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Episode 8.22 - LES ECHOS DE L'ESPRIT
Par: Mike Ben-Zvi (mbzvi@yahoo.com)
Version française: Laurent (stvoyager@free.fr)

Note: Star Trek: Voyager, personnages et autres produits dérivés sont des marques déposées de Paramount Pictures. Aucune infraction aux droits d'auteurs de Paramount voulue. La Saison 8 virtuelle de Voyager (Voyager Virtual Season 8, VS8) est une entreprise à but non lucrative. L'histoire est propriété de son auteur. Pas de reproduction sans sa permission.

"Le retour d'Oz."

Les images et les voix parvenaient à Harry, rapides et violentes, comme des traits de lumière d'étoiles traversaient un vaisseau de part en part à vitesse de distorsion maximale.
"Vous avez été infecté", disait l'Occampa.
"Nous appelons cela l'Olan'Vora", disait doucement Tal, "Le coeur partagé."
"Vos pupilles sont dilatées, votre respiration irrégulière", disait Seven of Nine.
"Tu as une tête à faire peur, bonhomme", disait joyeusement Tom Paris.
"Nous sommes les défenseurs du Royaume", tonnait le Sernaix.
"Mais vous êtes quelqu'un de bon", disait fièrement Catherine Janeway.
"Je vous reverrai, Harry", disait Ozymandias, "Très bientôt."
"Portez-vous bien, rapidement", disait à nouveau Seven.
Puis les voix et les visages se mélangèrent dans un tourbillon de lumière et de matière... se dispersant vers l'extérieur... prenant la consistance du sable...
... Du sable sans fin... balayé à perte de vue sur le paysage. Des dunes, des rochers, des plaines absolument plates... le désert.
Oui ! Une planète désertique, tournant silencieusement dans le vide. Elle s'étendit pour remplir la totalité de son champ de vue. Tout n'était qu'ambre, ocre et marron aussi loin que pouvait porter son regard...
Et là, une tache de vert sur l'horizon.
Le point singulier s'étendit pour devenir un champ, abondant de vie et de mouvement, comme un sanctuaire isolé au milieu de la brutalité sauvage. Et en plein coeur de ce paradis se trouvait... une grange.
Et pendant un instant très bref, un vieil homme fut assis sous le porche de cette grange, le regardant en souriant.
"Je vous attendais."
A ce moment, Harry Kim bondit de son lit, paniqué, le corps trempé de sueur froide. Il balaya rapidement la pièce des yeux, essayant de retrouver son équilibre et de contrôler le rythme rapide de sa respiration. Le vieil homme, la grange, la planète, tout avait disparu. Il était de retour dans les quartiers qui lui avaient été assignés, au milieu de la nuit, heure de la station. Rien de tout cela n'avait été réel.
Un rêve, gémit-il en silence, un autre de ces fichus rêves.
Harry jeta un coup d'oeil aux chiffres rouges faiblement éclairés de l'horloge sur sa table de nuit. 03H30. Encore trois heures avant qu'il ne doive se lever. Il se leva de son lit et marcha à pas feutrés jusqu'à la baie d'observation, le regard perdu dans la noirceur d'encre de l'espace, se persuadant qu'il était bien là. Il y avait effectivement une planète désertique en dessous de lui, mais c'étaient Mars et ses plaines rouges familières, avec ici et là des taches diffuses de vert sur la face éclairée où le terraformage prenait forme petit à petit. Le côté nocturne révélait les lignes de lumières des colonies humaines et des travaux d'irrigation.
L'espace au-dessus de Mars était rempli du fouillis silencieux des stations spatiales et des abeilles de travail tournant autour dans un balai frénétique incessant. Tout cet ensemble, cette ruche active, formait le vaste complexe des chantiers navals d'Utopia Planitia. Harry pencha la tête vers le bas pour regarder l'un des bras d'arrimage de la station d'ingénierie Robert J. Fulton, le petit module habitable où il était actuellement affecté.
Et là, arrimé au bout du bras, enrobé dans son unité portable de cale sèche, se dressait la raison pour laquelle il se trouvait ici. C'était un vaisseau, ou plutôt la structure à moitié finie d'un vaisseau. Il n'avait pas encore de nom, ni de classe. C'était la fierté et la joie de ce qui était désormais connu comme le projet Montana, et appelé uniquement 'le prototype'. Naturellement, il avait acquis son lot de surnoms parmi le personnel de la station. La folie de Fulton était le préféré d'Harry, même si le nom lui-même n'était pas flatteur. Sachant que le projet Montana avait été créé pour rassembler ensemble de nombreuses technologies extraterrestres des plus disparates en un seul nouveau vaisseau, le scepticisme de Starfleet quant à l'envol un jour du vaisseau était des plus justifiés.
Les rêves l'ennuyaient, celui-ci plus que tout autre. Il n'y avait eu aucune continuité depuis les premières visions mystérieuses qu'il avait vécu pendant la dernière confrontation du Voyager contre les Sernaix. Mais alors, au moment où il était arrivé ici pour sa nouvelle affectation sur Utopia Planitia, les images revenaient comme pour se venger.
Il était allé voir l'officier médical en chef et la conseillère, et ils lui avaient tous les deux assuré qu'il n'avait aucun problème de santé. Sa conseillère était certaine que les rêves étaient plutôt dûes à l'anxiété qu'il ressentait à propos de son retour dans le quadrant alpha et ses nouvelles responsabilités. Après tout, être coupé de sa famille et de tout ce qui lui était familier pendant tant d'années ne pouvait pas ne pas laisser de traces. Elle lui avait assuré qu'au fur et à mesure qu'il s'acclimaterait à la vie dans son nouvel environnement, les rêves s'en iraient et son sommeil retrouverait son calme.
Jusque là, il n'avait parlé de ses rêves à aucun de ses supérieurs, mis à part à la conseillère Darret et au personnel médical de la station, et ils étaient tous astreints au secret professionnel, aussi longtemps que sa condition n'affectait pas son travail ou d'autres aspects de sa vie. La seule personne sur la station à laquelle Harry s'était allé à des confidences sur le sujet était B'Elanna. Il savait que si le Commandeur Vargas ou n'importe quel autre coordinateur du projet le suspectait d'instabilité mentale, aussi injustifiées que puissent être leurs craintes, cela lui garantirait une navette aller simple pour revenir sur Terre. Et Harry ne savait que trop l'importance qu'il attachait au fait d'être ici, jusqu'à ce que le nouveau vaisseau soit prêt, même s'il n'était pas très sûr de savoir pourquoi il devait vraiment être présent.
Suivant la recommandation de la conseillère Darret, le jeune officier saisit son journal de bord. Il approcha le petit appareil cylindrique jusqu'à ses lèvres et pressa le bouton d'enregistrement. La conseillère lui avait dit qu'il pourrait peut-être avoir une meilleure vision de ses rêves et une compréhension de leur signification s'il pouvait mettre ses pensées par écrit dès son réveil, pendant que les images étaient encore fraîches dans sa mémoire.
"Journal de bord personnel, date stellaire 55895.3", commença-t-il. "J'ai eu une autre de ces visions la nuit dernière. Je pense que c'était la plus longue que j'ai expérimentée. Comme dans les autres, j'ai vu... des séquences de souvenirs, de choses de mon passé. Des gens que je connais en train de me parler. Tout était des plus confus.
J'ai aussi revu la planète. Aride, sans océans. Je n'en suis pas sûr, mais je pense que je l'ai déjà vue quelque part auparavant. Ce que je veux dire, c'est que je suis allé sur nombre de planètes désertiques pendant le voyage du Voyager, mais celle-ci est différente. C'est comme si j'avais une connexion spéciale avec cet endroit.
Mais cette fois, j'ai vu quelque chose d'autre. Un porche. Et un vieil homme. Il me parlait... comme s'il était..."
Harry fit une pause, essayant de rassembler ses souvenirs, les premières images du pressentiment qui s'était imposé à lui de manière si forte dans le rêve et qui l'avait forcé à se réveiller. Ce n'était pas de la terreur qu'il avait éprouvée, il le savait parfaitement. Quelque part, il savait que le vieil homme n'était pas quelqu'un qu'il devait craindre. C'était plutôt le sentiment irrésistible que son visiteur immatériel était l'initiateur d'un grand changement dans sa vie. Mais Harry ne savait pas dans quelle mesure.
"Je ne sais pas", marmonna Harry dans son enregistreur. "Peut-être suis-je en train de perdre l'esprit. Le syndrome de l'isolation en Espace Profond. C'est ce que pense le Docteur Carmine. Il a peut-être raison. J'ai peut-être effectivement besoin de m'éloigner de cet endroit. Seulement, je sais que je ne le peux pas. Préparer ce vaisseau jusqu'à ce qu'il soit lancé est important. C'est une question vitale. Je n'en suis pas sûr, mais je ne peux pas m'empêcher de penser que le futur de la Fédération dépend de ce que nous sommes en train de faire ici."
 
