'un ongle humain. De petits cheveux collés gros comme une dent sortaient du cube.
B'Elanna fronça les sourcils, touchant du doigt le métal frais. Elle pouvait sentir les arêtes de micro technologie sous le bout des doigts. "Mettez-le dans la trousse à outils. Nous regarderons cela de plus près à l'Ingénierie." Elle reporta son attention sur l'écran principal car la console se mettait à clignoter, indiquant que tout était prêt pour l'atterrissage de la navette.
"D'accord." Harry se glissa sur son siège tandis que B'Elanna manoeuvrait le Delta Flyer dans le hangar à navettes. Ils atterrirent doucement et Harry sourit. "Bon Travail, Maquisarde." B'Elanna haussa les épaules suite à l'éloge puis aida son ami à sortir du Delta Flyer. Comme promis, le Capitaine les attendait, Miral enlacée dans ses bras.
"C'est bon de vous voir", dit Harry. Il essaya de sourire, mais B'Elanna pouvait voir, malgré les analgésiques, qu'Harry éprouvait toujours des douleurs résiduelles. Elle spéculait que la blessure de couteau à son épaule était plus profonde qu'elle ne l'avait pensé.
"Je suis heureuse de voir que vous êtes tous les deux dans un seul morceau", reprit le Capitaine. "Est-ce que ça va, B'Elanna ?"
"Rien de grave, Capitaine. Une bonne nuit de sommeil et tout sera parfait", dit B'Elanna. "Et comment va mon bébé ?"
"Je l'ai kidnappée à l'Enseigne Wildman en venant. Une prérogative du Capitaine", dit Janeway tandis que B'Elanna prenait le bébé. B'Elanna sourit, frottant légèrement ses lèvres contre la tête de Miral, respirant le parfum frais et propre du bébé.
"Hé !" chuchota B'Elanna contre la joue du bébé. Miral saisit une poignée de cheveux de sa mère avec ses petits doigts potelés, et B'Elanna serra son bébé tout contre elle. Jamais elle n'avait pensé qu'un bébé pourrait la rendre si heureuse. Tenir Miral et comprendre instinctivement les petits sons que le bébé faisait provoqua en elle un sourire. "Oh ! J'avais presque oublié", dit Harry. Il retira l'émetteur holographique portable du Docteur et remit l'HMU en fonction.
"Veuillez s'il vous plaît préciser la nature de... Bonjour, Capitaine", annonça le Docteur. "Je dois dire, que c'est bon d'être de retour à bord. Mon voyage sur la planète était considérablement plus aventureux que ce que j'avais prévu."
"C'est ce que j'ai entendu", répondit sèchement le Capitaine. "Aucune raison à cette attaque, M. Kim ?" "B'Elanna et moi avons débattu des raisons sur le chemin du retour, mais nous ne sommes parvenus à aucune conclusion solide", dit Harry. "Les Sernaix étaient évidemment à la recherche de quelque chose, mais je ne sais pas de quoi au juste. Aucun de nos systèmes, autres que les systèmes de sécurité, n'a été corrompu."
"Vous avez visiblement appris beaucoup de choses sur les Sernaix", lui fit remarquer Janeway. "Peut-être pourrons-nous employer ces connaissances à notre avantage."
"Tout ce que nous avons découvert n'a été que purement physiologique, rien à faire avec leur technologie. Leurs techniques d'absorption d'énergie font que beaucoup des armes dont le Voyager dispose sont quasiment inutiles. Ce n'est pas bon signe si nous devons refaire face aux Sernaix en situation de combat."
"Aussi fascinante que puisse être cette conversation", interrompit le Docteur, "l'Enseigne Kim a quelques blessures dues à son héroïsme peu judicieux et il est nécessaire qu'il me suive à l'infirmerie." Janeway jeta un regard amusé dans la direction de son médecin Officier. "Très bien, donc. Enseigne", dit-elle, "vous pourrez continuer votre récit en chemin."
"Vous êtes juste jaloux. Il a fallu vous mettre en veille et vous avez manqué une chance de jouer les héros", dit B'Elanna en se payant sa tête. Elle fit un geste en direction de la porte. "Après vous, Harry."