***
 
Harry parvint à retrouver deux nouvelles heures de sommeil avant de devoir se lever pour respecter son emploi du temps. Il se traîna dans les profondeurs de la station jusqu'au réfectoire pour y prendre son petit déjeuner, et surtout une tasse de café fort pour se secouer jusqu'à être tout à fait éveillé.
Regardant autour de lui parmi la foule de visages, Harry fut surpris de s'apercevoir que tout cela ne lui semblait pas naturel du tout. Le mess réduit du Voyager, plus intime, présentait un environnement beaucoup plus pragmatique. Et bien qu'il reconnaisse une poignée de ses collègues flânant autour de la table du buffet, la plupart des gens dans la pièce étaient de parfaits étrangers, et le resteraient probablement à jamais. Pendant presque huit ans, Harry avait dîné, servi et combattu aux côtés des mêmes visages et en était arrivé à connaître leur personnalité et leurs manies aussi bien que celles de ses propres cousins et de ses camarades d'enfance. Occasionnellement, quelqu'un de nouveau rejoignait la bande, ou plus généralement, quelqu'un qu'il connaissait disparaissait. Mais dans l'essentiel, l'équipage du Voyager depuis le début de leur long voyage était resté une constante fondamentale à ses yeux.
Mais cela n'était pas le cas ici. La station Fulton seule avait un équipage de plus de deux milles personnes, dont plusieurs centaines d'ingénieurs et de directeurs qui faisaient des allers et retours quotidiens depuis les autres stations ou le complexe d'Utopia Planitia. Il avait fini par bien connaître sa propre équipe et avait développé des rapports aimables avec les chefs des autres projets avec lesquels il collaborait. Mais ils ne représentaient qu'un minuscule échantillon du vaste océan d'humains (et non humains) du projet, ou plutôt de sa nouvelle affectation.
Encore une chose de plus à laquelle il devait s'adapter maintenant qu'il était de retour à la maison.
Ce n'était pas qu'il soit malheureux ici à Utopia Planitia, pensait Harry. Bien au contraire. En tant qu'ingénieur en chef de l'équipe de construction du Projet Montana, il y avait pour lui ici des opportunités qui n'auraient simplement jamais été possibles à bord du Voyager. Pour la première fois depuis son affectation initiale comme contrôleur des opérations, il sentait que sa carrière repartait de l'avant. Il avait été spécialement requis pour ce poste, en considération de son expérience de travail sur des technologies d'ingénieries extraterrestres dans le Quadrant Delta ainsi que dans la Bulle d'Espace-temps. Il avait aussi acquis une certaine aura de célébrité depuis qu'il était arrivé dans la Station Fulton, et beaucoup d'employés de la station le cherchait pour qu'il leur raconte ses aventures à l'autre bout de la galaxie. De plus, sa contribution au projet lui avait valu le respect de l'officier de commandement de la Station, le Commandeur Vargas, quelqu'un qui s'était fait une réputation d'homme difficile à impressionner. Et enfin, pour couronner le tout, ce n'était qu'à un saut de puce de navette de sa famille sur Terre.
Oui, Harry Kim avait enfin fini par atteindre son objectif, s'amusait à penser le jeune officier. Mais cela ne l'empêchait pas de penser avec nostalgie au temps passé à bord du Voyager. Ce qu'il avait gagné en opportunités, il l'avait aussi perdu en famille.
Observant la pièce, il fut heureux de voir une personne particulièrement familière lui faisant signe pour attirer son attention. B'Elanna Torres était assise seule à une table dans le fond de la pièce et lui indiquait de se joindre à elle. Harry sourit en voyant son amie. Il était content qu'au moins un de ses amis du Voyager ait pu être ici, surtout une aussi talentueuse personne que B'Elanna. Ces derniers mois avaient été une période difficile pour elle. B'Elanna n'avait pas tous les diplômes académiques que l'on attendait d'un ingénieur ces derniers temps. Elle avait été élevée sur la frontière et ses talents, impressionnants au possible, étaient innés chez elle. Personne ne voulait risquer de la prendre, surtout avec son passé maquisard.
Mais Harry avait intercédé en sa faveur et parlé aux chefs de projets pour qu'elle soit prise en tant que consultante civile pendant qu'elle préparait l'examen du certificat d'ingénieur. Elle avait été heureuse de l'opportunité, même si cela signifiait qu'elle devait être éloignée de sa fille et de son mari pendant des jours d'affilée. Mais aussi attentionnée dans son rôle de mère que l'était B'Elanna, il lui était important de sentir qu'elle était toujours une bonne ingénieure et qu'elle pouvait contribuer à un monde meilleur pour faire la différence.
"Bonjour", lui lança B'Elanna pour l'accueillir tandis qu'il s'approchait de la table. Elle s'était déjà servi un plateau petit déjeuner spécial. Il était facile de distinguer B'Elanna de la foule, étant donné qu'elle était l'une des rares personnes habillées en civil et équipées d'un communicateur du type de la station Fulton à la place de l'uniforme et du communicateur de Starfleet.
"'jour", lui répondit faiblement Harry en s'installant dans le siège en face d'elle. Il sirota son café, espérant que la caféine lui apporterait petit à petit un semblant d'éveil.
"Eh bien, vous avez l'air terrible", taquina B'Elanna en regardant son ami exténué. "Dites-moi, jusqu'à quelle heure de la nuit vous êtes resté debout, au juste ?"
Harry la regarda l'air morne. "Pas si tard", dit-il en essayant de ne pas trop laisser voir son état.
Mais il était évident que B'Elanna voyait exactement ce qu'il essayait de cacher. "Vous avez encore fait un de ces rêves pendant la nuit, n'est-ce pas ?"
"Je n'ai pas envie d'en parler."
"Mon Dieu, Harry", soupira B'Elanna. "Il va falloir que vous preniez cela au sérieux. Vous avez d'abord eu ces visions à bord du Voyager, et maintenant cela ? Je vous avoue que cela commence à m'inquiéter."
"Et bien, merci, B'Elanna", rétorqua Harry avec un sarcasme aiguisé. "Je sais que je peux toujours compter sur vous pour me chaperonner. Mais vous ne croyez pas que cela me met déjà suffisamment sur les nerfs comme ça ?"
L'ingénieure demie-Klingonne leva la tête vers son ami avec sympathie. "Harry, je sais comme cette affectation est importante pour vous. Et je serais la première à affirmer que vous avez fait un boulot du tonnerre ici. Mais votre santé physique et mentale doit passer avant tout."
"Je sais", grogna-t-il, essayant d'être conciliant. "C'est juste que... je ne sais pas. Peut-être avons-nous tous travaillé trop durement."
"Et bien, peut-être qu'en sachant que nous ferons le lancement pour le weekend du Jour-anniversaire du Premier Contact, vous vous calmerez un peu", suggéra-t-elle gracieusement. "Vous croyez que vous pourrez tenir encore trois semaines ?"
"Peut-être", acquiesça-t-il. "Oh, cela me rappelle", dit-il, son visage s'éclairant en changeant de sujet, "j'ai parlé à ma famille la nuit dernière. Ils disent qu'ils seraient ravis si vous, Tom et Miral pouviez venir à notre barbecue."
"Je ne sais pas, Harry", dit-elle avec prudence. "Vous êtes sûr qu'ils sont d'accord ? Je ne voudrais pas que votre mère ait des ennuis à cause de nous."
"Vous voulez rire ?" répondit-il avec un sourire. "Vous n'êtes visiblement encore jamais allé à un barbecue du Jour du Premier Contact. Avec ma mère et mes tantes, il y a généralement plus de nourriture que quiconque ne pourrait jamais en manger. Vous nous feriez vraiment un honneur en nous en retirant un peu de la bouche."
"Et bien..." dit-elle en hésitant, mais intérieurement heureuse du ravissement qu'Harry montrait maintenant à parler de sa famille. Elle savait combien l'isolation lui avait pesé à bord du Voyager pendant de nombreuses années et comme il lui avait été difficile de se créer une vie à lui loin de sa maison comme Tom et elle. Elle était certaine que même une petite coupure dans sa famille pour les vacances disperserait les nuages que son ami ressentait en lui.
"Et de plus", continua joyeusement Harry, "vous rateriez quelque chose si vous ne gouttiez pas à l'un des steaks de thon de mon père."
"D'accord, d'accord", répondit-elle avec le sourire, "vous m'avez convaincue. Tom et moi serons heureux d'être là. Et je vous rappellerai cette promesse quant au steak de thon. Je suis très méticuleuse quant à ce que je donne à manger à ma fille."
"Hein ? Vous allez donner une pièce de thon à un bébé ?"
"Hé, elle est en partie Klingonne, vous vous souvenez?" dit B'Elanna, affichant toute la fierté d'une mère. "Miral développe déjà un goût certain pour la viande. Sans oublier sa première dent qui pointe déjà."
"Merci de me prévenir", gloussa Harry. "Je prendrai garde à ne pas laisser mes doigts près de sa bouche."
"C'est amusant, Harry", rétorqua-t-elle, amusée de la répartie.
Les deux amis éclatèrent de rire, heureux de ce petit moment. Harry savait que c'était difficile pour B'Elanna. Autant elle était heureuse de se sentir à nouveau ingénieure, autant on lui rappelait chaque jour qu'elle n'était pas le chef ici. A bord du Voyager, elle s'était accoutumée à donner des ordres en tant que chef ingénieur. Désormais, ici dans la station Fulton, elle n'était qu'un consultant civil, engagée pour conseiller et faire profiter de son expertise, mais personne n'avait à suivre ce qu'elle disait, à moins qu'Harry ne l'exige. Et plus d'un officier supérieur ici, y compris le commandeur Vargas lui-même, lui avait fait clairement comprendre qu'ils étaient moins qu'enthousiaste au fait de compter un ancien maquisard dans leur équipe.
Mais la sonnerie de l'intercom interne de la station interrompit Harry dans ses pensées. "Attention, à tous les chefs de projets et chefs d'équipe. Veuillez vous présenter au rapport aussitôt que possible dans la salle de conférence numéro trois à huit heures."
Harry réalisa que cela ne lui laissait plus que quinze minutes. Il ingurgita son café et se leva pour sortir. Il se retourna vers B'Elanna et vit son regard triste mais compréhensif. En tant que tête de l'équipe des ingénieurs du développement, sa présence était requise. Les consultants civils, par contre, n'était pas conviés.
"Désolé, B'Elanna", dit-il avec regrets. "Le Commandeur Vargas était supposé être en conférence avec le Commandement de Starfleet ce matin. C'est probablement ce dont il veut nous entretenir. Il faut vraiment que j'y aille."
"Hé, je comprends", dit-elle, avant de tourner la tête, pensant à ses précédentes confrontations avec le Commandeur de la station et à l'accueil qu'il lui avait réservée à cause de son passé dans le Maquis. "Il ne faut pas faire attendre Dieu le Père."
"B'Elanna", soupira-t-il, comme s'il voulait l'avertir de ne pas empirer sa situation déjà précaire à bord de la station. "Je vous verrai plus tard."
Puis l'ancien chef ingénieur du vaisseau stellaire Voyager dit au revoir à son ami, se souvenant d'un temps où elle-même s'absentait pour ce genre de réunion et avait un certain poids.
 
***
 
Cette réunion provoquée par le Commandeur Vargas, un ingénieur efficace et peu magnanime, avertit Harry et les 18 autres chefs de projets que Starfleet avait bousculé le calendrier, accélérant les choses. Les phaseurs transphasiques devraient être prêts immédiatement pour des séries de tests, de même que l'armure de coque isolante et les champs d'intégrité structurelle. Quant à Harry, il devait pouvoir mettre en service le système de transdistorsion et celui à courant de glisse. Tout devrait être prêt pour dans quatre semaines. Le but était désormais un lancement et un premier vol d'essai dans huit semaines.
L'annonce provoque un tollé, mais le talent du Commandeur permet de rappeler à l'ordre ces ingénieurs qui veulent que tout soit parfait, sans voir que le prototype doit être lancé le plus vite possible, seule défense contre une possible invasion Sernaix. Les problèmes mineurs seront corrigés plus tard.
Les moteurs semblent représenter le plus grand défi. Et quand Harry annonce que le seul moyen de pouvoir profiter de cette technologie autrement qu'en théorie serait d'installer directement le coeur de réacteur Sernaix retrouvé intact, il a droit à un nouveau concert de protestations de la part de ses camarades. Mais Vargas apprécie la proposition d'Harry et décide de tenter l'expérience. Même si dans des conditions normales, ce serait considéré comme de la folie, ils n'ont en fait guère le choix s'ils veulent lancer le prototype à l'heure. Starfleet met ce lancement tellement en priorité que tous les moyens nécessaires sont mis à leur disposition, quels qu'ils soient.
En mot de conclusion, Vargas leur concède que le planning n'est pas très raisonnable. Malheureusement, cela signifie que toutes les permissions devront être annulées, y compris le weekend du jour-anniversaire du Premier Contact, au grand désespoir de tous.
En sortant de la réunion, Harry tente de parler au Commandeur, mais se voit accaparé par trois de ces collègues qui l'accusent de folie. Parvenant enfin à Vargas, il lui fait une requête des plus spéciales quant aux moyens qu'il juge nécessaire. Il veut Seven dans son équipe. Vargas fait un bond. N'était-ce déjà pas assez d'avoir eu à accepter une ancienne Maquisarde, fallait-il en plus qu'un ancien drone Borg ait accès à toutes les données secrètes ? Et pour couronner le tout, cette même Borg dont l'esprit avait fusionné pendant un moment avec un Esprit de vaisseau Sernaix ? Finalement, Vargas accepte. Si ce que promet Harry quant aux capacités de Seven est exact, cela pourrait être leur seule chance. Seven sera donc affectée à l'équipe d'Harry. Mais ce dernier devra assumer l'entière responsabilité des actes de l'ancienne Borg et rapporter tout problème au Commandeur. Et c'est avec une pointe d'appréhension qu'Harry accepte le pacte.
 
***
 
Depuis sa nouvelle chambre, chez sa tante, Seven est en communication avec le Docteur. Mais elle ne l'écoute pas, distraite qu'elle est par tous ces éléments si peu familier, et tellement inutiles à son goût, de sa chambre. Le Docteur tente de lui faire comprendre qu'elle doit faire des efforts pour s'adapter, laisser sa tante l'atteindre. Mais Seven persiste à ne pas se voir chez elle ici, ne se considérant pas proche de sa tante. En fait, elle se sent perdue comme à sa première rencontre avec Janeway, isolée à nouveau de son collectif, celui formé par les membres du Voyager. Et pour couronner le tout, elle n'a plus rien à faire, Starfleet ne lui faisant pas confiance. Alors pourquoi ne pas aller se balader, profiter de ces moments de détente ? C'est en tout cas ce qu'adorerait faire le Docteur s'il n'était pas si surchargé de travail ! Seven lui promet d'y réfléchir, remerciant le Docteur de ses conseils et surtout de son appel. Puis elle reste seule avec ses pensées dans la pièce.
Sa tante l'interrompt et lui propose une petite sortie en ville. Mais il pleut, et Seven n'en a aucune envie. Irène lui ressort alors la même rengaine qu'à chaque fois. Annika aimait courir sous la pluie, dit-elle. Mais Annika n'existe plus, et elle ne veut pas l'admettre. La conversation dégénère et les mots dépassent les pensées de Seven, qui regrette cependant immédiatement ses paroles. Mais sa tante comprend enfin le malaise de Seven et tente alors de lui faire comprendre. Elle tient son père responsable de son enlèvement par les Borgs et a peur qu'en s'intégrant dans sa famille, son père sera automatiquement pardonné. Et cela, Seven n'est pas prête à le faire. L'ancienne Borg en reste coi, et avant de pouvoir répondre quoi que ce soit, l'ordinateur de la maison les interrompt pour les avertir d'un appel longue distance depuis Utopia Planitia. Sa tante veut alors la laisser tranquille, mais Seven insiste pour qu'elle reste à ses côtés.
"Utopia Planitia", pense-t-elle. Cela signifiait qu'il s'agissait soit de B'Elanna Torres, soit de...
"Harry Kim", dit-elle tandis que le visage du jeune homme se matérialisait à l'écran.
"Salut, Seven", dit le jeune officier avec le sourire en la fixant des yeux à travers le large écran. "J'ai entendu dire qu'il pleuvait dans votre coin des bois."
"Ma tante ne vit pas dans les bois", répondit-elle avec un sourcil des plus prononcés. Ses tentatives d'humour ne recevait pas toujours le meilleur accueil, mais Harry Kim était généralement bon public et cela lui faisait une bonne expérience.
"Exact", rit-il doucement. "Ecoutez, la raison pour laquelle j'appelle est que j'ai une proposition pour vous." Harry lui présenta son offre de poste sur le projet Montana, lui expliquant que Starfleet était prêt avec une navette pour l'emmener jusqu'à Utopia Planitia aussitôt qu'elle aurait accepté et serait prête à partir. C'était un voyage de trois heures jusqu'à Mars, ce qui laissait largement assez de temps à l'équipe de la Station Fulton pour aménager des quartiers à ses goûts et besoins particuliers, y compris l'alcôve de régénération. Pendant ce temps, Harry pourrait lui envoyer un fichier crypté avec tous les détails du travail déjà accompli sur la propulsion à courant de glisse, afin qu'ils puissent attaquer très vite dès qu'elle serait arrivée dans la station. S'il y avait une chose pour laquelle Seven était douée, c'était bien l'assimilation rapide de données.
"Alors, est-ce que cela vous intéresse ? Je ne veux pas mettre la pression sur vous, mais nous avons vraiment besoin de vous ici. J'ai besoin de vous. Euh, enfin, de votre aide."
Seven avait saisi ce qu'Harry avait voulu dire. A l'idée de travailler sur de la technologie Sernaix, elle... quelque chose s'excitait en elle. Une faible poussée dans les fins fonds de son esprit semblait vouloir lui dire que c'était ce qu'elle désirait, ce dont elle avait besoin. C'était étrange, pensait-elle, de ressentir cela. Mais quelque part, cela semblait tellement bien.
"Je dois avouer que je trouve votre proposition très... intriguante", dit-elle avec un sourire grandissant. "Ce serait très certainement un défi des plus stimulants... intellectuellement parlant."
"Alors vous acceptez ?" dit Harry, complètement excité.
"Je..." Elle se retint de répondre immédiatement au jeune homme. Travailler sur la station Fulton avec le Lieutenant Kim et B'Elanna Torres n'était pas exactement la même chose que son service à bord du Voyager, mais c'en était une bonne approximation. C'était un moyen de s'adapter graduellement à sa nouvelle vie, tout en conservant certains aspects familiers de son ancienne. Et cette sensation de bonheur en elle qui grandissait. Elle le voulait. Elle savait qu'elle allait accepter.
Mais elle se retourna vers sa tante, qui regardait tristement sa nièce, essayant de se forcer à sourire alors qu'elle avait suivi toute la conversation.
"Je... Je viens de recevoir une offre très intéressante", dit Seven. "C'est une opportunité de pouvoir contribuer à quelque chose d'important pour la Fédération."
"Je comprends, ne t'inquiètes pas", dit Irène. "Il faut que tu y ailles."
"S'il te plaît, ne crois pas que je veuille te quitter. C'est juste que..."
"Tout va bien, Anni... Je veux dire, Seven", dit l'aînée Hansen. "Tu n'as rien à te reprocher. C'est moi qui ai eu tort de vouloir te forcer la main trop vite. Peut-être est-il mieux que nous passions quelques temps chacune de notre côté, pour apprendre à s'habituer l'une à l'autre petit à petit."
"Es-tu certaine de cela ?"
"Tout à fait certaine", dit Irène avec une grande assurance. "Tu es ma famille, Seven, et cela signifie que je t'aime quoi qu'il arrive. Ceci est ta maison et le sera toujours. La porte sera toujours ouverte pour toi quand tu seras prête à revenir à la maison."
 