***

"Je me dois de vous présenter des excuses à tous les deux pour mes actions sur la planète", dit B'Elanna. Elle observait le Docteur en train d'utiliser un régénérateur dermique sur les diverses contusions et éraflures d'Harry. Janeway avait de nouveau pris Miral avec elle et roucoulait avec le bébé avec une voix qui amusait beaucoup B'Elanna.
"C'était prévisible de votre part", dit le Docteur. "Voilà, Enseigne Kim. Vous êtes comme neuf, même mieux. Franchement, Lieutenant, si vous n'étiez pas si entêtée, les choses seraient beaucoup plus faciles par ici."
B'Elanna fronça les sourcils. "J'aurais dû laisser votre programme en veille."
"Ca va, B'Elanna", la coupa Harry. "Je comprends que la possibilité de revivre votre passé, de changer ces choses qui vous traumatisaient depuis toujours, était tentante. Comme je l'ai dit auparavant, je ne sais pas si j'aurais été capable de m'en détourner moi aussi si le Gardien m'avait offert une chance semblable."
"Je sais", dit B'Elanna. Elle tapota des doigts le bord du lit médical. "Le retour dans le Quadrant Alpha ne m'importait pas autant qu'à d'autres personnes. Je n'avais personne qui m'attendait comme vous l'aveiz, mais alors j'ai pris contact avec mon père. Cette conversation, même très brève, m'a convaincue que nous pourrions peut-être entretenir une relation dans l'avenir. Maintenant j'ai perdu cette chance. Quant à ma mère, et bien je ne sais même pas si elle est vivante ou non. Avoir eu cette opportunité..." Sa voix faiblit comme elle se concentrait sur Janeway, qui paraissait complètement fascinée par Miral.
"Ca va", répéta Harry. Le Docteur inclina la tête en signe d'accord, un peu de compassion passant dans ses programmes holographiques. B'Elanna leva la tête lorsque les portes de l'infirmerie s'ouvrirent pour laisser entrer Tom et Chakotay.
"Salut", dit doucement B'Elanna tandis que Tom passait un bras autour de sa taille. "Je suis heureuse de te voir."
"J'espérais que tu me dirais cela", dit Tom l'air taquin. Il regarda le Docteur. "Puis-je maintenant ramener ma femme à la maison, Docteur ?"
"Oui", répondit le Docteur en inclinant la tête. B'Elanna prit Miral des bras de Janeway et suivit ensuite Tom hors de l'infirmerie.
Janeway échangea un regard avec Chakotay pendant qu'Harry descendait du lit médical.
"Une minute, Enseigne", dit Janeway. "Nous avons des choses à discuter." Harry regardait avec curiosité Chakotay, qui gardait un air sombre et grave. Il n'y avait aucune allusion du tout sur le visage du Premier Officier et Harry ne pouvait pas s'empêcher de se sentir mal à l'aise. Même le Capitaine avait l'air sérieux.
"Bien sûr", dit Harry. Il fit le tour du lit médical pour faire face au Capitaine. Le Docteur ne bougeait pas d'où il était, mais l'expression sur son visage montrait une curiosité évidente.
"Je crois que vous aurrez besoin de cela", dit Chakotay, remettant à Janeway un petit étui rectangulaire.