***
 
Et c'est ainsi que Seven s'est retrouvée sur la station Fulton. Accueillie par Harry et B'Elanna, regardée curieusement par ses nouveaux collègues ou simplement épiée comme une criminelle pour son passé Borg, elle a débarqué et c'est mise immédiatement au travail, assistée d'un Harry excité comme jamais auparavant. Vargas, toujours aussi peu enclin à la voir impliquée dans le projet, était là aussi pour l'accueillir, mais quant à lui beaucoup plus froidement et même plutôt menaçant. Mais qu'importe. Comme le dit B'Elanna à Seven dès que Vargas fut reparti, "Ne le prenez pas personnellement. Il m'a tenu exactement le même discours lorsque je suis arrivée. Apparemment, il aime les Maquisards au moins autant qu'il aime les Borgs." Puis avec un sourire sec, elle avait même ajouté, "Bienvenue à Utopia."
 
***
 
Seven s'intégra facilement dans l'équipe des quatorze officiers d'Harry, même si pour deux d'entre eux, il fallut un peu plus de temps et de diplomatie, surtout pour l'Enseigne Allenby qui avait perdu deux de ces cousins à la bataille de Wolf 359. Mais tout le monde avait fini par se comporter civilement avec elle. Par contre, elle avait plus de problème pour travailler en équipe. Elle savait qu'elle était techniquement supérieure à tout le monde, mais si sur le Voyager, la communauté avait appris à faire avec, ici, c'était une tout autre affaire. Mais Harry avait remarqué qu'elle avait appris à se maîtriser, du moins partiellement. Pour les autres occasions, et bien, Harry gardait toujours un oeil sur elle et arrondissait les angles avec ses membres d'équipage.
Seven prouva que sa venue était effectivement justifiée. Après à peine une semaine, Seven avait réussi à comprendre les schémas théoriques et B'Elanna et elle avaient réussi à fabriquer un scanner capable de générer un diagramme de coupe interne du coeur de réacteur. Cela avait déjà conduit à une nouvelle compréhension du fonctionnement interne du coeur, démontrant non seulement l'hypothèse de B'Elanna que le coeur de courant de glisse était un générateur d'énergie du vide, mais aussi que le dispositif exploitait les fluctuations quantiques du vide dans des matrices de matières condensées comme un calculateur, permettant ainsi un incroyable niveau de calculs des variations du courant de glisse. Le coeur était en fait sans doute l'ordinateur le plus puissant que Starfleet avait jamais vu.
Regarder simplement Seven travailler représentait un miracle pour Harry. Il se demandait juste quel degré de connaissance Seven avait bien pu conserver de son contact avec l'Esprit de Vaisseau Sernaix. Car à la vitesse où les idées lui venaient, c'était presque comme si quelqu'un les lui murmurait à l'oreille.
 
***
 
Pour déjeuner, Seven avait régulièrement un problème: trouver une place à une table où elle se sente à l'aise avec ses voisins. Heureusement, ce midi-là, elle trouve Harry et B'Elanna et se joint à eux. B'Elanna finit par lui demander de l'appeler par son prénom, et une petite conversation s'engage sur leur amitié de cinq ans. Le lieutenant Commandeur Singh les interrompt alors, car lui, Harry, Thrakass et Darcy ont rendez-vous avec Vargas pour recevoir l'accord du lancement de l'installation du réacteur à courant de glisse. S'en suit une série de félicitations entre les deux hommes et les deux jeunes femmes, avant qu'Harry ne s'en aille finalement de la salle, Seven le suivant des yeux comme si rien d'autre n'existait plus. Ce détail n'échappe pas à B'Elanna, qui lui en fait la remarque sur un ton gentiment moqueur.
Seven avoue à B'Elanna qu'elle est heureuse d'avoir été appelée à travailler dans cette équipe, lui remontant le moral quant à son utilité depuis leur retour de la Bulle. Après un discours sur l'art d'être utile, les deux femmes en reviennent à discuter sur la manière dont se développent des relations romantiques. Juste pour savoir, tente de faire croire Seven à B'Elanna, pas dupe du tout.
 
***
 
La réunion d'Harry avec Vargas était bien dédiée au démarrage de l'installation du réacteur de courant de glisse, suite aux rapports positifs de son équipe. Le rendez-vous est fixé au lendemain matin, dans la section terminée de l'ingénierie du prototype. Et au cas où il resterait un problème de compatibilité avec le reste du vaisseau, Harry et son équipe ont installé des garde-fous sur tous les systèmes. Ainsi, un problème sur le coeur ne causera aucun dommage au reste du vaisseau.
 
***
 
Dans ce qui allait bientôt devenir l'ingénierie du nouveau vaisseau, Seven découvre l'activité des équipes de construction. Elle est impressionnée des aptitudes d'Harry à diriger tout le monde, ayant visiblement appris de son expérience à bord du Nightingale. Il laisse les autres gérer le détail des décisions, mais incontestablement, c'est lui le chef pour les décisions importantes.
Le coeur de réacteur est apporté à ce moment-là. Cylindrique, surmonté de sphères à l'aspect organique, et surtout fait de la même matière photonique que les Sernaix utilisaient pour les coques de leur navires. Le fait que le coeur était auto-alimenté de l'intérieur en tirant son énergie du vide l'avait sauvé de la destruction totale du vaisseau, apparemment sans aucun dommage. Dans l'ingénierie, il est installé juste à côté du coeur principal.
Seven n'arrive plus à détacher son regard du nouveau coeur, restant en admiration devant lui. Harry aussi ressent cela, mais pour Seven, la sensation est plus étrange. Elle entend à nouveau ce murmure au fond de son esprit, agréable et familier.
Harry imagine que du réseau de sécurité vidéo, Vargas ne rate rien de la scène, tranquillement installé dans son bureau pour ne pas interférer. De son côté, il donne ses ordres. Les branchements sont effectués, ordre est donné d'alimenter le coeur depuis le coeur principal, d'abord à faible puissance. Mais rien ne se passe. Harry fait augmenter la puissance, et tout le monde est concentré sur le coeur, toujours inerte. Du coup, personne ne remarque Seven qui se dirige vers le coeur, comme en transe. Elle s'approche du coeur, le touche et en quelque sorte ausculte l'objet toujours inanimé, tandis que tous les autres sont occupés ailleurs aux circuits de transferts. Elle finit par détecter une interface libre. C'est à ce moment qu'Harry l'aperçoit et tente de l'avertir de s'éloigner. Seven devient immédiatement le centre d'attention de toute l'équipe, et trois membres d'équipage, aussitôt rejoints par Harry, tentent de la séparer du coeur. Mais leurs efforts restent vains. Seven est impossible à bouger, comme si elle était constituée d'un alliage de tritanium.
Harry tente alors de lui parler. Mais Seven ne semble pas comprendre ce qu'il lui dit, comme absente et sans contrôle d'elle-même. Tout semble perdu ? Non, car B'Elanna, de son côté, commence à noter des signes d'activités du coeur sur son moniteur. Il s'est mis en route. Et pas du tout comme prévu. Les câbles de branchement s'animent d'eux-mêmes, formant de nouvelles connexions et envahissant rapidement toute l'ingénierie. Les gardes de la sécurité dégainent leurs phaseurs, mais sans savoir quoi faire d'autre. Harry, quant à lui, essaye toujours de séparer Seven du coeur. Les mesures automatiques de sécurité ne s'étant pas mises en route, Harry réclame la coupure manuelle à B'Elanna. Sitôt fait, Seven se met à convulser et peut enfin être séparée du coeur qui s'était mis à émettre des lueurs bleutées dans la pièce.
Seven ne tient plus debout. Elle semble ailleurs, absolument inconsciente de tout ce qui vient de se passer.
Une voix surgit de l'intercom. Harry s'attend à se faire incendier par le Commandeur. Mais quelle n'est pas sa surprise lorsqu'il entend une voix bien trop familière.
"Aaahhh, je me sens tellement mieux maintenant", retentit une voix enjouée en écho à travers la pièce. "Vous n'avez aucune idée du confinement auquel j'ai été obligé dans ce si petit implant, ces derniers mois."
Si Seven et Harry comprenaient très bien de qui il s'agissait, ce n'était pas le cas de B'Elanna qui prit la défensive. Sur ce, l'entité se mit à utiliser les caméras comme des yeux et s'adressa 'face à face' à Harry pour se plaindre de ne pas avoir été introduit plus tôt auprès de ses amis.
Il prit donc la parole et annonça, "Permettez-moi de me présenter. Mon nom est Ozymandias, rois des rois. Prosternez-vous devant mon oeuvre, misérables, et priez !"
La mâchoire d'Harry se crispa, le laissant incapable de parler. Son esprit fit un bond en arrière jusqu'à cette horrible découverte faire plusieurs mois auparavant, la découverte de dizaines de corps Sernaix, tués par l'esprit de vaisseau rebelle Ozymandias. Un être qu'il avait cru mort, mais qui ne se contentait pas d'être 'vivant', mais avait apparemment pris le contrôle de Seven of Nine et avait maintenant le contrôle des systèmes de l'ingénierie qu'Harry en personne avait aidé à construire.
Tenant encore Seven affaiblie, il finit par réussir à formuler une pensée cohérente et aboya un ordre. "Evacuez l'ingénierie. Fermeture d'urgence immédiate."
Les ingénieurs effrayés n'eurent pas besoin de se le faire dire deux fois et coururent, criant et gesticulant, vers la sortie la plus proche. Harry traîna Seven avec lui en partant, essayant de faire abstraction de la voix du Sernaix l'appelant pendant qu'il courait.
"Hé, où allez-vous donc tous ? Nous avons des choses à discuter ! Des choses importantes ! Je pensais que..."
Les portes d'isolation de la section se fermèrent juste après que les derniers ingénieurs et gardes de sécurité aient fui la pièce, laissant l'Esprit de Vaisseau perplexe à l'intérieur, tout seul.
"Hello ? Il y a quelqu'un ?" appelait Ozymandias depuis la pièce. "Est-ce que j'aurais dit quelque chose ?"
 