"Cela aurait dû se faire bien avant, Harry", dit Janeway tranquillement tout en ouvrant la boîte, révélant un insigne de rang posé sur un fond de velours bleu. "Mais vos actions, présentes et passées, ont prouvé sans l'ombre d'un doute que vous méritiez le rang de lieutenant." Elle accrocha soigneusement l'insigne au col d'Harry, ses doigts frôlant légèrement son cou. L'insigne bien en place, Janeway recula d'un pas et admira son joli travail. "Il y aura une fête ce soir pour célébrer votre promotion, dans le Mess à vingt et une heures. Je crois que Chell nous dévoilera un nouveau plat... en votre honneur." Janeway grimaça à cette perspective.
"Cela sera, euh, délicieux", dit Harry, le rouge lui montant aux joues.
Chakotay tapota Harry sur l'épaule. "Cet insigne vous va très bien", dit Chakotay. "Félicitations. Vous l'avez mérité."
Harry rayonnait et le Docteur ajouta lui aussi ses félicitations. Janeway croisa ses bras sur sa poitrine tout en laissant paraître un large sourire sur ses lèvres.
"Vous pouvez disposer, maintenant", dit-elle. "Lieutenant." Elle mit l'accent sur ce dernier mot.
"Oui, Madame", dit Harry en souriant. Il inclina la tête vers Chakotay. "Je vous verrai sur la passerelle." Janeway soupira tandis qu'Harry quittait l'infirmerie et Chakotay se pencha vers elle, anticipant son geste. Le Docteur reconnaissait quand ses officiers commandants avaient besoin de discuter en privé, et s'excusa discrètement.
"Et bien ?" demanda Janeway, fronçant les sourcils, tout signe de sa bonne humeur précédente dissipé. "Vous avez entendu ce que B'Elanna et Harry avaient à dire sur leur rencontre avec les Sernaix. Peut-être me sius-je trompée, mais je pensais que nous étions arrivé à une entente avec Ilix."
"Peut-être que les Sernaix sur la planète ne savaient rien de la réunion à bord du Voyager", suggéra Chakotay. "Il se pourrait qu'ils cherchaient leur camarade blessé, et puisqu'ils n'arrivaient pas le trouver, ils ont voulu fouiller le Delta Flyer."
"J'espère que vous avez raison", dit Janeway, le regard fixe concentré sur le Docteur en train de s'occuper dans son bureau. "Mais j'ai beaucoup de mal à croire qu'une race aussi avancée que les Sernaix puisse avoir des problèmes de communication. J'ai le sentiment étrange qu'ils préparent quelque chose."
Chakotay n'ajouta pas un mot mais il sentait que Catherine voyait juste. Les Sernaix cachaient quelque chose dans leurs manches et franchement, il ne voulait pas savoir ce que c'était. Il posa légèrement sa main sur l'avant-bras de Janeway et la regarda attentivement.
"Quoi qu'il en soit, le Voyager est tout à fait capable de relever le défi", l'assura-t-il. Un éclair d'insolence et de détermination passa sur le visage de Janeway, et Chakotay sut que le moment venu, les Sernaix n'auraient aucune chance contre Catherine Janeway.