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S'en est alors suivi une séance mémorable de colère du Commandeur Vargas envers Harry, et surtout envers Seven, qu'il accuse de comploter pour l'Ennemi Sernaix. Le problème revient à savoir si le Sernaix peut ou non prendre le contrôle du reste du prototype, chose qu'il essaye déjà de faire, et s'il a des intentions belliqueuses envers les humains de la station et des chantiers navals, choses qu'ils ignorent. Après tout, le prototype contient déjà un stock conséquent de torpilles quantiques. Harry, quitte à faire bondir Vargas, demande d'établir un contact avec Ozymandias afin de savoir ce que ce dernier veut. Et il se propose comme volontaire, presque certain que le Sernaix n'a rien contre les gens de la station. Après d'apres discussions, Harry finit par obtenir le droit d'aller discuter avec, ou plutôt écouter ce qu'a à dire, le Sernaix. Mais il n'aura qu'une demi-heure avant qu'un escadron de sécurité de Starfleet ne débarque pour tout faire sauter. Vargas décide aussi de confiner Seven dans ses quartiers, sous surveillance étroite. Harry, qui voulait initialement le bien de Seven, est désolé de l'avoir mise dans de si beaux draps.
 
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Harry revient donc discuter avec Ozymandias dans l'ingénierie du prototype. Il commence par se faire expliquer comment le Sernaix a survécu à l'explosion de son vaisseau. En fait, existant entièrement sous la forme d'une mémoire, il s'était fait une copie de sauvegarde dans l'implant cortical de Seven. Harry est très mécontent envers le Sernaix pour avoir gâché les derniers mois de Seven, mais Ozymandias lui affirme qu'il n'est pour rien dans ces problèmes-là. Seven a perdu tout souvenir de ces trois derniers mois, mais Oz n'y ait pour rien du tout. En fait, il lui avoue que lors du contact de Seven avec le vaisseau nodal, les Sernaix étaient parvenus à implanter en elle un autre Esprit de Vaisseau, de la même manière que lui s'était implanté en elle. Harry voudrait bien savoir ce que voulait cet autre Esprit, mais Oz ne le sait pas lui-même. Par contre, ce dont il est certain, c'est qu'Harry et B'Elanna ont bien réussi à détruire entièrement l'entité lors de leur nettoyage, quelques temps auparavant. Ceci avec l'aide d'Ozymandias compressé, bien sûr. Tout ce que sait Oz sur le rôle de l'autre Esprit de Vaisseau, c'est que ce dernier devait agir comme messager, rassemblant des informations précises afin de les transmettre à quelqu'un. Autre information, le message venait de Sycorax elle-même. Harry ne comprend pas ce qu'est Sycorax. Ozymandias lui explique donc qu'il s'agit ni plus ni moins de la première dame, l'adimha du cadre de la Direction, la personne qui connaît tout et voit tout. C'est ce que les Sernaix ont de plus proche d'un chef suprême. Ce que désire sûrement Sycorax, ce sont des alliés, des espions à l'intérieur de la Fédération afin de savoir ce qui s'y passe en plus de ce qui se passe dans la bulle d'Espace-temps.
Après ces explications, Harry insiste pour savoir ce que veut Oz. Et en fait, ce dernier désire réellement les aider en finissant avec eux le prototype. Ses motivations sont sincères. Il n'a plus d'endroit où aller, les Sernaix veulent absolument le tuer, et lui veut plus que jamais vivre. En échange, il offre sa connaissance sans fond de la technologie Sernaix, ainsi que de la façon dont pensent les Sernaix. Enfin, Oz avoue que les Sernaix sont extrêmement proches d'un affrontement avec la Fédération, ce qui s'avérerait être un désastre pour cette dernière.
Harry réfléchit à tout cela et demande dans quelle mesure les Sernaix peuvent atteindre la Fédération. Oz lui assure que les Sernaix sont au delà de tout ce que peuvent imaginer les humains. Le Kuljanul, par exemple, cette arme de destruction planétaire par déshydratation qu'on déjà rencontré ceux du Voyager, n'est qu'un petit exemple de ce que savent faire les Sernaix. S'il le voulaient, ils pourraient détruire toute vie dans le quadrant alpha en moins d'une semaine.
Toute vie... exceptée celle d'Harry et de sa flore intestinale.
Et quand Harry demande pourquoi les Sernaix l'épargneraient, tout ce qu'Oz lui répond est qu'il survivrait parce qu'il avait un Sernaix comme protecteur.
Pour une raison obscure, Harry sent qu'Oz dit la vérité. Il va donc plaider la cause de ce dernier devant ses supérieurs. Mais Oz lui demande quand même de faire très attention à ce qu'il dira et à qui il le dira. Car les Sernaix ont sans doute des oreilles partout. Oz conseille enfin à Harry de demander confirmation de tout cela à Seven. Plus précisément, il lui demande de la questionner à propos d'une certaine Section 31.
 
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Pendant qu'Harry discute avec Ozymandias, Vargas attend nerveusement l'arrivée de l'équipe de la sécurité de Starfleet. C'est le Lieutenant Commandeur Thalia Barton, une femme en uniforme et aux allures de lionne, qui arrive en compagnie de six impressionnants soldats bien armés. Elle demande aussitôt que Vargas fasse évacuer Harry de l'ingénierie afin que ses hommes puissent poser des charges électromagnétiques afin de détruire l'entité sans trop endommager le matériel. Et si cela s'avère insuffisant, alors ils feront sauter l'ingénierie. Ce sont les ordres qu'elle a reçue, quelque soit la réaction épouvantée de Vargas à la pensée de perdre tout le travail accompli. Mais le prototype ne tombera pas entre les mains de leurs ennemis. Mais Vargas, bientôt aidé de B'Elanna, tentent d'avancer la solution de la négociation avec Ozymandias. C'est sans succès, car Barton s'en tiendra aux ordres de ses supérieurs, dont elle refuse d'ailleurs de livrer l'identité à Vargas.
 