***

Tom retournait sur la Passerelle, laissant B'Elanna seule dans leurs quartiers avec Miral. Miral était somnolente et elle se reposait contre l'épaule de B'Elanna, ses minuscules doigts dans sa bouche. B'Elanna se balançait doucement dans le nouveau fauteuil que Tom avait répliqué pour elle peu de temps après la naissance de Miral.
C'est, pensa B'Elanna, le moment parfait, un instant où seul comptaient les rêves et les aspirations qu'elle avait pour son propre enfant. Négligemment, elle se demandait si sa propre mère, l'autre Miral, avait vécu un moment semblable avec elle.
Quels avaient été les derniers mots de Miral Torres pour elle ?
"Si tu étais une mère, tu saurais..."
B'Elanna avait la gorge serrée. Elle n'avait jamais attaché beaucoup d'importance aux mots de Miral, les prenant pour l'une de ces remarques sans intérêt que les mères lançaient à leurs filles dans les situations tendues. Mais maintenant, tenant sa propre Miral dans ses bras, B'Elanna commençait à comprendre réellement la signification de ce que sa mère avait essayé de lui dire.
"Miral", chuchota B'Elanna à sa fille qui dormait maintenant. "Je suis heureuse que nous soyons seules parce qu'il y a quelque chose que j'ai l'intention de te dire. ça m'est déjà arrivée plus tôt et j'ai bien peur que tu doives te montrer indulgente envers les bétises que fera ta mère, une fois ou deux."
B'Elanna se leva délicatement du fauteuil à bascule et emmena Miral jusqu'à son berceau. Elle y déposa doucement le bébé. Avec précaution, elle couvrit Miral d'une petite couverture rose brodée d'une image du Voyager, un cadeau du Capitaine, et toucha la joue douce de Miral de ses doigts.
"Je me rends tout juste compte maintenant que tu vas grandir et que tu seras une personne spéciale, unique." B'Elanna sourit en pensant par avance à tous les événements marquants que Miral rencontrerait. Certains seraient plaisants, d'autres seraient déchirants, mais B'Elanna savait qu'elle chérirait chaque moment. "Je suis sûre que nous aurons beaucoup de désaccords lorsque tu grandiras. Je ne ferai pas toujours ce que tu veux que je fasse et je ne vais pas toujours voir des choses comme tu les verras. En fait, il y aura des moments où je serai en travers de ton chemin. Tu devras être patiente avec moi parce qu'il n'y a aucun manuel sur la manière d'être une bonne mère, mais je ferai de mon mieux pour toi et j'espère que tu le comprendras."
Dans son berceau, les petites lèvres roses de Miral s'ouvrirent légèrement pour ensuite se refermer, faisant apparaître comme un très fin sourire. B'Elanna remit soigneusement la couverture sur le corps tout rond de Miral, posant légèrement sa main sur le ventre de Miral.
B'Elanna se mordilla la lèvre, tout en essayant de retenir les larmes qui lui venaient aux yeux. "Je suis heureuse que nous ayons eu cette conversation."
Seule dans le calme des quartiers qu'elle partageait avec Tom Paris et leur fille, B'Elanna était très consciente de tous les petits détails de la vie qu'ils construisaient ensemble, de tous ces petites choses qui faisaient de ce lieu leur foyer.
Et cette prise de conscience lui faisait comprendre ce qu'elle aurait pu avoir, et plus important encore, ce qu'elle aurait pu perdre, ce qui aurait été d'autant plus douloureux.