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"Bien sûr, cet endroit n'aurait pas été mon premier choix", dit Oz jovialement à Harry. "Déjà, vous auriez définitivement besoin d'installer quelques émetteurs holographiques dans cette pièce. Je me sens comme un fou en cage à vous parler par ses caméras."
"Euh, et bien, ils sont supposés arriver plus tard", dit Harry distraitement. "Ils viennent plus tard sur notre liste des priorités. Pour l'instant, nous sommes plus inquiétés à faire fonctionner le moteur à courant de glisse."
"Alors vous pensiez juste que vous pourriez brancher une technologie extraterrestre que vous ne compreniez pas ?" La pièce résonna du rire franc d'Ozymandias. "Je vais vous dire, vous autres êtes tombés sur la tête ! Pourquoi ai-je..." Mais la conversation fut brutalement interrompue pendant une seconde, avant qu'Oz ne reprenne sur un ton plus sérieux. "Vos collègues essayent de vous joindre. Je vous mets en communication."
"Lieutenant", fit la voix de Vargas dans son communicateur. "Nous avons besoin que vous reveniez à bord de la station immédiatement pour une conférence."
"Mais, Monsieur", répliqua Harry, "je pense que vous seriez intéressé d'entendre cela. J'ai parlé avec Ozymandias. Il demande l'asile politique auprès de la Fédération. Il veut nous aider..."
"Monsieur Kim", dit une nouvelle voix, féminine celle-là. "Vous avez reçu un ordre direct de votre supérieur. Ignorez tout ce que le Sernaix a pu vous dire. Il ne faut pas lui faire confiance. Retirez-vous immédiatement."
Harry laissa s'éteindre la communication en regardant derrière lui la forme du coeur de courant de glisse. Cela n'avait aucun sens, pensait-il. Il y avait dans cette pièce de quoi faire faire un gigantesque bon en avant à la Fédération dans sa confrontation contre les Sernaix, et maintenant Starfleet refusait d'en prendre la décision.
"Voilà, ça commence", dit solennellement Ozymandias comme en écho.
"Qu'est-ce que c'est supposé vouloir dire ?" lui demanda Harry.
"Qu'il vaudrait mieux que tu sortes d'ici comme ils te le demandent, Harry", dit le Sernaix désincarné. "Ils vont commencer à tirer d'une seconde à l'autre."
"Vous voulez dire une attaque ? Comment pouvez-vous en être sûr ?"
"J'ai été Adimh autrefois, petit. C'est ce que je ferais à leur place maintenant", dit Oz, laissant s'échapper un soupire audible. "Tu as fait de ton mieux, Harry, et j'apprécie. Je suppose que l'étape suivante pour moi est de préparer un maximum de défense possible et de..."
"Non", l'interrompit Harry. "Ce n'est pas normal. Je ne vais pas..." Harry réfléchit alors pendant une seconde, avant de se retourner face à une des caméras. "Vous disiez que vous pouviez contrôler mon communicateur. Pourriez-vous me garantir une ligne sécurisée avec quelqu'un de l'extérieur, que les gens des opérations ne pourraient pas écouter ?"
"Je peux arranger ça de ton côté, Harry", dit Oz, "mais je ne peux pas te faire de promesses quant au côté récepteur." Une seconde ou deux passèrent avant qu'il ne reprenne la parole. "Voilà, c'est fait."
Harry appuya alors sur son communicateur pour ouvrir un nouveau canal. "Kim à Torres", lança-t-il.
"Harry ? entendit-il B'Elanna dire d'une voix effrayée de l'autre côté. "Que se passe-t-il en bas ? C'est l'enfer qui se déchaîne ici. Il faut absolument que vous déguerpissiez de..."
"B'Elanna, écoutez-moi", la pressa Harry. "J'ai besoin que vous contactiez Seven tout de suite. Et assurez-vous que personne ne vous suive ni ne vous écoute. Surtout lorsque vous serez dans les quartiers de Seven. Je vous rappellerai là-bas avec de nouvelles instructions. Je vais bien et je suis en sécurité ici."
"En sécurité ? Harry, vous êtes coincé dans une pièce avec un Sernaix et il y a cette dure à cuir de la Sécurité de Starfleet qui est prête à fondre sur vous comme un ouragan à tout instant. Je ne sais pas de qui vous avez le plus à redouter pour votre sécurité."
"B'Elanna, faites-moi confiance", la pressa-t-il à nouveau. "Pour le moment, Seven et vous êtes les seules personnes en qui je peux avoir confiance. Je vous en prie, rejoignez juste Seven et assurez-vous qu'elle va bien. Je vous rappellerai aussitôt."
Harry se retourna alors vers Oz, hochant la tête d'un air solennel. "J'ai besoin d'un peu de temps supplémentaire. Avez-vous accès aux portes anti-feu et aux systèmes de sécurité internes ?"
"J'y ai accès", répliqua le Sernaix. "Mais..."
"Bien", répondit Harry avec un sourire en coin. "Verrouillez les portes. Activez le champ de confinement d'urgence autour du périmètre extérieur. Cela devrait pouvoir empêcher quiconque de me téléporter à l'extérieur."
"Harry, est-ce que je vous comprends correctement ? Etes-vous en train de me demander de vous prendre en otage ?"
"Aussi longtemps que je serai un bouclier humain pour vous, ils n'attaqueront pas. Du moins assez longtemps pour que je puisse rentrer en contact avec Seven. Si j'arrive à savoir ce qu'elle sait à propos des gens qu'elle a rencontré, et les comparer avec ce que vous avez vu pendant que vous étiez dans sa tête, cela pourrait prouver non seulement qu'on peut vous faire confiance, mais aussi qu'on peut faire confiance à Seven."
"Vous prenez un incroyable risque à me faire confiance, Harry", dit Ozymandias. "Pour ce que j'en sais, tout ce que je vous ai raconté aurait pu être totalement inventé."
"C'est possible", acquiesça Harry, toujours incapable de se défaire de cette étrange sensation qui montait en lui de l'intérieur.
"Alors pourquoi faire cela ?"
"Je n'arrive pas vraiment à le savoir", dit Harry, étonné de sa propre initiative. "Mais je vois cela comme une partie de mon devoir. Je suis responsable de Seven. C'est moi qui l'ai mis dans ce pétrin et je tiens à ce qu'elle aille bien. Je suis aussi responsable de ce projet et de son aboutissement dans les temps impartis. Et j'ai la conviction que... je sais simplement que ce que vous dites est la vérité. Je ne sais pas si tout cela a un quelconque sens pour vous."
"Oh, je dirais que ça en a un. Il existe une connexion entre nous, Harry. Vous, moi, et tous les Sernaix. Vous êtes l'Elu, l'Etre Touché, vous ne le saviez pas ?"
" l'Etre Touché ? de quoi parlez-vous ?"
Ozymandias gloussa devant l'incrédulité du jeune officier. "Peut-être que lorsque tout cela sera fini, vous pourrez reprendre une bonne nuit de repos. Et à ce moment là, tout deviendra clair pour vous."
 
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Pendant ce temps, B'Elanna rend visite à Seven. Après s'être assurée que la pièce n'est pas sur écoute, elle recontacte Harry. Ce dernier leur résume sa conversation avec Ozymandias. Effectivement, Seven connaît l'existence de la Section 31. Quelques uns de ses membres furent assimilés un jour, mais des dispositifs internes de sécurité les avaient tués avant que les Borgs n'aient pu en tirer des informations pertinentes. C'est ainsi qu'Harry apprend l'existence de la section 31, organisation secrète à l'intérieur même de Fédération, et qui travaillait pour elle, du moins jusqu'à la menace Sernaix. Les hommes assimilés travaillaient à corrompre le sénat Romulien, chose absolument interdite par les lois de la Fédération. Puis Harry recentre la conversation sur la manière dont ils peuvent prouver que ce que Seven et Ozymandias ont vu étaient la vérité. Le hic, c'est comment faire cela. C'est Oz lui-même qui s'incère dans la communication pour proposer une solution à ce problème, par l'entremise d'une nouvelle jonction mentale entre lui et Seven.
 
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De son côté, Vargas fait le point. Il ne veut en aucune manière laisser Barton et ses hommes intervenir tant qu'Harry est retenu en otage dans l'ingénierie par Ozymandias. Seulement, Barton n'a que faire de ses remords et fera ce que ses supérieurs lui ont ordonné de faire, quitte à utiliser tous les moyens disponibles pour arriver à ses fins.
L'un de ses hommes l'avertit alors que le champ de confinement d'urgence laisse un passage étroit à l'extérieur du mur de l'ingénierie, suffisant pour y téléporter des charges électromagnétiques pour une première vague d'explosion. Cela devrait suffire pour déstabiliser le champ suffisamment pour téléporter alors les soldats dans une seconde vague. Tout le monde est donc prêt chez Barton, et l'action est sur le point de commencer.
 
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Dans ses quartiers, Seven a commencé un cycle de régénération des plus singuliers. Elle est à nouveau liée mentalement à Ozymandias. Le but de l'opération est d'accéder aux mémoires perdues de Seven grâce à Oz, qui peut les explorer à loisir en sa qualité d'ordinateur, et d'en faire des images qu'il pourra comparer aux siennes. Prouver qu'il existe une branche secrète de Starfleet prendrait du temps, et ce serait difficile. Mais Harry était bien décidé à tenter sa chance pour Seven. Peut-être plus que pour sa simple amitié. Mais pour l'instant, ce qu'il admettait était son devoir envers elle et le prototype. Et l'expérience commença...
 