***

Dans l'intimité de l'ascenseur, Harry toucha du doigt le nouvel ajout à son col. Il se sourit à lui-même et, quand les portes s'ouvrirent sur la Passerelle, essaya de prendre une nouvelle image, celle d'un lieutenant, comme il l'avait toujours imaginé.
"Je vois que tu as finalement obtenu ton insigne. Mes félicitations", dit Tom, se retournant sur sa chaise pour faire face à Harry. Ce dernier lança un sourire à son ami tout en se dirigeant vers sa station. "Mais n'oublie pas, je suis toujours ton supérieur."
"Pour le moment", répondit Harry effrontément.
"Messieurs", dit le Capitaine, sans cependant aucune réprimande dans la voix. Elle appréciait visiblement autant qu'eux ce petit moment de détente.
Harry avait activé sa console, prenant un moment pour se remettre dans le bain des données de ce secteur de l'Espace. Il ignorait les bavardages des autres et recommençait un balayage du secteur. Il n'y avait rien là-dehors à part des étoiles, une planète de Classe M de temps à autre et... la console se mit à bipper. Les doigts d'Harry volèrent sur sa console tout en essayant de trouver une signification cohérente aux données affichées. Théoriquement, il n'y avait rien là-dedans, mais cette distorsion d'énergie, cette allure particulière lui semblait vaguement familière.
"Capitaine!"
"Qu'y a t-il, Harry ?" demanda le Capitaine en se dressant sur ses pieds, propulsée par l'urgence dans la voix d'Harry.
"Je détecte une vague d'énergie..." Il travaillait furieusement, observant les ondulations qui prenaient forme sur sa console. "Je pense que cela pourrait être les Sernaix!"
"Contactez-les", ordonna Janeway, crispée. Elle s'était avancée vers l'écran principal, les mains sur les hanches.
"Aucune réponse. J'essaye de nouveau sur toutes les fréquences. Désolé, Capitaine, toujours rien", annonça Harry un peu frustré tout en balayant toutes les fréquences de tous les canaux possibles. "Ils nous ignorent."
"Et moi qui pensais que nous étions amis", dit Janeway, disant cela avec sarcasme. Elle se retourna vers Harry, le regard interrogateur, mais il avait reporté son attention sur sa console.
Toujours aucun vaisseau Sernaix visible, seulement une distorsion énergétique... Bon sang, quel genre de technologie ont-ils à leur disposition ? En étudiant les distorsions, il pouvait à peine distinguer les contours du vaisseau. "Ca y est, je vous tiens", dit Harry dans un souffle, pensant avoir réussi à obtenir une approximation raisonnable du vaisseau. "Vous avez du style, vous savez ?"
"Capitaine!" La voix de Tom sortit Harry de ses pensées. "Je détecte une sorte de salve d'énergie dirigée directement vers nous."
"Manoeuvres d'évasions! Tuvok!" cria frénétiquement Janeway autour d'elle, pendant que Chakotay ordonnait le passage en alerte rouge.
"Chargement des ..." Tuvok ne put finir sa phrase, le Voyager étant secoué par un puissant impact, faisant perdre l'équilibre à la plupart des membre d'équipage de la Passerelle.
"Rapport des dégâts", dit Chakotay, se retournant sur son fauteuil pour faire face à Tuvok.
"Dommages mineurs aux ponts trois et quatre", annonça ce dernier. "Aucun blessé n'est rapporté."
"Les boucliers sont à quarante trois pour cent, Capitaine!" dit Harry.
Janeway échangea un regard avec son premier officier, qui s'était maintenant levé pour la rejoindre aux commandes. "Je doute que nous puissions supporter un autre tir de cette intensité sans dégâts sérieux ou des blessés." "Dérivez toutes les sources secondaires d'énergie vers les boucliers", ordonna-t-elle. "Et déconnectez tous les systèmes non vitaux."
"Bien compris!"
"Capitaine ?" demanda Tom en se détournant des commandes, une expression perplexe sur le visage. "Les Sernaix ont disparu."
"Disparu ?" répéta Janeway en jetant un coup d'oeil à Chakotay. "Harry ?"
"Plus rien", confirma Harry. Les distorsions avaient en effet disparues de sa console. "Ils ne sont plus là, Capitaine."
Chakotay était debout tout près du Capitaine et lui parla à voix basse.
"Qu'est-ce que c'était que tout ça ?" demanda-t-il.
Janeway le regarda d'un air sinistre. Toutes leurs pourparlers avec les Sernaix n'avaient peut-être servi à rien. Chakotay avait vu juste. Ils avaient à faire à un ennemi qui n'avait aucun désir de faire la paix. Avec rétrospection, Janeway se demandait comment elle avait pu si facilement se laisser tromper. C'était dur à admettre, mais Janeway garda un ton serein pour annoncer sa conclusion.
"J'ai l'impression qu'Adimh Liven n'a pas aimé ma proposition", dit-elle. "Mais j'aurais apprécié que les Sernaix nous l'annoncent autrement que par une autre manifestation de leur puissance de feu."
"Voullez-vous que j'essaie de les recontacter ?" demanda Harry depuis sa station.
Janeway secoua la tête. "Non, Lieutenant", dit-elle. "J'ai compris le message."
Chakotay secoua la tête à son tour. "Ils auraient pu nous détruire s'ils avaient voulu, mais ils ne l'ont pas fait."
"C'était un avertissement. Ni plus, ni moins. J'ai l'impression que nous ne pouvons vraiment compter que sur nous-même dans ce secteur."
Janeway lança un dernier regard vers l'écran principal. Il n'y avait rien d'autre à voir que le noir absolu de l'Espace. Elle redressa les épaules.
"Chakotay. Mettez le Voyager sur alerte tactique pour vingt quatre heures. Harry, Seven, mettez à jour la base de données avec tout ce que nous savons des Sernaix."
 
"La prochaine fois que nous leur ferons face, je serai prête."

 
FIN.
---------------
Ecrit par: Seema
version française: André Blouin
Producteurs: Thinkey, Anne Rose et Coral

Remerciements aux différents correcteurs: Cimorene (version originale), MAB, Laurent (v. française).

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