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Harry surveille l'expérience depuis l'ingénierie. La connexion se fait entre Seven et Oz, mais l'exploration de la mémoire de l'ancienne Borg prend du temps. Pendant ce temps, Harry explore des yeux la pièce et le coeur de courant de glisse, ressentant à nouveau cette sensation interne étrange. Puis d'un coup, tout bascule en lui. La réalité semble s'évanouir, les formes deviennent mouvantes et toutes ses connaissances se mêlent dans un tout inextricable. Harry s'affole, mais Oz le rassure. Il est tout simplement en train de se connecter avec le coeur. Harry a créé un champ corporel et se lie au coeur. Oz n'en croit quand même pas ses 'yeux' ! Croire la propagande des femmes du Cadre de la Direction était une chose, voir de lui-même l'Elu à l'oeuvre en était une autre bien plus impressionnante.
Harry ressent maintenant la présence de milliards de voix, se mélangeant à ses pensées au risque de lui faire exploser la tête. Puis les images se focalisent, et il commence à voir les mémoires de Seven directement en lui. Ensuite arrivent les sentiments, les peurs de Seven, surtout celle de ne pas être acceptée sur Terre. Harry réalise qu'il touche l'esprit de Seven, et découvre un nouvel aspect de l'ancienne Borg, beaucoup plus fragile et sensible qu'il ne l'aurait jamais cru.
Ozymandias explique alors à Harry ce qu'il vient de découvrir. Le lien, l'échange, est naturel chez les Sernaix, lui répond ce dernier.
Seven était protégée contre les émotions grâce à ses garde-fous corticaux, mais ne l'est plus maintenant. Harry découvre qu'elle n'était pas distante et froide de son plein gré. Désormais, sa nouvelle liberté lui donne le choix d'éprouver tous les sentiments humains. Et c'est cela qu'Harry ressent en ce moment. Quand les pensées de Seven se focalisent un instant sur Harry, ce dernier découvre même une certaine chaleur provenant de son esprit. Elle le sent dans son esprit et tente de lui parler, pleine de tendresse. Mais d'autres pensées prennent le dessus, la rémanence de l'autre Esprit de Vaisseau. C'est là que se trouve la clé de leur expérience. D'un seul coup, les visages des maîtres avec lesquels l'Esprit de Vaisseau cherchait à rentrer en contact apparaissent. Enfin, la solution de leur problème est à leur portée. Harry demande à Oz de faire une copie de ces informations, mais juste au même moment, il perd le lien et se met à dériver dans un délire de flashs, de sons et de lumières, cependant qu'Oz semble crier tout en perdant le contact, sans comprendre ce qui se passe. Harry tombe au sol, et reconnaît dans une demie-conscience les lumières familières des téléporteurs, puis une douzaine de formes humaines, armées de phaseurs de combat.
Les soldats ont donc fait irruption dans l'ingénierie. Après avoir isolé le coeur, ils placent les charges explosives puis s'intéressent à Harry, toujours étendu au sol dans un demi-coma. La chef du groupe se penche alors sur lui et déclare à ses hommes qu'aucun témoin ne doit ressortir de la pièce. Avant même qu'Harry n'ait l'occasion de se révolter, les portes anti-feu se rouvrent, prenant par surprise les soldats qui croyaient pouvoir mener les opérations comme ils l'entendaient. C'est Vargas, accompagné d'une dizaine d'officiers de la sécurité et de B'Elanna, qui s'interposent. Vargas ordonne aussitôt à Barton de suspendre toutes ses opérations, l'accusant d'insubordination. En effet, Ozymandias s'est officiellement rendu aux plus hautes autorités de Starfleet en émettant par le réseau de communication subspatial du prototype, depuis plus de dix minutes. Barton n'avait donc plus aucun droit d'intervenir pour le détruire.
Vargas jette alors gentiment dehors Barton et son équipe, annonçant l'arrivée imminente de diplomates chargés de discuter l'avenir d'Ozymandias. Harry se remet lentement sur pied et lui apprend qu'il peut prouver l'innocence de Seven. Mais tout cela devra faire partie de son rapport, que Vargas attend avec impatience et fort détaillé. Du coup, Harry a fait un bond impressionnant dans l'estime de Vargas, de même que B'Elanna. Les choses ont donc l'air de finalement bien s'arranger pour notre ingénieure préférée.
 
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Trois jours plus tard, Seven est convoquée dans le bureau de Vargas. Les choses ont bien évolué. La demande d'asile d'Ozymandias a été acceptée et il est devenu consultant du projet Montana, toujours installé dans le coeur du réacteur de courant de glisse, en attendant de trouver autre chose de 'plus confortable'.
Grâce à l'immense connaissance d'Ozymandias, l'équipe est désormais en avance sur le planning initial, et Vargas a de ce fait autorisé tout le monde à profiter de la permission du weekend de Jour-anniversaire du Premier Contact.
Bien que la conduite d'Harry et son interprétation des ordres aient été quelque peu discutables, les événements ayant mené à la découverte d'Ozymandias étaient suffisamment obscurs pour laisser toute action disciplinaire à la discrétion du Commandeur Vargas. Pour des raisons personnelles, celui-ci avait décidé de ne pas entamer de procédure, et Harry avait de nouveau ses bonnes grâces.
Quant à Seven, toutes les charges contre elles avaient été abandonnées, surtout après que les données et images récupérées de son esprit eurent été rendues disponibles. La seule incertitude concernait la poursuite ou non de son implication dans le projet Montana.
Vargas s'aperçut qu'elle était entrée et hocha légèrement la tête vers elle. "Seven of Nine", lui dit-il en accueil. "Je voulais simplement vous dire que vous étiez la bienvenue si vous vouliez rester avec nous à bord."
"Merci, Commandeur. J'aimerais beaucoup rester."
"Pas besoin de me remercier", dit Vargas, jetant à nouveau un oeil à la photo sur son bureau. "Vous avez fait du bon travail ici. Monsieur Kim a été particulièrement éloquent sur votre contribution dans la remise en état de l'ingénierie. Lui et Madame Torres parlent de vous dans les meilleurs termes."
"Le Lieutenant Kim est un homme bon", dit-elle, rougissant légèrement, "et un bon ami."
"Ainsi qu'un bon officier", accorda Vargas. "Un peu non conventionnel, peut-être, mais j'imagine que huit années dans l'inconnu vous force à devenir comme cela. Mais j'ai pu voir qu'il était loyal et dévoué au personnel sous son commandement. Il ira loin, j'en suis sûr."
"Effectivement", dit-elle, souriant, même très légèrement.
"J'ai aussi passé les images de ces hommes que vous avez rencontrés à l'un de mes amis dans les Services Secrets de Starfleet. Nous essayerons de savoir qui ils sont et de retrouver leur trace jusqu'à cette Section 31 dont vous avez parlé. Je ne sais pas si j'arriverai à croire qu'il puisse exister une organisation secrète à l'intérieur de la Fédération et dont personne n'a jamais entendu parler, mais s'il y a le moindre risque qu'il y ait des espions dans nos rangs, nous les trouverons."
"Je suspecte qu'il ne sera pas aussi facile de les localiser que vous ne pensez", répondit Seven sur un ton solennel.
"Peut-être", dit-il, regardant encore la photo en sirotant une gorgée de synthétol. Elle regarda par dessus son épaule pour avoir une meilleure vue. Les quatre cadets de la photos riaient ensemble et semblaient partager une passion profonde, très similaire à ce qu'elle éprouvait avec ses amis à bord du Voyager.
"Tim Wellmore, Nikolai Chen, Hesutta Iko Jedewa", récita froidement Vargas, regardant la photo. "Nous sommes sortis de l'Académie ensemble. Ils ont disparu pendant la bataille de Wolf 359."
Seven ressentit la douleur et la culpabilité de son ancienne association avec les Borg qui revenait à nouveau. Même si elle n'avait pas été physiquement présente durant cette terrible bataille contre la Fédération, sa condition de drone lui faisait ressentir toute l'attaque par l'intermédiaire du cube attaquant, comme tout le reste du Collectif. "Je suis désolée", dit-elle, sachant exactement comme ses excuses pouvaient être inutiles et sans réconfort. Mais c'était tout ce qu'elle avait à offrir.
"J'ai cru comprendre que vous aviez été assimilée dans le Collectif quand vous n'aviez que six ans", dit-il, continuant de regarder la photo et non elle.
"C'est exact. J'ai été assimilée en même temps que mes parents."
Vargas laissa s'échapper un faible soupir tandis que le silence tombait sur la pièce. "C'est une horreur de faire cela à un enfant", dit-il, révélant une légère trace de sympathie et de compréhension.
"C'a l'est, effectivement", répondit-elle.
Il releva alors la tête vers elle, lui adressant un léger sourire de compréhension. "Ce sera tout. Vous pouvez disposer."
Elle sortit en silence, le laissant avec ses souvenirs. En arrivant dans le couloir, Seven leva la tête et vit Harry Kim. Elle suspectait qu'il ne s'agissait pas d'une coïncidence.
"'Jour", l'accueillit-il. "Comment cela s'est-il passé ? Est-ce que vous êtes..."
"On m'a demandé de rester dans le projet", répondit-elle, incertaine de savoir comment elle devait se comporter avec Harry après les événements de ces derniers jours.
"C'est très bien", répondit-il, peut-être un petit peu trop vite, réalisa-t-il. Il n'était pas très sûr de savoir comment s'y prendre à partir de là. Leurs pensées intimes avaient été dévoilées durant leur expérience de fusion mentale. Et il n'était pas sûr de savoir ce que cela signifiait ou encore comment cela s'inscrivait dans ses rêves.
"Harry", dit-elle après un long moment de silence, en parlant d'une voix familière. "Je voudrais vous parler à propos de l'autre jour, quand nos esprits..."
"Oui", l'interrompit-il. "Je suis tellement désolé à ce propos. Je n'avais aucun droit de m'introduire dans vos pensées comme ça, et je..."
"En fait", l'interrompit-elle à son tour, "j'allais vous demander si vous aviez réussi à récolter de nouvelles informations sur la manière dont vous avez pu interfacer avec l'ordinateur du coeur de courant de glisse ?"
"Oh", répondit-il, incapable de cacher son rougissement. "Je... et bien, ils n'ont rien trouvé de mal en moi à l'infirmerie. Et je ne sais toujours pas ce qu'Oz voulait dire par cette histoire de 'Touché par Dieu'. Il ne m'en dira pas plus. Il dit que je ne suis pas encore prêt à savoir toute la vérité. Personnellement, je pense qu'il cherche à cacher la vérité."
"Etrange", médita Seven. "J'avais cru comprendre d'après les recherches du Docteur que l'aptitude à s'interfacer avec leur technologie était une propriété spécifique liée à la biologie cellulaire Sernaix. Un tel exploit serait impossible pour un humain, tout du moins pour un humain..." Elle laissa sa phrase se perdre, cherchant le mot approprié.
"Ordinaire ?" dit-il, terminant sa pensée, essayant simplement d'imaginer ce que Seven était en train de penser de lui.
"Je crois que le mot que je cherchais était 'non modifié'", répondit-elle, levant son propre avant-bras Borg amélioré en exemple.
Comme il aurait désiré avoir la capacité en cet instant précis de pouvoir lier mentalement son esprit avec celui de Seven. Mais pour le moment, tout ce qu'il avait à sa disposition était la même vieille intuition humaine sur laquelle les hommes et les femmes avaient été forcé de se reposer depuis des temps immémoriaux. Etait-ce la raison pour laquelle la race Sernaix avait décidé de vivre séparée comme ils le faisaient, résignée et frustrée de ne pas pouvoir se comprendre les uns les autres ? Dans ce cas, c'était une raison de plus de les prendre en pitié, pensait Harry, d'être obligé d'abandonner toute possibilité d'amour.
Il commençait à ressentir une connexion plus forte avec Seven, de celle qui allait plus loin qu'une simple amitié. Mais il connaissait ses peurs désormais, et il réalisait qu'il ne devrait pas forcer les choses trop vite. Après avoir observé son attirance envers des hommes comme Axum ou Chakotay, il se demandait s'il pourrait faire le poids. Après tout, il était... ordinaire, n'est-ce pas ? En dépit de ses rêves, il n'était certainement pas 'touché par Dieu'. dans tous les cas, il valait mieux qu'il garde ses sentiments pour lui jusqu'à ce qu'il soit certain qu'elle était prête à recevoir son affection.
Mais cela ne signifiait pas qu'il n'essaye pas de tester sa réaction.
'Euh, Seven", dit-il, essayant d'être clair. "Je... euh... et bien, maintenant qu'on nous a donné notre permission pour le Jour du Premier Contact, je me demandais si vous aviez prévu quelque chose ?"
"Je n'ai rien fixé de précis", répondit-elle. "J'avais pensé rester ici sur la station Fulton pour finir mon travail."
"Vous ne voulez pas vous retrouver en famille ?" demanda Harry.
"C'est un sujet embarrassant", répliqua-t-elle. "J'éprouve des difficultés pour communiquer avec ma tante au niveau personnel. Je ne souhaite pas qu'il se crée plus de difficultés entre nous, tant que je ne comprends pas ce que c'est que d'avoir une famille."
Une idée vint alors à l'esprit d'Harry, qui mit un sourire sur son visage enjoué. "Et bien, si je peux me permettre de vous faire une suggestion. J'ai invité Tom et B'Elanna à venir dans ma famille pour le barbecue ce weekend. Je suis sûr qu'il n'y aurait aucun problème à ce que vous et votre tante soient également invitées."
"Je ne veux pas vous causer d'embarassements."
"Comment une amie pourrait-elle être une cause d'embarassement ?" lui demanda-t-il d'un air jovial. "Et de plus, après quelques heures passées dans ma famille, vous aurez peut-être compris l'importance que cela peut revêtir."
"Je..." dit-elle lentement, sans trop articuler de paroles en particulier. "Merci", réussit-elle à dire, la voix tremblant d'émotions. "Merci pour tout, surtout pour vous être tenu debout à mes côtés lorsque j'en avais besoin." Puis elle le regarda, ses lèvres incurvées à nouveau en un sourire. "Comment se fait-il que durant tout ce temps pendant lequel nous avons été associés", lui demanda-t-elle, "nous ne nous soyons pas mieux connus ?"
Il lui sourit chaleureusement, étant à cet instant particulièrement touché de ses paroles. "Nous nous connaissons mieux, maintenant."
 
***
 
C'était une pièce sombre, dans une vieille maison restaurée. Les murs étaient couverts d'anciens livres reliés de cuir. Sa localisation n'était connue que d'un petit cercle de sélectionnés. Un homme aux cheveux argentés s'assit avec une autorité incontestable au lourd bureau de bois qui dominait le centre de la vieille pièce. Son nom n'était que d'un nombre de personnes encore plus restreint, mais pour ceux qui avaient l'habilitation d'interagir avec lui, il n'était connu que sous le nom de Monsieur West.
Il était en train de parcourir l'ensemble des tablettes sur son bureau. Il ne parlait pas aux trois hommes qui étaient assis à part sur le côté. Brock, Segall et Kelley savaient que lorsque leur supérieur serait prêt à parler, il le ferait. Pour l'instant, il avait de nouvelles affaires sur son agenda à régler d'abord.
La lourde porte de bois s'ouvrit en glissant et une nouvelle personne entra dans la pièce. Les hommes assis étaient tous habillés de costumes distingués, mais la nouvelle venue portait un uniforme d'un officier de Starfleet et une casquette noire, et avait des yeux noirs et vifs.
Thalia Barton resta debout au garde à vous dans l'attitude du militaire, jusqu'à ce que Monsieur West lui fasse signe de s'asseoir sur la chaise en face de lui. Dès qu'elle fut assise, il releva la tête et lui une seule et simple question.
"Qu'est-ce qui a raté ?" dit-il, clair et direct. Il ne demandait pas ce qui s'était passé, il le savait déjà. C'était le boulot de la Section 31 que de savoir tout ce qui se passait dans la Fédération et au-delà. Et Monsieur West était la Section 31.
"Je suis désolée", dit-elle sobrement. "Kim, Torres et la femme Borg ont eu le dernier mot avec Vargas. Ils ont aidé l'Esprit de Vaisseau à contacter directement le Conseil. Je n'avais aucun moyen de savoir que Kim bousculerait les règles de cette manière. Ca allait à l'encontre de tout ce que nous connaissions de lui par son dossier."
Monsieur West l'écouta patiemment avant de répondre. "Ne sous-estimez jamais les liens qui se sont créés entre ceux qui ont affronté ensemble le même adversaire, Commandeur. Cela a été votre erreur. Vous ferez mieux la prochaine fois."
Barton remonta la tête, encouragée de voir que son futur n'était pas fini en dépit de son échec. "Alors j'aurais une autre chance de pouvoir saboter le prototype ?" L'assaut contre Ozymandias, bien qu'organisé pour prévenir Starfleet de lancer son nouveau vaisseau à temps, n'avait été qu'une ruse. Si elle avait pu avoir ne serait-ce que quelques minutes de plus seule, jura-t-elle, alors les charges explosives auraient pu être posées sur tout le coeur de réacteur de distorsion et le prototype entier aurait pu être détruit. Les débris n'auraient jamais permis de comprendre ce qui s'était passé, et toute la responsabilité de l'accident serait retombée sur le compte de l'interférence d'Ozymandias.
"Non", dit Monsieur West, gardant les mains jointes devant lui sur le bureau. "J'aurai du travail pour vous plus tard, Commandeur. Vargas sera suspicieux maintenant, surtout si vous essayez d'infiltrer de nouvelles recrues dans le projet. Nous devrons attendre que les choses se calment avant de faire notre prochain mouvement."
"Etes-vous sûr que cela soit sage ?" Kelley se penchait en avant depuis sa chaise contre le mur est, juste sous un tableau doré représentant un paysage. "Surtout maintenant que le secret de notre existence a été compromis ?"
"Ne vous inquiétez pas de cela, Monsieur Kelley", dit Monsieur West, le visage toujours exempt d'émotivité. Nous n'avons rien à craindre de la part de quelques officiers et d'anciens Maquisards qui colportent des fables à propos d'une certaine organisation fantôme." Il s'autorisa un bref sourire à cette pensée. Les gens avaient une telle capacité d'accepter ou de rejeter les faits qui entraient ou non dans leur vision du monde. Et dans l'esprit utopique qui s'était créé ici dans la Fédération des planètes unies, l'existence d'une organisation comme la section 31 était littéralement impensable.
Monsieur West repensa à une citation d'un vieux film qui disait cela très bien. "Le plus grand tour que le Diable ait jamais réussi à faire a été de convaincre le monde qu'il n'existait pas.
"Bien entendu, juste pour notre sécurité", dit Monsieur West, tout en saisissant la tablette qui montrait les photos de Brock, Segall et Kelley, tous vus de face comme ils se tenaient lorsqu'ils avaient rencontré l'émissaire de Sycorax dans le corps de Seven of Nine. "Nos agents aux services secrets ont intercepté les photos que Vargas a transmis avec son rapport. Personne n'en aura plus connaissance."
Segall semblait toujours mécontent, en dépit des assurances de Monsieur West. "Vous-savez-qui ne sera pas content de cela", dit-il, secouant la tête. "Elle s'attendait à ce que nous nous occupions du prototype. Cela pourrait nous mettre dans une position plus délicate pour nos négociations."
"Peut-être pas", dit Brock, les yeux brillant et un sourire apparaissant sur son visage. "Nous pourrions avoir autre chose à offrir à nos nouveaux amis." Il pressa alors un bouton sur l'accoudoir de son fauteuil et le tableau du paysage sur le mur est glissa, révélant un large écran. L'écran s'illumina et afficha la scène d'une pièce sombre, montrant un jeune homme contrarié sautant de son lit. Il semblait juste venir de se réveiller d'un cauchemar.
"Journal personnel, date stellaire 55895.3", commença à dire Harry. "J'ai encore eu une autre de ces visions. Comme dans les autres, j'ai vu... des souvenirs, des choses de mon passé. Des gens que je connais qui me parlent. Le tout dans un fouillis inextricable."
"Oui, je suis d'accord avec vous", dit Monsieur West, les yeux fixés sur le jeune homme en train de raconter tous les détails de son étrange et attirant rêve. "Je pense que nos amis seront très intéressés par cela."
 
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Ecrit par: Mike Ben-Zvi
version française: Laurent
Producteurs: Thinkey, Anne Rose et Coral
Remerciements aux différents correcteurs: Zeke (version originale).

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